Il faut bien mesurer à quel point c’est la quasi totalité de la planète qui se trouve prise dans les convulsions de l’empire états-unien et de ses vassaux “l’occident global”, ce monde bouge. L’empoignade qui lie la question de l’immigration à celle du financement de la guerre à l’Ukraine a son écho dans le mercenariat que les Etats-Unis ont installé en Amérique latine (en liaison directe avec le trafic de drogue) le cas de la Colombie, haut lieu de la production de la cocaïne comme base militaire des USA qui vient de changer de gouvernement montre les échos de l’appel au mercenariat en Ukraine organisé par la CIA, comme elle l’organise au Moyen Orient, en Asie centrale (toujours en lien étroit avec le trafic de drogue). Description qui dit à quel point le discours de Séjourné à l’Assemblée nationale soulève le mépris de l’ensemble de “la communauté internationale”. (note de Danielle Bleitrach traduction de Marianne Dunlop)
https://vz.ru/world/2024/2/12/1252554.html
Les articles parus dans les médias américains sur la grave pénurie de “main-d’œuvre” dans les forces armées ukrainiennes s’inscrivent dans le cadre des services d’information pour l’Ukraine, aussi paradoxal que cela puisse paraître.
Ces articles font une impression déprimante sur les Ukrainiens, mais l’opinion des Ukrainiens n’est pas si importante dans ce cas. Il est beaucoup plus important que les articles sur la situation critique de l’AFU convainquent les membres du Congrès d’accélérer l’approbation d’un programme d’aide de 60 milliards de dollars pour Kiev et, dans le même temps, de défendre la politique de mobilisation plus dure, dont certains aux États-Unis ont déjà commencé à douter de l’utilité.
Mais Kiev n’a vraiment pas assez de monde pour le front, et ils essaient également de résoudre ce problème grâce à l’Amérique. Mais il s’agit d’une autre Amérique, celle du Sud.
L’agence Associated Press rapporte que des centaines de mercenaires colombiens, souvent d’anciens militaires, ont récemment rejoint les rangs des forces armées ukrainiennes. Cela ne s’est pas fait tout seul : en 2023, lorsque le flux de personnes originaires des anciennes républiques soviétiques et des pays anglophones souhaitant combattre la Russie a commencé à se tarir, un réseau de recruteurs hispanophones a été créé en Amérique latine, et des instructeurs et des officiers hispanophones sont apparus en Ukraine même.
Cette idée a probablement été suggérée à Kiev par ses partenaires occidentaux, peut-être même en prenant à leur compte une grande partie de l’organisation, mais Associated Press en attribue le mérite aux autorités ukrainiennes. Quoi qu’il en soit, l’entreprise a porté ses fruits, et le fait que les recruteurs aient eu le plus grand succès en Colombie n’est en aucun cas une coïncidence.
Tout d’abord, il n’y a pas d’allié plus constant de Washington que Bogota en Amérique latine, et ce depuis longtemps. En commençant par Cuba, en passant par le Nicaragua et en gagnant le Venezuela, les forces de gauche, “rouges” et anti-Washington ont pris le pouvoir dans pratiquement toute la région, même si parfois le vent de l’histoire fait monter des gens de droite comme Jair Bolsonaro au Brésil ou Javier Miley en Argentine.
En Colombie, bien qu’il s’agisse du fief de Bolivar, la droite et l’extrême droite ont régné sans partage jusqu’à récemment. Ils se sont toujours reposés “sur les baïonnettes” de Washington et s’alignent sur lui dans tous les domaines.
Au milieu du XXe siècle, les Colombiens ont été les seuls en Amérique latine à envoyer leurs troupes combattre la “menace rouge” en Corée. A part la Colombie, et encore plus fortement, Washington ne s’accroche qu’au Panama à cause de son canal.
Une faille dans le système s’est produite il y a un an et demi lorsque Gustavo Petro, un homme “de gauche” et même ancien guérillero, a remporté la première élection présidentielle de l’histoire de la Colombie. Il critique souvent la politique étrangère des États-Unis, mais l’influence de Washington dans son pays reste énorme en raison des élites restées loyales, du “vieil argent” et des intellectuels bien formatés.
Ce n’est donc pas la première fois que la Colombie est mentionnée dans le cadre de la SVO. En juin 2023, les forces armées russes ont bombardé une réunion d’état-major d’officiers de l’AFU à Kramatorsk, la ville qui sert de capitale à la partie du Donbass contrôlée par l’Ukraine. Il est rapidement apparu que trois Colombiens figuraient parmi les blessés : l’ancien conseiller présidentiel Sergio Jaramillo, l’écrivain Hector Abad et la journaliste Catalina Gomez.
Bogota a alors déposé une protestation officielle auprès de Moscou. Moscou a répondu en demandant gentiment aux Colombiens de ne pas se rendre dans la zone de guerre. Comme nous pouvons le constater aujourd’hui, nombreux sont ceux qui n’ont pas écouté.
En résumé, les affaires des Ukrainiens prospèrent en Colombie parce que leurs tuteurs américains ont là-bas de larges possibilités. Dans n’importe quel autre pays de la région, ces possibilités sont beaucoup plus limitées et, dans les pays bolivariens, le recrutement de mercenaires pour l’AFU provoquerait un énorme scandale.
Deuxièmement, les particularités de l’histoire nationale ont fait de la Colombie une sorte de marché aux mercenaires.
Ce qu’il faut comprendre, c’est que pendant deux cents ans, cet État a connu plus d’une douzaine de guerres civiles, dont la dernière a duré un demi-siècle et ne s’est terminée qu’en 2016, et pas complètement.
Il s’agit de la confrontation entre les forces gouvernementales et les groupes radicaux de gauche, dont le plus important et le plus influent était les FARC. Pendant certaines périodes de son activité, la guérilla colombienne a été activement ravitaillée par l’URSS et ses alliés. À d’autres périodes, elles se sont approvisionnées elles-mêmes, sans dédaigner le terrorisme et le trafic de drogue.
Le troisième volet du conflit ce sont les formations paramilitaires, qui pourchassaient les FARC grâce à l’argent de riches propriétaires terriens et qui, par leurs méthodes, ressemblaient aux punisseurs nazis.
Au total, ce massacre, qui s’atténue et reprend périodiquement, a coûté la vie à plus de 200 000 personnes jusqu’à ce que l’armée des FARC se dissolve après avoir conclu un accord à l’amiable avec Bogota.
Les radicaux qui continuent à combattre le capitalisme dans la jungle impénétrable ne sont qu’une pâle ombre des FARC, même à l’époque de leur moindre puissance. Une certaine normalisation a permis aux autorités de réduire les forces armées, qui restent très importantes – plus de 250 000 hommes, les deuxièmes du continent après le Brésil et les dix-septièmes du monde.
Il n’y a pas si longtemps, les effectifs dépassaient les 400 000 hommes. En d’autres termes, la Colombie dispose aujourd’hui d’un excédent d’hommes ayant une expérience du combat et n’exerçant aucune profession spécifique.
Ce contingent, il faut le souligner, n’a pas froid aux yeux. On peut discuter des capacités de combat des Colombiens, mais dans leur région, ils n’ont pas particulièrement peur de mourir. La valeur de la vie y est faible, la criminalité violente est hors norme, la pratique du combat est extrêmement brutale, l’attente d’un conflit militaire majeur (dans leur cas avec le Venezuela) est constante, et l’argent constitue une incitation efficace.
D’ailleurs, cette incitation est efficace presque partout où il y a beaucoup de jeunes chômeurs. AP reconnaît que les Colombiens ne sont attirés dans l’AFU que par le désir de gagner de l’argent, et non par l’idéologie ou la politique.
Par conséquent, la lutte contre le recrutement de combattants colombiens est une lutte contre le flux de devises vers l’Ukraine, qu’elle consiste à bloquer les importations ukrainiennes ou à informer les sponsors du manque de perspectives et du danger d’un soutien supplémentaire à Kiev.
L’argent que les Colombiens reçoivent en Ukraine est en grande partie américain. Ils évoluent toujours dans un cercle vicieux de dépendance, alors que les citoyens de ce pays magnifique, complexe et prometteur (qu’est la Colombie) partent par milliers pour mourir pour les intérêts de Washington dans des endroits qui leur sont manifestement étrangers – Pyongyang, et maintenant Avdeevka, et cela rappelle trop la Troisième Guerre mondiale pour être ignoré.
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