Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

Napoléon ou le cinéma comme une arme d’élévation massive

Hier 14 juillet, j’ai vu la première partie de ce chef d’œuvre absolu qu’est le Napoléon d’Abel Gance… Je me suis souvenue jusqu’à en pleurer de mon amour pour le cinéma et pour la France, dans un temps où étouffé par la médiocrité de la vermine qui ose parler en leur nom et ne connait que les profits et les petits calculs sordides on croit oublier ce qui vous emporte dans une tempête, celle de l’Histoire, celle qui au lendemain de la première guerre mondiale, cette immonde boucherie, exige un monde nouveau, l’invention d’autre langage, ce film nous livre un trésor sans limite dans lequel puise comme ont pu le faire tant de jeunes gens, on pense à Vigo, à Godard, qui n’ont jamais cessé de balbutier sur ce mode-là… Le surréalisme et tant d’autres expérimentations surgissent, comme les partis communistes. Celui de France est en train de mourir comme le cinéma français, comme la culture, l’art, de petits individus sordides qui étouffent un peuple au lieu de le servir comme mon pays étranglé de colère impuissante mené vers la guerre à nouveau par les mêmes ceux de l’union sacrée… Mardi, la deuxième partie… à 13 h 45 aux Variétés, il faut demander à ce cinéma d’autres séances et que chacun aille se laver l’âme dans un tel spectacle. Il faudrait profiter de l’été pour lancer des projections populaires partout… (note de Danielle Bleitrach pour histoireetsociete)

“Pour Abel Gance, le cinéma était une arme d’élévation massive”, raconte Georges Mourier, l’artisan de la restauration du “Napoléon”

Près d’un siècle après son tournage, le film reste un ovni précurseur et un objet unique dans l’histoire du cinéma mondial. Le réalisateur et chercheur Georges Mourier nous explique pourquoi.

Article rédigé par Annie Yanbekian France Télévisions – Rédaction Culture Publié le 13/07/2024 Temps de lecture : 13 min

À gauche, Abel Gance pose avec une caméra de cinéma en 1959. À droite, le comédien Albert Dieudonné dans le rôle de Napoléon (1927). (KEYSTONE PICTURES USA / ZUMAPRESS / MAXPPP - CINEMATHEQUE FRANCAISE / PATHE)
À gauche, Abel Gance pose avec une caméra de cinéma en 1959. À droite, le comédien Albert Dieudonné dans le rôle de Napoléon (1927). (KEYSTONE PICTURES USA / ZUMAPRESS / MAXPPP – CINEMATHEQUE FRANCAISE / PATHE)


Après un chantier total de seize années, le film Napoléon vu par Abel Gance, sorti en 1927 avant d’avoir connu bien des remontages et restaurations, présenté pour sa première moitié le 14 mai dernier à Cannes, est parti enfin à la rencontre du public du 21e siècle. La version de plus de 7 heures, divisée en deux parties, considérée comme définitive, reconstruite et restaurée par le réalisateur et chercheur Georges Mourier pour la Cinémathèque française, a été livrée en fin de semaine dernière, les 4 et 5 juillet, à la Seine Musicale, sous forme de ciné-concerts accompagnés par les orchestres et chœurs de Radio France (dirigés par Frank Strobel). Le triomphe fut complet comme en ont attesté les longues ovations qui ont suivi chaque partie de la projection.

Désormais, le film poursuit sa route en salles, aux cinémas Pathé et dans les salles d’art et d’essai, à la Cinémathèque avec deux week-ends de projection les 13-14 et 20-21 juillet, ainsi qu’au festival Radio France Montpellier pour deux soirées les 18 et 19 juillet.

Pour tout cinéphile, Napoléon vu par Abel Gance, évocation de la jeunesse de Bonaparte depuis l’école militaire de Brienne jusqu’à la campagne d’Italie, est un chef-d’œuvre incontournable du cinéma mondial. Il l’était déjà à sa sortie, il le demeure plus que jamais à l’issue de quatorze années d’une restauration herculéenne par Georges Mourier et ses équipes, suivies de deux années d’une mise en musique très inspirée, essentiellement à partir d’œuvres existantes, par le compositeur Simon Cloquet-Lafollye. Pour Georges Mourier, qui a sondé au plus profond les entrailles du film, et qui connaît l’œuvre d’Abel Gance et les incarnations de Bonaparte au cinéma, le Napoléon est bien davantage qu’un monument sauvé par une longue cure de jouvence. Créé à une époque très particulière de l’histoire du monde, il reflète et illustre un bouillonnement créatif extrême qui n’a pu s’accomplir, une promesse folle demeurée à l’état de rêve inachevé. Pour Franceinfo Culture, le maître d’œuvre de la restauration analyse un phénomène unique.

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Une société marquée par la Première Guerre mondiale

“Au moment où Abel Gance prépare son Napoléon, l’humanité vient de vivre pour la première fois une guerre mondiale à mobilisation générale. Les grands créateurs de l’époque se disent : “Nous n’avons pu compter sur rien pour éviter cette boucherie, ni un patriotisme, ni un nationalisme, ni une religion ni même Dieu.” Gance fait partie de ces gens qui considèrent qu’après l’horreur de 1914-18, il faut inventer quelque chose de nouveau qui relie les peuples. Sinon, on vogue à nouveau à la catastrophe, et c’est d’ailleurs ce qui arrivera. Tous ces créateurs ont une grande culture littéraire. Ils savent que les écrits de Dante, et bien sûr la Bible, la Torah, le Coran sont des livres qui ont impacté l’humanité. Très tôt, Abel Gance écrit – on peut le lire dans son journal intime Prisme publié après le Napoléon, et qui contient des notes de lui depuis ses 18 ans – qu’il faut absolument que le cinéma, ce nouvel art, ait la chance de tomber sur un créateur capable d’unifier un message universel et d’avoir un effet sur les consciences. Gance est loin d’être un idéaliste isolé. Ce qui est assez cynique, c’est que dans la même décennie, un certain Staline devine aussi très vite que pour une population russe majoritairement analphabète, le cinéma sera un moyen de propagande extraordinaire.”

L’impressionnisme au cinéma et un rêve universaliste

“Il faut souligner l’état d’esprit des jeunes créateurs qui ont constitué le mouvement de l’impressionnisme français des années 1920 à 30. Ils découvrent donc un nouvel art. Ils partent du principe que de la même façon qu’il y a eu des livres qui ont changé la manière de penser humaine, ils espèrent, ou ils ont peut-être l’ambition – ou l’intuition – que ce nouvel art sera, lui aussi, capable d’exercer une influence sur les consciences. Et si possible, de les élever. Ne serait-ce qu’avec un, deux ou trois films. Abel Gance considérait le cinéma comme une arme d’élévation massive. On trouve une phrase sublime dans Prisme, qui illustre son côté exalté qui lui vaudra bien des moqueries par la suite : “Créer une nouvelle forme d’art pour faire lever la tête aux hommes, car ils ne regardent plus que le sol où est l’or, le charbon et le cercueil, pour retremper leur courage, stimuler leurs énergies, agrandir leurs prisons et supprimer leurs crépuscules.” Il va encore plus loin dans ce livre, formulant le vœu d’“essayer par un magnétique alliage de dégager la nouvelle orientation spirituelle que doit prendre le monde à une heure où les indicateurs de Route commencent à lui manquer”, et d’édifier “le temple de l’Évangile de l’avenir” dont “chacune des colonnes porte nom de Jésus, de Bouddha, de Mahomet, de Moïse, de Krishna, de Confucius”… En tout cas, cela démontre sa confiance inébranlable dans l’aspect missionnaire de l’art cinématographique.”

Gance hanté – et transcendé – par un deuil personnel

“En général, je n’aime pas que l’on réduise la création de quelqu’un à quelque chose de privé. Mais un événement de la vie personnelle d’Abel Gance a son importance. À partir de 1923, quand il va se lancer dans l’aventure du Napoléon, il vit alors – et il vivra toute sa vie – marqué par la perte de sa compagne Ida Danis, morte en 1921. Elle est tombée malade le premier jour du tournage de La Roue (film sorti en 1923) et elle est morte à Arcachon, dans la Ville d’Hiver, le jour de la fin du premier montage. Gance part alors aux États-Unis. Là-bas, il rencontre le cinéaste D.W. Griffith qui partage son approche du cinéma, et à son retour, il reprend son montage à zéro. Sa fille Clarisse (qu’il aura plus tard avec sa troisième épouse, Sylvie), m’a toujours dit que jusqu’à la fin de sa vie, Ida était restée présente. De par son deuil privé, Abel Gance est confronté pour la première fois de sa vie à l’intangible, à l’invisible, qui est le mystère de l’absence de l’être cher. Il a connu “l’épreuve du feu” – ce sont ses mots. En 1922, un an après la mort d’Ida, il se marie avec la sœur de sa compagne, Marguerite (elle incarne Charlotte Corday dans Napoléon). Ils divorceront en 1931. Sur le tapuscrit de 1926 sur lequel j’ai travaillé à la BnF, on peut lire une dédicace sur la première page : À ma grande morte.

Gance plonge à pleines mains dans le monde de l’invisible. Parce que sa propre vie est marquée par la division entre l’âme et la chair. Or le propre de l’artiste, c’est de faire passer de l’invisible dans du visible, “faire passer sa nuit en plein jour”, comme disait Jean Cocteau. Cela va l’obliger à dépasser les limites de tout ce qui a déjà été fait. Quand on voit les images du tournage du Napoléon, on observe une joie de créer, une énergie, une effervescence partagée.”

Une admiration pour Napoléon née sur le tard

“Contrairement à ce que l’on pourrait croire, je ne crois pas qu’Abel Gance ait entamé le projet du Napoléon par passion intrinsèque pour le personnage. Au début, Gance savait, d’un point de vue pragmatique, qu’il lui fallait un grand succès international pour asseoir sa crédibilité en tant que réalisateur pour ensuite passer aux œuvres qui lui tenaient à cœur, c’est-à-dire ses Évangiles de lumière, des films à mission universaliste consacrés, entre autres, aux grands prophètes. Au moment de tourner le Napoléon, Abel Gance est en pleine maturité. Il a 35 ans, il s’est bâti une crédibilité au niveau des producteurs. Il envisage le Napoléon pour conforter sa position de réalisateur. Au fur et à mesure, il découvre la grande complexité du personnage. Il prend conscience qu’à sa manière, Napoléon Bonaparte, en ayant transmis certaines fois les idéaux de la Révolution française, a contribué à changer la face du monde. Gance trouve en lui un écho aux “grands initiés” dont il rêve de parler dans ses Évangiles de lumière, parmi lesquels Jésus, Bouddha mais aussi Christophe Colomb – ce dernier n’ayant jamais pu prendre la mesure de l’ampleur de sa découverte.

C’est en cela qu’Abel Gance se prend d’inspiration artistique pour le personnage de Napoléon. Il ne se fait pas prendre par son sujet mais il plonge dans la complexité d’un personnage qui lui-même est plongé dans une histoire complexe. Gance disait : “Le personnage de Napoléon Bonaparte m’intéressait parce qu’il était un paroxysme dans un moment paroxystique de la grande histoire.” Cette double haute tension a trouvé écho dans le génie protéiforme et bouillonnant d’Abel Gance. Il se peut même que le personnage de Napoléon n’ait été qu’un prétexte pour que Gance nous transmette directement cette énergie intérieure en tant qu’artiste. Car Gance avait un monde en lui.”

Un foisonnement de trouvailles cinématographiques

“À sa sortie, le Napoléon d’Abel Gance avait au moins 25 ans d’avance sur le cinéma. En 2024, ce n’est pas un objet vétuste et obsolète. C’est un film qui, à presque 100 ans, est une mine pour le cinéma de demain. Il nous fait prendre conscience combien nous n’utilisons aujourd’hui qu’une faible partie du potentiel de l’art cinématographique. C’est une source d’énergie créatrice. C’est comme les ingénieurs informaticiens lorsqu’ils ont découvert internet : c’est parti dans tous les sens, puis on n’a suivi qu’une ou deux voies. De la même façon, le Napoléon est une boule d’énergie pure. Ensuite, il n’est pas question de copier Gance car vous branchez votre centrale nucléaire sur votre propre sens créatif ! Ça vous fait surtout sortir, par comparaison, de l’utilisation très standardisée et normalisée qui caractérise en partie le cinéma d’aujourd’hui.

Dans Napoléon, il y a des montages alternés, des montages très rapides pour exprimer la frénésie, comme dans la bataille de boules de neige qui ouvre le film. Au milieu de toutes ces audaces, il y a aussi des moments très lourds, longs, symboliques, comme le regard tueur d’un aigle en surimpression du visage de Napoléon ! Paradoxalement, ces moments permettent au spectateur de reprendre souffle pour une scène extraordinaire qui suivra.”

Le triptyque en polyvision, morceau de bravoure final

“Le triple écran, ou polyvision, c’est une invention de Gance. Cette séquence de vingt minutes reste unique dans l’histoire du cinéma mondial. Il ne s’est pas borné, comme avec le procédé du Cinérama vingt-cinq ans plus tard, à utiliser trois caméras pour avoir un large champ panoramique. Gance traite ensuite les trois écrans parfois comme trois espaces-temps différents, quitte à les traverser par une surimpression générale d’un paysage. La caméra filme alors plus qu’une simple réalité. Vous êtes carrément dans le but métaphysique que Gance voulait exprimer par son cinéma, et auquel il a donné toute sa vie. Une autre scène géniale, celle des ombres de la Révolution, nous connecte à l’invisible. Gance a abordé le cinéma pour abolir les barrières du temps et de l’espace, et nous plonge ainsi dans l’intangible.”

Une œuvre inachevée, un grand gâchis

“Abel Gance avait des œuvres précises en tête, dont ses fameux Évangiles de lumière. Seul le film qui a suivi Napoléon en 1931, La Fin du monde, peut nous en donner une maigre idée. Son échec, coïncidant avec l’arrivée du parlant et la crise de 1929, a provoqué la ruine des ambitions de Gance. Le film, qui devait être en partie en triple écran, fut mutilé à moins de 90 minutes, ce qui sonna le glas de la réputation du cinéaste. Il ne retrouvera jamais plus les moyens d’exprimer son œuvre dans sa dimension universelle. Pierre Mondy, qui a incarné Napoléon dans son film Austerlitz (1960), m’a dit lors d’une interview : “Je l’écoutais parler, et je suis sûr maintenant qu’il n’a dû réaliser peut-être que 5 à 10 % de ses rêves.”

On a dit de Gance que c’était un mégalomaniaque, obsédé d’être le premier avant tout. En fait, il se considère à tort ou à raison comme ayant la mission de délivrer au monde tout le potentiel de ce nouvel art. Jusqu’à la fin de sa vie, il ne désarmera jamais de cet idéal. Un mois avant de mourir, il travaillait encore à un court-métrage avec l’aide de son collaborateur Claude Lafaye : Ainsi parlait Zarathoustra. On peut avoir une pensée émue et empathique en pensant à toute cette énergie qu’Abel Gance a dû garder au fond de lui jusqu’à son dernier souffle. Sa plus grande souffrance, c’est en 1947 quand il se lance dans le projet de La Divine Tragédie. Ça devait être le pendant dans le parlant de ce qu’avait été le Napoléon dans le muet. Gance avait encore tout compris de l’ère nucléaire : pour la première fois de son histoire, l’humanité avait le pouvoir de s’autodétruire. Vers qui se tourner ? C’était le sujet de La Divine Tragédie. Il a perdu cinq ans de sa vie, et la production internationale s’écroula en un scandale financier.”

La restauration du Napoléon, du “cousu main”

“En 2008, mandaté pour une simple expertise, quand j’ouvre les premières boîtes de bobines, je sais déjà qu’en cas de restauration, les outils nécessaires n’existent pas. Ou, tout au moins, pas encore. Le Nicroscan (un appareil spécifique de numérisation créé par les laboratoires Éclair, ndlr) est en train d’être mis au point. Il ne sera opérationnel que trois ans plus tard. Certains outils numériques devront être créés par les techniciens eux-mêmes.

Autre aspect capital, la colorimétrie. Trois ingénieurs Recherche & Développement ont été affectés sur une période de trois ans pour restituer les teintages riches en nuances de gris des pellicules de cette époque. Ces outils numériques ont été spécifiques au cas Napoléon. Comme une dentelle de Delft, chacune des 600 000 images du film a été restaurée point par point.”

De gauche à droite au 1er plan : Clarisse Gance émue, Laure Marchaut, assistante de Georges Mourier, applaudissant à côté de ce dernier, et Costa-Gavras, président de la Cinémathèque. Au fond, Frédéric Bonnaud, directeur de la Cinémathèque. Moment de joie après la projection triomphale de la seconde partie du "Napoléon" d'Abel Gance en ciné-concert à la Seine Musicale, le 5 juillet 2024. (ANNIE YANBEKIAN / FRANCEINFO CULTURE)
De gauche à droite au 1er plan : Clarisse Gance émue, Laure Marchaut, assistante de Georges Mourier, applaudissant à côté de ce dernier, et Costa-Gavras, président de la Cinémathèque. Au fond, Frédéric Bonnaud, directeur de la Cinémathèque. Moment de joie après la projection triomphale de la seconde partie du “Napoléon” d’Abel Gance en ciné-concert à la Seine Musicale, le 5 juillet 2024. (ANNIE YANBEKIAN / FRANCEINFO CULTURE)

Bonus : l’ovni “Napoléon” et sa restauration en chiffres

Quelques chiffres du tournage :
L’armurerie et la cavalerie : 1500 fusils, 1200 baïonnettes, 500 sabres, 200 pistolets, 50 000 cartouches, 300 chevaux, 15 canons légers, 30 canons de campagne, 10 pièces de siège, 30 caissons portatifs, 5 voitures à vivre…
Les costumes : 2500 pour les civils, 4500 pour les militaires…
Le matériel de prise de vue : 18 caméras dont 6 André Debrie450 000 mètres de négatifs tournés, soit 450 km…

Sur le travail de restauration :
Plus de 22 versions recensées en 2007.
14 années de travail pour l’image.
Avec son assistante Laure Marchaut, Georges Mourier a expertisé plus de 1000 boîtes. Ils ont visionné plus de 300 km de pellicule, sachant que des copies étaient dispersées dans le monde entier… Le Napoléon est certainement le recordman des films en matière de restaurations.

Sur la musique :
Cette partie a été élaborée pendant deux ans par Simon Cloquet-Lafollye : 148 extraits compilés, issus de 104 œuvres écrites par 48 compositeurs différents. Ces œuvres s’étalent sur 200 ans d’histoire de la musique.

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