Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

Il ne manque pas de femmes qui peuvent être légitimement re-découvertes et promues…

Je voudrais vous dire mon inquiétude, tandis que certains instrumentalisent la question féministe, en la manipulant contre les luttes contre l’exploitation, que d’autres vont dans cette logique jusqu’à la caricature du pouvoir arbitraire sans foi ni loi, il grandit une réaction conservatrice d’extrême-droite, qui bientôt refusera aux femmes leurs droits. Toutes les conquêtes égalitaires qui sont loin d’être achevées seront mises en pièce. Il faut bien mesurer à quel point ce danger monte et pas seulement aux Etats-Unis ou en Pologne, pour citer les cas les plus évidents, dans ce qui se prétend le “monde libtre” par opposition à des pays comme l’Afghanistan. On oublie que dans ces pays “rétrogrades”, ceux qui ont installé contre les communistes des brutes réactionnaires, ont redoublé le drame par l’invasion… les conditions d’une formidable régression des moeurs. La seule solution est de comprendre comment les luttes pour l’émancipation féminine, pour le droit d’aimer dans le respect et la dignité, contre le racisme et l’antisémitisme doivent impérativement faire partie des luttes contre l’exploitation, le pillage des ressources des pauvres et ne pas être instrumentalisées contre celles-ci par un impérialisme qui se retournera contre l’émancipation individuelle quand celle-ci aura été isolée de la question sociale et de la défense de la souveraineté nationale.

A ce titre, j’ai dénoncé la promotion de féministes réactionnaires comme Olympe de Gouges, la manière dont on isole la lutte des femmes afghanes, iraniennes de la lutte contre l’invasion étrangère, et la négation du rôle joué par les femmes de la classe ouvrière, des pays du tiers monde. Voici le portrait d’une scientifique, ces intellectuelles et artistes, dont des portraits tronqués tentent simplement d’en faire les victimes des “hommes”, alors que ces femmes là des créatrices, des scientifiques comme ici n’ont jamais séparé la conquête de leur droit à exercer une vocation du progrès pour toute l’humanité. Il est nécessaire tant sur le plan théorique (où il existe une masse de travaux y compris marxistes) que sur celui des personnalités de retrouver un féminisme de progrès, pour les femmes et pour l’ensemble de l’humanité.

Un texte a circulé sur Lise Meitner, mais il a continué à opposer essentiellement les hommes et les femmes, il ne montre jamais le contexte réel, celui des institutions scientifiques et de leurs liens y compris avec les crimes nazis.

Quelle étrange conception amputée de l’humanité qui fait qu’il soit nécessaire d’insister sur l’appartenance de sa moitié à la totalité… C’est cette folie contre laquelle il faut s’insurger… Pas parquer la moitié de l’humanité dans un nouveau ghetto, y compris en en faisant exclusivement des personnes du “sexe”, mais en mesurant la richesse de cette humanité dans son infinie diversité… Si vous lisez l’histoire de Lise Meitner, vous comprendrez l’imbécile sélection qui a privé l’humanité de l’immense majorité de ses capacités, de sa richesse, pas seulement les femmes, mais celles comme leurs frères et époux que l’on écarté du savoir, de vocations, dont on a méprisé l’apport parce qu’ils étaient paysans pauvres, ouvriers. Lise Meitner a une une vie qu’elle a du arracher à ces brutes conservatrices non seulement en tant que femme, mais en tant que juive face au nazisme, à ceux qui ont collaboré. Mais ce qui fait sa force c’est que confrontée au projet Manhattan, à la bombe atomique, qu’on lui dit pouvoir vaincre le nazisme, elle refuse d’y participer. Elle est un génie de la physique, une femme, une juive, mais elle est d’abord un être humain redevable à d’autres.

Lise Meitner est née le 7 novembre 1878 à Vienne, à cette époque capitale de l’empire austro-hongrois.Elle a grandi au sein d’une famille juive avec un niveau culturel élevé et une relative tranquillité économique.Dès son plus jeune âge, elle a montré une attirance naturelle pour la science et aimait surtout les mathématiques, un talent perçu et encouragé par ses parents Philipp Meitner, avocat et professeur d’échecs, et Hedwig Skovran, une très bonne musicienne amateur, qui ont engagé des professeurs privés pour l’aider à continuer à apprendre au marge de contenu scolaire. Nous avons là, les conditions privilégiées de l’éclosion d’une vocation que l’on considérait comme étrangère à la gente féminine y compris dans la bourgeoisie conservatrice, mais qui dans une bourgeoisie juive, un peu voltairienne comme l’étaient les parents de karl Marx, pouvait échapper à ce conformisme. Quant aux femmes de la classe ouvrière, elles n’avaient quelles que soient les capacités qu’elles auraient pu manifester aucune latitude pour les exprimer. Ce fut là le grand changement initié par le mouvement ouvrier, anarchiste avec Louise Michel, mais surtout socialiste puis bolchevique , un socialisme initié par les partis communistes.

Il est à noter que dans ses choix fondamentaux, Lise Meitner ne rompt jamais avec ce courant. Son histoire se confond avec les transformations des institutions sous la pression des luttes mais aussi avec une solitude autodidacte qui dit sa tenacité.

Après que Lise ait terminé ses études de base obligatoires, à 14 ans, elle n’a pas pu accéder à l’institut pour préparer son entrée à l’université parce que les femmes ne pouvaient légalement accéder à des études supérieures.Cependant, elle a continué à se former toute seule, avec les livres et les matériaux qu’elle pouvait obtenir et se perfectionner comme pianiste.

Lorsque les femmes ont finalement été admises en 1897, et bien que Lise n’ait pas eu la possibilité d’une préparation formelle, elle se présente en 1901, et à 23 ans, elle devenait la première femme à être admise en physique à l’université de Vienne.

Cependant, les hommes dominaient le domaine de la science. Le chimiste Otto Hahn lui a proposé de collaborer avec lui, mais le laboratoire ne pouvait pas accepter les Femmes et Lise a dû travailler avec Hahn qui n’a pas connu un sort meilleur puisqu’il osait travailler avec une femme dans un sous-sol qui était autrefois l’atelier d’un charpentier. Son travail n’était pas rémunéré car elle était une femme, elle ne recevait aucun argent et son travail au Kaiser Wilhelm Institut était gratuit.

qu’est-ce que le Kaiser Wilhelm Institut:

La Société Kaiser-Wilhelm ou, de façon plus précise la « Société Kaiser-Wilhelm pour le Progrès des sciences » (Kaiser-Wilhelm-Gesellschaft zur Förderung der Wissenschaften e. V.) a été la principale institution scientifique de l’Allemagne impériale. En tant que société savante, elle servit d’incubateur aux différents instituts et laboratoires de recherche placés sous son égide. Étant donné le nombre d’instituts qui lui étaient rattachés, elle fut aussi appelée Institut Kaiser-Wilhem. La Société Kaiser-Wilhelm a été fondée en 1911, avec comme président l’historien du christianisme Adolf von Harnack et comme directeur Fritz Haber, qui dirigeait en même temps le Kaiser-Wilhelm-Institut für physikalische und Elektrochemie. Cette institution savante était destinée à se consacrer exclusivement à la recherche fondamentale. Très peu subventionnés par l’empereur , les instituts de recherche devaient en règle générale se financer par des collaborations avec les entreprises ; leurs mécènes furent essentiellement « la haute bourgeoisie technique et industrielle et le capital banquier juif ». Les riches juifs espéraient par ailleurs que leurs donations à la KWG leur permettent d’obtenir une image plus positive, dans l’atmosphère antisémite de l’époque. L’État prenait en charge la paye des chercheurs et des employés. les chercheurs sont dispensés d’enseigner, ils se consacrent à la recherche. Comme on l’a vu Lise Meitner devait travailler gratuitement et probablement grâce au financement de sa famille, qui comme d’autres bourgeois juifs y voyaient une manière pour leur communauté et pour leurs enfants d’être admis à la recherche, dans un cadre aussi novateur qui va consacrer la recherche allemande et après l’exode juif contribuer aux avancées des Etats-Unis, et après la guerre, les chercheurs nazis seront également récupérés.

Entre 1880 et 1910 de nombreux professeurs (environ 80) sont nommés à l’université de Berlin, qui était jusqu’alors une université de second plan en Allemagne, par rapport à l’Université de Heidelberg ou de Leipzig par exemple. L’effet est immédiat entre 1910 et 1930, Max Planck (1918), Albert Einstein (1921), et six autres Prix Nobel sortent du monde académique allemand réformé par la KWG.

La situation de Lise a changé en 1913 quand Max Planck lui-même, son ancien professeur, l’a engagée comme assistante dans son laboratoire.

Dans la période fructueuse de l’IGM, elle a aussi travaillé comme technicienne de rayons X à l’hôpital Lichterfelde à Berlin.En 1926, Lise obtient une place comme professeur titulaire de physique nucléaire expérimentale à l’université de Berlin, elle est la première femme à l’obtenir.

Avec l’arrivée au pouvoir d’Hitler, une grande majorité de scientifiques juifs se sont échappés d’Allemagne, mais Lise a décidé de continuer son travail à Berlin, mais elle a perdu sa chaire.La situation politique s’est aggravée. Elle a été privée de sa nationalité et en tentant de quitter le pays, le gouvernement nazi lui a retiré son passeport et elle a dû s’échapper. Elle a finalement réussi à arriver à Stockholm en 1938, où il a trouvé l’asile et adopté la nationalité suédoise, y a repris ses recherches dans un nouveau laboratoire, à condition de ne pas publier sous son nom les résultats de ses expériences, parce que même là, elle est menacée par les nazis. Ainsi un article crucial sur la division de l’atome, publié le 6 janvier 1939 sur Naturwissenschaften, ne portait que la signature de Hann, de peur d’être découverte.

Pendant ce temps, la recherche allemande y compris la société Kaiser-Wihlem collabore avec les nazis

Les procès de Nuremberg ont mis en évidence une vaste collaboration de sages-femmes, de gynécologues et de médecins allemands (psychiatres), ce dès les années 1930 et bien au-delà des seuls médecins nazis (qui seront retrouvés à des postes-clé dans les camps de concentration) , aux programmes eugénistes d’euthanasie des nouveau-nés déficients et des malades mentaux réunis sous l’égide de l’Aktion T4. Ces programmes ont été finalement arrêtés à la suite des protestations des Églises catholique et protestantes, mais reportés plus secrètement sur les roms, les homosexuels et les juifs (Shoah) qui ont par milliers été aussi utilisés comme cobayes humains. La Société Kaiser-Wilhelm a exploité les tissus biologiques extraits de milliers de cadavres.

Ainsi il fut démontré que dans les années 1980 Götz Aly montre que des lames de tissus cérébraux recueillis par Julius Hallervorden (qui fut directeur du département de neuropathologie de l’Institut Kaiser-Wilhelm pour la recherche cérébrale durant la Seconde Guerre mondiale) proviennent des cerveaux extraits de 38 enfants assassinés un jour d’octobre 1940 dans le cadre du programme d’euthanasie alors en vigueur.
En réponse à cette divulgation l’Institut de recherche sur le cerveau du Max-Planck-Institut – par respect pour les victimes – a décidé de détruire toutes les tranches de cerveaux qu’il conservait encore (100 000 lames environ, datées de l’époque nazie ; de 1933 à 1945) ; D’autres centres majeurs spécialisés en neuropathologie et l’Institut Max Planck de psychiatrie de Munich ont fait de même (Beaucoup de ces échantillons ont été enterrés en 1990 lors d’une cérémonie tenue au cimetière Waldfriedhof de Munich).

Entre 1980 et les années 2000, les historiens ont exhumé de nouvelles preuves de collaboration étroite entre des chercheurs du domaine médical de la Société Kaiser-Wilhelm et les nazis, y compris dans divers programmes où des humains étaient utilisés comme cobayes lors d’expériences qu’on savait mortelles, mais le Max-Planck-Institut n’avait jamais vraiment étudié, passé en revue cette partie de son histoire.

En 2001, le Max-Planck-Institut a officiellement présenté ses excuses concernant les victimes d’expériences nazies.

En 2017, le Max-Planck-Institut après avoir constaté qu’il restait encore de nombreuses lacunes de connaissances sur le sujet a officiellement annoncé vouloir travailler la responsabilité morale des recherches contraires à l’éthique faites par son prédécesseur (la Kaiser Wilhelm Society, KWG) durant la période de la montée et de l’épanouissement du nazisme, où l’institut a au moins indirectement collaboré à de grands programmes d’euthanasie, d’abord des malades mentaux, puis des personnes enfermées dans les camps de concentration, programme ayant fourni de nombreux organes ensuite envoyés pour étude à des médecins allemands. Sur la base des archives disponibles le Max-Planck-Institut veut maintenant « savoir qui sont les victimes, découvrir leurs biographies et leurs destinées et, en tant que telles, leur donner une partie de leur dignité humaine et trouver un moyen de mémoire », a expliqué Heinz Wässle, directeur émérite du département de neuroanatomie à L’Institut Max Planck pour la recherche du cerveau à Francfort, et directeur du comité d’historiens qui supervisera la nouvelle enquête qui va tenter de préciser pourquoi, comment et en s’appuyant sur quels réseaux, autant de médecins et de chercheurs ont si facilement coopéré avec les programmes d’assassinat de masse des nazis (Euthanasie d’enfants et de malades mentaux, puis Shoah). Les historiens tenteront aussi d’identifier les victimes dont le cerveau a été utilisé pour la recherche (parfois longtemps après la fin de la guerre) et de suivre ce qui est arrivé aux lames de tissus et d’autres spécimens. Les historiens souhaitent comprendre comment des recherches non éthiques exploitant des programmes criminels et génocidaires ont été autorisées à s’épanouir dans l’Allemagne nazie, en impliquant des scientifiques normaux, voire des chercheurs de renommée internationale « qui n’étaient pas des psychopathes bizarres et pervers » et qui après la guerre se sont a priori facilement réintégrés dans la société allemande. Une hypothèse est qu’ils ont fait passer leurs intérêts de recherche avant les principes éthiques. Les historiens travailleront en particulier sur le cas Hallervorden, médecin-chercheur en neurologie connu qui a accepté des centaines de cerveaux de victimes de l’euthanasie (il s’est constitué une collection de 697 cerveaux), mais qui malgré le procès des médecins nazis à Nuremberg, n’a jamais été poursuivi, conservant au contraire son poste au sein du Max-Planck-Institut après la guerre poursuivant ses études du « merveilleux matériel » provenant des centres de meurtre et laissant son nom à plusieurs syndromes10 (récemment renommés).
De 2017 à 2020 des historiens tenteront de remettre en cohérence les archives de la Société Kaiser-Wilhelm disséminées au moins dans une douzaine d’institutions allemandes. En corrélant les échantillons humains restants à des dossiers cliniques archivés d’hôpitaux et asiles ou à des archives d’universités et aux archives scientifiques de la Société Kaiser-Wilhelm, Weindling et ses collègues pensent pouvoir identifier jusqu’à 5000 nouvelles victimes. Les recherches non éthiques encouragées par les Nazis sont connues, « mais ce qui n’a jamais été fait, c’est une reconstitution à grande échelle de la mesure dans laquelle cela s’est produit ».

En 1948, de nombreux instituts de l’ex-KWG furent rattachés à la Société Max-Planck.

Lise qui restait attachée à son pays natal l’Allemagne, est restée atrocement marquée par non pas seulement la manière dont on l’avait niée en tant que femme comme scientifique mais aussi parce que le nazisme faisait de la science.

En 1942, elle a rejeté l’offre de rejoindre le projet Manhattan, le groupe de scientifiques créé pour fabriquer la bombe atomique. Elle a expliqué : “Tout en étant consciente de la guerre et du danger que le nazisme représentait pour le monde libre et la survie du peuple juif, je ne voulais pas participer à la création d’une arme de destruction massive.”

Ce refus de rompre avec sa conscience pèse autant sur sa promotion que le fait d’être une femme et elle rejoint dans le combat contre l’utilisation militaire de l’énergie atomique Eistein.

Bien qu’elle soit responsable de la découverte de la fission nucléaire, une étape importante de la science moderne, seul son partenaire Hahn a reçu le prix Nobel en 1944 pour les découvertes qu’ils ont faites ensemble.

Une grande partie de la communauté scientifique, avec Niels Bohr à la tête, protestaient contre l’injustice de cette omission.

Bien que Hahn ait minimisé la collaboration (cruciale) de Lise, il a remis à Lise une partie de l’argent de son prix Nobel dont elle a fait don au Comité d’urgence des scientifiques atomiques d’Albert Einstein, qui promouvait l’utilisation pacifique de l’énergie nucléaire.

À la fin de la guerre, son travail a été oublié.

Elle a donné des conférences et a continué à travailler à Stockholm jusqu’à sa retraite en 1953. Ne pas oublier que c’est de cette ville qu’est lancé le fameux appel de Stockolm.

Finalement, sa contribution à la science a été reconnue parmi. d’autres pour les médailles Max Planck, Wilhelm Exner et Dorothea Schlözer de Göttingen.

C’est la seule femme à avoir un élément dans le tableau périodique en son honneur, le Meitnerio.

Morte en 1968.

D’elle Einstein a dit : “C’est la Maria Curie allemande.”Sur sa pierre tombale, on lit :« Lise Meitner : une physicienne qui n’a jamais perdu son humanité ».

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