Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

Je ne sais qu’une chose : il faut impérativement recréer un collectif qui agit et pense en agissant… par Danielle Bleitrach

Lettre indignée à un ami qui prétend que les campagnes des réseaux sociaux “font pression”… Lettre indignée à nous tous qui devons bien faire quelque chose parce que nous ne pouvons pas continuer comme ça… Lettre indignée d’une vieille dame qui voudrait bien passer les quelques années qui lui restent à ne pas perdre ce temps dont chaque seconde lui parait un miracle, la vie… et qui ne comprend pas qu’on la gaspille…

Ethiopie, petit enfant debout devant un Lénine qu’on a couché

vous osez parler de pression, mais c’est du lynchage, le même que celui contre ce malheureux alcoolique qu’est Depardieu, la pression des hyènes qui expédient des photos immondes d’enfants enveloppés dans des linceuls, des gens qui bavent de haine et de temps en temps envoient des poèmes comme un parfum que l’on jetterait sur la décomposition des corps, leur puanteur, une pression sur qui et comment ? Une pression qui installe les individus dans une dépression, dans l’isolement, dans l’incapacité à agir… et qui ne sait plus que tourner autour de la mort.

Marianne n’a plus eu le courage de traduire les nouvelles du Front ukrainien, elle voyait ces corps de jeunes gens… Elle passait des heures à satisfaire ce que ni elle ni moi n’avions plus envie de savoir, alors que certains des lecteurs de ce blog semblait éprouver intérêt quasi sportif pour ce qui se passait. On se souvenait de visages ronds avec cet air enfantin type Gagarine si fréquents chez les Russes ou Ukrainiens c’est pareil, ceux que nous avions interviewé devant ce kiosque… Que leur arrive-t-il ? L’ absence de mesure de ce qu’il y a derrière ce à quoi on nous conduit, me parait aller avec l’impossibilité d’intervention citoyenne que l’on retrouve partout et qui se masque sous l’hystérisation des enjeux…

C’est comme ce projet de loi sur l’immigration, chacun sent bien que c’est le prolongement de la soumission au diktat des marchés financiers sur les retraites, ils ne savent plus comment faire accepter par la division, l’invention du bouc émissaire, on a beau savoir on est stupéfait, abasourdi : est-ce que ça marche réellement ? Sont-ils obligés d’aller râcler à la racine de ce que tant de nous sont pour continuer, et jusqu’à quand, jusqu’où ? Quelle course est engagée entre leur incapacité à gouverner et notre incapacité à nous rebeller?

C’est le niveau français désormais, en bout de course, en écho il y a ce que je laisse passer du courrier des lecteurs : il y a les antivaccins pas simplement qui s’en passent non ceux qui dieu sait pourquoi tentent de vous convaincre, ceux qui passent en braconnier des sites suspects et qui leur paraissent porter LA VÉRITÉ, les salauds que je ne publie même temps comme le cinglé qui répète d’une manière spasmodique “la bouse otan mossad” et m’insulte… Une bouche d’égout qui reflue…

Il arrive un moment où ce dont on débat se rapproche dangereusement de ce qui suscite l’intérêt pulsionnel, le prurit médiatique : de l’affaire Depardieu, à cette saloperie de discussion sur le projet de loi sur les immigrés, sur la vie politique en général… Un niveau de latrines, les babines dans le sang et le groin plongé dans la peur et la haine que l’on renifle sans jamais songer à une issue, aux forces qui pourraient agir et que l’on écœure ad nauseam … par le niveau auquel peu à peu on aspire et en plus vous croyez agir, être des communistes, alors que vous n’êtes plus que le produit de cette destruction en profondeur de la France.

Retour à la politique…

Être communiste c’est faire de la politique, c’est négocier, à partir des intérêts de classe dont l’expression est déjà le résultat intelligent d’un débat collectif. C’est estimer le rapport des forces, rechercher la paix, même si il faut savoir être impitoyable, sans état d’âme parce que c’est ce qui sera le moins pire… Mais garder toujours l’idée qu’un jour on pourra enfin faire ensemble avec ceux qui sont aussi contraints que moi… Être communiste, ce n’est pas se complaire dans cette charpie, cette pornographie permanente sur ce qui excite les humeurs, pour rien pour se prendre pour quelqu’un de bien alors qu’on sait au fond de soi que l’on est lâche, paresseux.. Cela n’avait rien à voir avec ces discussions de bistrot entre gens qui s’en foutent réellement et ne seront pas prêts à lever le petit doigt. Pour cela il n’y a pas de secret, il faut reconstruire le collectif. Et c’est là devant l’ampleur de la tâche, la difficulté de la moindre avancée que certains se conduisent comme des saboteurs…

Quel que soit le sujet ils continueront à expliquer pourquoi ils méprisent ceux avec qui ils devraient agir..

Pourtant il n’y a pas d’autre issue que tenter de surmonter cette “anomie” cette incapacité à agir ensemble, d’ailleurs il y a des exemples nombreux de ce qui va en ce sens, dérisoires par rapport à ce qu’il faudrait mais d’autant plus remarquables que ceux qui choisissent de s’engager se retrouvent dans un désert ou tout ou presque tout est à reconstruire… Le bon côté est que l’on est enfin considéré par soi et les autres comme responsable mais sans toujours mode d’emploi… il suffirait déjà que chacun s’interroge sur le sens de ses actes, de ses propos, se dise ” l’opinion que j’exprime quelle chance a-t-elle de déboucher sur quelque chose d’utile, qui changerait si peu que ce soit, ce qui m’étouffe ?” C’est si souvent le contraire, l’opinion est faite pour dissoudre un peu plus… je tente ici même d’aller a contrario de mon indignation.

Il y a des siècles, en 1956, j’ai cru un jour qu’adhérer au PCF ce serait ne pas être une victime et depuis la petite enfance je disais “si je vais en camp de concentration ce ne sera pas comme un agneau à l’abattoir mais parce que j’aurais fait sauter les trains qui mènent leurs régiments de malades (j’étais complètement fascinée par la bataille du rail) … je serai comme l’armée rouge et ils reculeront ces salauds … ” et je me retrouve avec les enfants de ceux que l’on a trainés à Auschwitz que l’on convainc d’en faire autant, par la peur, par la haine, cette folie se nomme Israël et d’autres en profitent ils semblent dire “vous voyez que l’on a eu raison de massacrer les Juifs, regardez ce dont ils sont capables.” Ils ne voient pas tous ceux qui protestent, non ils font un paquet cadeau et pour que l’on comprenne bien le fond de leur démonstration ils assènent des coups de marteau, ils enfoncent : Holocauste, Gaza, nazis, israéliens, il me reconduisent là où je suis sensée être depuis l’enfance et ces salauds n’ont pas le moindre doute… En face de mes peurs enfantines il n’y a plus de communistes, il y a des minables qui lynchent et s’excitent leur gros cul devant l’ordinateur pour ne pas agir, pour se faire plaisir, des porcs qui expédient des photos d’enfants tremblant comme je l’ai été sous les bombes.. Ces gens là n’éprouvent rien ils se font plaisir ils se branlent en jouissant devant ces images et ils croient faire pression, quelle pression, celle de Goebbels ? Pas la moindre proposition, non il semble que leur jouissance tienne lieu de perspective et cela moi aussi me fait souvenir des nazis, de leur solution finale… Pire encore quand il se trouve des forces de proposition, le Brésil, la Chine, une tentative de rassembler, d’affaiblir tous ceux qui concourent à la solution finale pour tous, quand on se rapproche de propositions, ils éructent ils veulent du sang, et ils pensent sauver qui ?

Il est clair que là ce sujet touche pour quelqu’un comme moi un paroxysme, et que tous les problèmes du moment n’ont pas la même intensité, mais cette incapacité à créer des solutions, à favoriser l’intervention collective, elle est générale. Comme l’est l’incapacité à lire, à s’approprier une question…

Nous avons essayé ici un autre langage, parfois j’ai cru que nous y arrivions mais il y a les ordures dont j’ai parlé, je ne passe pas leurs commentaires, ou pas tout, il éructent et se prennent pour des communistes mais chez ces gens-là ça fait longtemps que la barrière collective a sauté, il ne reste plus que la tragédie de l’individu seul sans respect de lui-même et des autres, aussi malheureux, aussi obscène que cette paillasse Depardieu sur laquelle la vertu s’acharne et qui n’a probablement pas dessoulé depuis des années ce “monstre sacré”… qui sait si bien parler ce français si beau, si raffiné, ces rites qui faisaient de mon pays le lieu où chacun rêve de vivre.. cette terre d’équilibre avec le bon sens de Diderot… ce que Thorez, Aragon ont attribué au peuple alors que personne ne réfléchit à sa responsabilité dans la destruction … comme le veulent les impérialistes..

il y a des gens qui croient que le chemin du collectif ne passe plus que par la complicité dans le ragot, la stigmatisation des autres, ils vous poursuivent en vous expliquant tout ce qu’ils ont vu de minable, d’insuffisant, ils me donnent la nausée, j’ai pitié d’eux, et je n’ose pas leur dire ce que révèle cette manière de ne voir que le pire… Parce que cette manière d’être uniquement négatif ne dépend pas d’eux seulement, hélas cela gouverne toutes les formes de sociabilité que notre mode de production invente pour suppléer à cet formidable solitude à laquelle ils nous enchaîne… Il y a un individu qui un jour a dit de moi et de mon enfant mort, la pire des choses, c’était un meurtre auquel il se croyait autorisé à partir de notre désaccord. C’était devenu ça la politique pour lui, récemment il m’a écrit pour “vider l’abcès”… j’ai essayé de lui faire comprendre qu’un tel niveau ne pouvait exister que quand justement il n’y avait plus de politique. Comme je le savais attaché à l’engagement communiste, j’essayais encore de lui faire comprendre ce qui distinguait les communistes des fascistes (ne pas avoir le goût du meurtre entre autres) mais il ne comprenait pas et il cherchait une complicité fictive dans le fait que nous étions des intellectuels et que le niveau actuel du PCF était très bas… c’est vrai mais il y a pire, il y a la perte du désir d’apprendre puisqu’on perd le désir de vivre et qu’on est plus que façade, mauvaise conscience, volonté d’avoir raison sans but humain. Ce n’est pas “moral”, c’est cette perte, cette aliénation, que la puissance de destruction d’un capitalisme à son stade ultime inscrit en nous… les ruines qui s’accumulent sur les champs de bataille sont à l’image de ce qui est fait des individus…

Pourtant, la vieille dame que je suis a une toute autre expérience, j’ai beaucoup de chance, ce que je décris là est aux antipodes de ce que je vis, de ce que j’ai vécu, l’essentiel est tous ces gens en la bienveillance de qui j’ai confiance, nous sommes parfois une bande de bras cassés mais nous nous retrouvons en train de faire, de construire… Mais cela me rend encore plus enragée puisque c’est possible, il faut que cela soit…

ce blog doit fonctionner sur ces bases là, et j’y tiens absolument.

Et je ne veux pas de celui qui croit défendre une cause et la rend dérisoire, sans issue… réveillez vous Marianne et moi publierons des textes qui parleront comme nous l’entendons et je vous prie de vous conformer à cela ou d’aller ailleurs, là ou on se goberge de ce genre de choses qui séduit fait le buzz..

Danielle Bleitrach


P.S non le Hamas n’est pas un mouvement de libération, autre chose est le fait qu’un peuple que l’on pousse à bout peut s’y reconnaitre et qu’il y ait des jeunes gens révoltés qui ne voient pas d’autre issue… que je n’ai pas plus envie de le critiquer que ce que je ne critique les mollahs iraniens… mais notre ligne politique en tant que communiste n’est pas celle-là… et pas seulement parce que ce sont “des bourgeois” (ridicule) mais parce qu’il faut impérativement construire une alternative qui soit autre chose que la guerre perpétuelle.

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