Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

Grece (2) De l’épisode nazi comme un catalyseur d’une nouvelle conception de la démocratie…

La Grèce fait partie des Balkans mais aussi du continent asiatique, une porte ouverte en Asie mineure, à ce titre, elle a subi les aléas des recompositions terrtoriales, des seismes historiques qui depuis la plus haute antiquité voient s’effondrer les palais, les empires, des solutions de stratèges en chambre qui prétendent résoudre les conflits par des transferts de populations et ce n’est pas fini, le monde s’ébranle à nouveau et la méditerranée est devenu un tombeau. Les jeux de l’OTAN, les bases militaires, le transfert d’armes vers l”Ukraine, font revivre aux grecs, à ses poètes, ses marins, ses paysans, une histoire qu’ils n’ont jamais oubliée, interprétée au grè des passions politiques. Cette semaine, dans le nord du Kosovo, les élections municipales imposées par le gouvernement kosovar ont été totalement boycottées, 3,5 % d’électeurs dans la partie serbe, peut’on dans ce cas reconnaitre les élus albanophones ? Les Etats-Unis ne craignent pas de valider de telles élections alors que l’empire proclame sa suzerainté par marionnette “ukrainienne” interposée sur la Crimée… Un événement parmi d’autres comme ces manifestations des Bulgares en faveur des Russes contre l’intervention de l’OTAN. Ce qui se rejoue aujourd’hui en Europe, dans les ex-pays socialistes, dans les Balkans rapelle les problèmes qui ont surgi à chaque dislocation d’empire,les invasion, les exodes, la famine, une armée rebelle de gueux, des “bandits”, devenus des Kapetanios. Face à toutes les souffrances populaires on assiste à la difficulté que les classes dominante ont à rompre leur vassalisation, le confort de leur soumission, les parlotes, les promesses trahies. Si je ne craignais pas de vous ennuyer, je pourrais remonter jusqu’à Platon, Aristote, Xenophon, Isiocrate et à leurs écrits sur la crise de la cité grecque: qu’est-ce que la démocratie quand il faut faire taire le peuple? A quel maître se donner pour que les classes possédantes pressées par le peuple mécontent ne soient pas déboulonnées ? Tandis que se disloque, se désagrège l’ordre ancien, paraissent renaître des identités trafiquées, des nationalismes suspects…

Dans ces épisodes là, dominent les divisions les luttes de factions, on s’y croirait aussi en France en avril 2023, là où un peuple rebelle n’a pas d’issue politique, où les querelles entre individus, les ambitions médiocres de chacun, créent un théâtre d’ombre, des spécialistes des plateaux de télévision qui se substituent à l’intervention citoyenne et la question des coalitions de sommet prend le pas sur la capacité d’intervention réelle du peuple interdit. Comme me l’a dit Peter, mon contemporain de retour de son exil canadien : “non contents de nous avoir volé la démocratie, ils nous oppriment au nom de la caricature qu’ils en ont fait. ” Qui l’impérialisme américain allié de l’Allemagne comme jadis l’angleterre préféra les collaborateurs nazis aux communistes. C’est le reflux. La démocratie parait alors limitée à un clientélisme, retrouver la démocratie, l’ancrer dans le peuple a été la tâche des communistes quand Hitler déferla sur l’Europe, convaincre aujourd’hui comme hier que l’on saura faire face, organiser, nourrir, se sacrifier comme aucun parti bourgeois ne peut le faire est l’enjeu réel trop souvent ignoré, le but et les moyens qui s’égarent dans des jeux médiatiques, une agora désertée par le peuple. L’avantage des communistes grecs c’est qu’ils n’ont jamais adhéré à l’idéologie autodestructrice de l’eurocommunisme, mais peu à peu malgré tous leurs efforts l’entreprise de marginalisation les a réduit :” ils n’ont aucune chance d’aller au pouvoir, ils ne le veulent même pas puisqu’ils ‘acceptent de participer à aucune coalition. On va voter comme l’ont fait nos parents mais pourquoi ? ” Ce discours conditionne le résultat des prochaines législatives en mai 2021.

Le parti communiste français a soutenu et soutient encore ceux qui ont divisé, affaibli le parti grec pour mieux soumettre la gauche aux diktats de l’Europe, à l’OTAN, aux monopoles financiarisés, Syriza et leur leaders Tsipras et Varoufakis. Ceux qui ont prétendu avoir un visage plus conforme moins “sectaires”, plus européen, comme le parti communiste français et d’autres. A son dernier congrès c’est avec eux et tous ceux qui étaient compatibles avec les visées de l’OTAN qu’ont été ouverts les travaux des congressistes du PCF. Cela m’a suffit pour me sentir étrangère à ces discussions. Pas hostile, distante.

illustration : ma bougie d’anniversaire avec Vassili et son épouse… Ils m’ont beaucoup appris sur le parti communiste de Grèce et j’ai eu même parfois l’impression qu’au nom de notre engagement pour Cuba, là où existe l’humanité me dit Vassili, il a entendu certains de mes propos. Même s’il me prévenait “là tu t’engages sur un chemin dangereux“.

Le raz de marée de l’occupation nazie

La lutte contre l’occupation nazie a donné lieu à une rupture politique . Ce bref épisode historique a joué et joue encore un rôle déterminant : “Véritable raz de marée, l’occupation balaya les vieilles structures et modifia l’ensemble du paysage politique. Hitler imposa à l’Europe un régime qu’elle avait elle-même imposé à d’autres continents mais dont elle ne s’attendait pas à connaître la butalité sur son propre sol. Des systèmes de pensée et des systèmes politiques bien enracinés se sont désintégrés sous le choc. De cette manière, le pouvoir nazi est devenu le catalyseur d’une série de réactions politiques et sociales dont nul ne pouvait prévoir l’issue. En Grèce, les conséquences ont été beaucoup plus tragiques qu’ailleurs: le pays est passé quasiment sans transition de l’occupation étrangère à une guerre civile qui l’a dévasté jusqu’à la fin des années 1940. ” (1)

Est-ce que ce qui se joue en Ukraine mais aussi l’inflation, le démantélement des conquis sociaux, ceux de cette libération du nazisme dont on a oublié les conditions n’est pas un écho encore assourdi de ce qui se passait quand la grèce attendait l’invasion. On revoit cette scène, le premier soldat allemand arrive seul en moto, les Grecs sur leurs balcons échangent des moqueries et puis c’est le déferlement les fenêtres se ferment, chacun se terre.

Quand la Wehrmacht envahit la Grèce en 1941, elle vient à la rescousse de l’Italie fasciste. L’armée allemande a connu partout des victoires qui lui ont conféré une réputation d’invincibilité mais en Grèce l’affaire a très tôt viré à la catastrophe plus que partout ailleurs, le pillage allemand joint à l’incurie administrative du gouvernement grec a en peu de temps créé les conditions de la pénurie. L’armée allemande a tout emporté, mais pas seulement l”armée, les grands groupes industriels comme Krupps ont pris en main l’administration du pays. Ce qui s’est traduit par une montée du chômage avec la chute brutale de la production industrielle, les matières premières étant détournées , stock, matériel tout était envoyé hors du pays mais c’est sur les réserves de nourriture que les répercussions furent les plus graves. La pénurie et l’inflation allaient de pair. Le transport n’était pas mieux et le pays se désagregeait en entités locales. Quelques semaines après l’arrivée des Allemand, la famine s’étendait sur Athènes et elle ne touchait pas de la même manière les ouvriers et les beaux quartiers. Il n’y avait pas de chiffres officiels mais on estime que plus de la moitié de la classe ouvrière était sans emploi, cherchant en vain de quoi se nourrir. Les habitants des villes cueillaient des herbes, des racines dans la campagne proche. Des officiers allemands s’amusaient beaucoup à jeter à des enfants faméliques les restes de leurs repas en les regardant se battre entre eux.

Toute l’Europe subissant l’occupation nazie avait faim mais en Gtèce les limites furent dépassées. L’été fut torride et l’hiver glacial, la neige recouvrait les rues, pas de quoi se chauffer, on mourrait de grippe, de tuberculose, des tumeurs gagnaient les membres puis le visage et les mains par carence de vitamine. Au début de 1942, dans les faubourgs ouvriers, la moitié des habitants étaient couverts de ces pustules. Les individus se traînaient, au stade final, ils n’avaient plus la force de bouger et ils s’effondraient, mourraient., ils étaient jetés dans la fosse commune. D’octobre 41 à octobre 42 il y a eu dans le PIrée quatre fois plus de morts qu’à l’ordinaire, en décembre huit fois plus, la BBC parlait en avril 1942 de 500.000 morts. Durant cette période le nombre des décès est supérieur à celui des naissances. Les adultes réservaient toute la nourriture pour les enfants et les hommes épuisés mourraient en plus grand nombre, se multipliaient les veuves et les orphelins. Cela va donner un visage nouveau à la Résistance dans laquelle jeunes et femmes ont toutes les audaces, la Résistance a leur visage qui tranche avec celui des politiciens.

Les monuments que l’on m’invite à contempler portent le nom de jeunes gens et jeunes filles. D’autres disent des massacres de civils du nourrisson au vieillard, en représaille.

La famine part d’Athènes, des quartiers portuaires et ouvriers mais elle s’étend peu à peu à tout le pays, avec des aires d’échange locaux. L’occupation a déchiré le tissu social traditionnel mais elle a rendu certains conscients de la communauté de leur sort. D’un côté prolifère le marché noir et les enrichissements illicites se multiplient dans le sillage de la collaboration, les troupes d’occupation exigent des pots de vin, mais la plupart des trafiquants étaient grecs , ils s’enrichissaient alors que les élites traditionnelles, intellectuelles en particulier vendaient leurs biens et prenaient des petits boulots complémentaires. Le nombre de personnes humiliées, appauvries, excédait largement celui de ceux qui en profitaient. Les conditions de l’unité nationale se réalisaient alors même que le choc paraissait avoir mis à genoux le peuple grec.. Les communistes grecs vont à la fois renforcer le parti, en accroitre la formation idéologique et dans le même temps s’ouvrir à tous ceux qui sont prêts à combattre l’ennemi.

Et les communistes inventent une autre manière de faire de la politique…

La question est comment un parti communiste faible et illégal tel que le KKE, le parti communiste de Grèce a pu prendre la direction d’un mouvement de masse de cette ampleur en peu de temps; en deux ans seulement, alors que la société grecque paraissait totalement désorganisée, épuisée, ils seront l’âme de cette résistance en symboliseront l’efficacité. Cette histoire grecque est comparable à celle du parti communiste français sauf que ce dernier depuis trente ans s’est détourné de son passé, l’a rendu présentable, on vante Ambroise Croizat en cachant soigneusement qu’il était ce que l’on appelle un “stalinien” et que comme les communistes grecs, il préférait la prison et la mort au désaveu de l’URSS et de Staline. L’entente avec Tito n’a jamais pu aller très loin parce que ce dernier non sans lucidité disait que l’URSS ne pouvait rien pour eux, tant elle devait fournir le gros des efforts devant l’invasion allemande. Il y a eu pire, les communistes grecs furent accusés par les politiciens bourgeois de céder la Macédoine, d’accepter un nouveau partage des balkans avec d’autres partis communistes. Les horreurs de la guerre civile, la terrible répression commença au coeur même de leurs combats héroïques.

Pendant deux décennies, celle des années vingt ou des années trente, ce parti n’avait pas réussi à s’imposer, tant il paraissait en rupture totale avec les moeurs politiques grecques. La vie politique n’était alors que querelles entre les Républicains, leur leader Venizélos et monarchistes, les débats constitutionnels structuraient la vie politique et les politiciens ignoraient totalement le vrais problèmes de la population, l’afflux des immigrés chassés d’Asie mineure, le chômage, les difficultés à se loger, se nourrir. Les contacts entre ces politiciens et le peuple grec passaient par des réseaux clientélistes qui se nourrissaient de participation au pouvoir quel qu’il fut. Comme il n’y avait pas d’antagonismes idéologiques entre les factions les coalitions gouverementales étaient très souples. Là encore nous y sommes, l’Europe telle qu’elle s’est construite a favorisé le retour de ces moeurs.

Lors de l’invasion hitlérienne, le KKE non seulement était désavantagé face à ce système d’influence puisque il était de fait exclu de toute combinaison gouvernementale mais il subissait partout la répression pour fait de grève ou manifestations interdites. Sa grande originalité tenait à son organisation dans la jeunesse… et la répression dont ils étaient victimes avait fait des communistes des experts en matière de clandestinité.

Face à l’invasion allemande, la vie politique traditionnelle s’est toujours plus disloquée dans une multitude de factions dont chacune défendait son domaine prvilégié, les monarchistes tenaient l’armée, et luttaient contre les républicains au sein des institutions. Impossible de créer un gouvernement d’unité nationale avec des politiciens de ce type. Tous n’avaient plus qu’un seul point commun, l’amertume à l’égard du roi parti en exil . Ces politiciens n’osaient ni être collaborateur, ni rompre avec le gouvernment de collaboration de Tsolacogrou. Ils n’en demeuraient pas moins persuadés d’incarner la légitimité politique qu’ils prétendaient défendre face aux menaces d’anarchie que représentaient pour eux les communistes. Les politiciens traditionnels non seulement sont hier comme aujourd’hui hystériquement anticommunistes mais ils ont peur du peuple.Ils aiment les harangues, les bains de foule et sot entourés d’acolytes qui les flattent, ils ne savent que gouverner d’en haut. La encore la caricature d’un Macron, le mépris dans lequel il parait tenir son gouvernement pléthorique dit assez bien leur vision de ce qu’est le peuple, leur propos démagogiques et leurs mégalomanie despotiques. Dans la classe politique traditionnelle, face à la catastrophe de l’invasion allemande, leurs préoccupations tournent autour du monarque. La situation se complexifie vu que les Britanniques soutiennent ce dernier, Churchill en tête, et refusent d’entendre que la totalité de la Grèce déteste son roi, ce qui navre les politiciens. Résultat pour ces politiciens c’était soit la collaboration, soit les Anglais et le roi: pour eux l’avenir de la Grèce se décidait hors du pays.

Exactement le contraire du choix du KKE qui se donna pour tâche principale de réorganiser le parti pour aller au plus près du peuple, là où il commençait à se rassembler, en particulier dans des comités de solidarité pour lutter contre la famine, obtenir des mesures gouvernementales de paiement en nature des salaires de fonctionnaires. Les communistes s’activaient, en mai ils avaient fondé l’EA- solidarité nationale- une organisation de secours qui se mit à lutter contre la famine. En juillet, ils fondent l’EEAM font ouvrier pour la libération Nationale et enfin en septembrel’EAM lui-même.

Un trait dira également cette rupture avec les moeurs politiques habituelles: la tradition grecque, méditerranéenne en général, voulait que l’on se range derrière un homme, un nom, souvent une dynastie… Dans la lutte clandestine, les communistes grecs ont volontairement rompu avec cette tradition: “je ne donne pas de nom, c’est le parti qui t’invite à te battre pour le peuple et seulement pour lui. “

Tant que l’on ne perçoit pas ce que l’audience du KKE, ses choix y compris actuels dépendent de ce moment fondateur de la lutte contre l’occupant nazi, on ne mesure pas l’originalité de son ancrage démocratique et en quoi la célébration de cet épisode fondateur nous renseigne sur les combats d’aujourd’hui. J’ai écouté les camarades grecs qui m’accueillaient, je ne partageais pas tous leurs choix et j’y reviendrai mais je prévenais: de quel droit moi dont le parti a connu une telle dérive, moi qui n’ait même plus de parti, puis-je faire autre chose que les écouter… Pourtant il me semblait…

Aujourd’hui quel combat? Après l’épisode Syriza…

Il y a chez les militants du parti communiste de Grèce une fermeté qui relève du primat du collectif. Son histoire, la fidélité à cette histoire font de lui un parti dont l’influence morale est plus forte que son audience électorale, comme d’ailleurs ces traits permanents: son implantation dans la jeunesse et son audience syndicale. En quoi cette estime qu’il provoque peut-elle se traduire aux prochaines élections législatives du 21 mai ? C’est l’inconnu, le taux d’abstention risque d’être élevé. Il y a eu l’épisode Tsipras et Syriza qui l’ont profondément affaibli et tel l’enfant spartiate se laissant dévorer par un renard les communistes grecs sont convaincus que si le parti existe toujours c’est grace au refus de l’opportunisme.

Aléxis Tsípras est un homme d’État grec. Il a été Premier ministre de janvier à août 2015 et de septembre 2015 à juillet 2019. Le 22 mai 2012 SYRIZA après la visite de Tsipras en Allemagne et en france où il a été adoubé par JLMelenchon et Pierre Laurent, il se transforme officiellement en parti politique, abandonnant son statut de coalition. Il en prend alors la présidence. Les élections législatives anticipées du 17 juin 2012 confirment la domination de SYRIZA à gauche. Avec 1 655 086 voix, le parti progresse de 60 %. Lors des élections européennes de 2014, il est le candidat à la présidence de la Commission européenne du Parti de la gauche européenne. Il promet d’augmenter les salaires, de nationaliser les compagnies privatisées ou de supprimer nombre de taxes mais on ne sait pas s’il veut ou non de l’euro »Tous les Grecs que j’ai rencontré et dont certains ont reconnu avoir voté Syriza l’ont fait parce qu’il était de gauche mais lui à l’inverse du KKE pouvait accéder au pouvoir et cette question de la participation du KKE à un gouvernement reste dans les esprits même si la déception à l’égard de la Nouvelle Démocratie comme de Syriza est très grande. le parti d’extrême-droite a été interdit mais une force d’extrême droite se reconstitue.

En effet, Syriza a suscité un mouvement lors du scrutin de janvier 2015 aux législatives. Syriza a totalisé 36,3 % des suffrages exprimés et 149 députés sur 300. Première force politique grecque, SYRIZA rate de deux sièges la majorité absolue au Parlement. Tsípras réussit néanmoins à former une coalition avec le parti de droite souverainiste des Grecs indépendants (ANEL) et à être nommé Premier ministre dès le lendemain des élections, le 26 janvier 2015, afin de pouvoir former un nouveau gouvernement. Comme premier acte officiel, Aléxis Tsípras rend hommage aux victimes de la Wehrmacht au mémorial de Kaisariani, il s’affiche toujours de ce fait comme un héritier des communistes grecs dans leur résistance, ce que les communistes grecs lui dénient. Ils voient en lui celui qui aura fait baisser le parti communiste de Grèce de moitié pour mieux appliquer la politique de l’uE, de l’Allemagne et des Etats-Unis.

Ce qu’a accompli Syriza c’est une manière de se mettre à genoux face au contrôle financier qui autorise un contrôle géopolitique sur de nombreux pays, ceux-ci sont tenus de se soumettre pour éviter de s’effondrer. Face à cet effondrement grec il y a Cuba, mais aussi le Vénézuela, et même l’Iran … Le peuple grec avait pourtant dit NON à une forte majorité, dans l’amour de Vassili pour Cuba, il y a ce refus, cette dignité volée au peuple grec par le lâche et le traître qui ne cesse de se parer des plumes du paon pour faire la roue. En effet, le 27 juin, après des querelles avec les créanciers mais aussi les dirigeants européens allemand et français, Tsipras propose un réferendum pour le 5 juillet où les grecs doivent dire s’ils acceptent les diktats des créanciers de la Grèce et il les appelle à voter “NON”. Appel suivi par plus de 60 % des votants (malgré un taux d’abstention de 41 %). Le lendemain, Yanis Varoufakis, le fantasque ministre de l’économie démissionne. Le 13 juillet , la Grèce et ses créanciers signent un accord comportant de nombreuses mesures d’austérité et de privatisations en Grèce, mais devant ouvrir à des crédits nouveaux pour le pays dans les mois suivants. le pays s’enfonce dans la crise., mais continue néanmoins à élire Syriza jusqu’à l’écoeurement. Les élections législatives de juillet 2019 sont marquées par une assez large victoire du parti Nouvelle Démocratie (39,9 %) et une défaite du parti d’Aléxis Tsípras (31,5 %, soit quatre points de moins qu’en septembre 2015). les électeurs lui reprochent: ses promesses non tenues en 2015, les affaires, l’intervention du gouvernement dans le système judiciaire, la mauvaise gestion des incendies meurtriers de l’été 2018, où 100 personnes sont mortes et l’accord Prespa sur la Macédoine du Nord, qui a été très impopulaire, notamment dans le nord de la Grèce. Son bilan économique, en dépit d’une légère reprise depuis 2017 après une décennie de récession et une baisse du taux de chômage, est caractérisé par le fait que la plupart des emplois créés sont temporaires ou à temps partiel et le plus souvent faiblement rémunérés. Ainsi en 2019, un salarié grec sur trois travaille à temps partiel pour un salaire net de 317 euros, inférieur à l’allocation de chômage de 360 euros, et si la pauvreté baisse depuis 2015, elle reste la plus élevée de la zone euro avec 34,8 % de la population exposée au risque de pauvreté ou d’exclusion sociale.

La grande différence entre le KKE, les militants du parti communiste grec, tels que je les rencontre lors de ce mois d’avril 2023 et les communistes français tels que je les ai vu dans ce Congrès marseillais est dans l’oubli ou la mémorisation de l’appel aux masses, le défi patriotique des Grecs et la poursuite de l’eurocommunisme, l’oubli de ce moment fondateur par les communistes français, pratiquement un désintérêt pour l’organisation du parti. Il y a eu cette ouverture du Congrès, les interventions internationales mettaient en avant Syriza, Varoufakis, et tout ce qui en Europe se range sous la même bannière. Il faudra attendre le deuxième jour du Congrès pour que l’on entende le parti communiste cubain et pas un quelconque intervenant ne gênant en rien l ‘OTAN. Du parti communiste de Grèce, il n’y avait personne, pourtant son secrétaire est venu en France. Dans un excellent français, il a porté les salutations des communistes grecs aux manifestations françaises contre les retraites. Il y a eu des manifestations de la jeunesse communiste grecque en soutien aux notres devant l’ambassade de france à Athènes. Les Grecs ont eu la misère des blocus et des sanctions et le déshonneur de s’être rendu sans vraiment combattre.

Vassili m’a fait remarquer qu’aussitôt une représentante de Syriza s’était cru obligée de tenir une conférence de presse pour les journalistes, pas pour les manifestants. En copiant l’intervention du secrétaire du KKE, elle exprimait sa solidarité. Et Vassili avait ajouté: “qu’aurait-elle pu dire aux travailleurs en lutte, que Tsipras avait porté l’âge de la retraite à 67 ans ? ”

Mais ce que nous disent les communistes de grèce va au-delà, c’est une conception de la démocratie, celle qui s’adresse au peuple qui lutte et pas seulement aux médias, ou du moins qui tente de le faire avec un courage exemplaire. En écoutant les fiers camarades grecs je suis littéralement hantée par ce constat de Petros Roussos, l’un des dirigeants du KKE de la résistance et de la guerre civile: “A partir de l’été 1944, il devenait de plus en plus évident que nos efforts, nos sacrifices, nos peines, nos évolutions, nos sacrifices, ne donnaient pas le résultat souhaitée. C’était comme si nous nous étions trouvés dans un champ magnétique de haute intensité où notre boussole était soumise à d’intenses perturbations “(2) Je vais revenir souvent sur ce que sont “les champs magnétiques de l’histoire, en 1944, mais aussi plus tard dans les années soixante et dix, la contrerévolution de la fin des années 1983 et aujourd’hui.

C’est le présent qui nous invite à revoir le passé et ce que vit le peuple grec à la veille des élections législatives qui auront lieu le 21 mai est très difficile. Il y a l’inflation; les salaires très bas et pire encore comme nous le raconte cette femme qui est en train de laver le sol de sa taverne déserte. Maria lui demande des nouvelles de son procès. Il n’y a pas de prudhomme, pas de droit du travail. La femme a travaillé pendant des mois comme femme de chambre dans un hôtel proche, le propriétaire, un notable, a refusé de lui payer son dû. Elle a porté plainte mais le tribunal ne statue pas et elle n’a pas grand espoir: il n’y a pas de justice dans ce pays… conclue-t-elle mais elle a réussi à récupérer par ruse un peu de ce que lui devait ce voleur. Des parents sont venus d’Allemagne où ils ont immigré et ils ont logé dans l’hôtel, en partant ils n’ont pas payé et la femme a expliqué que c’était toujours ça. Pour le moment la survie se joue dans ce genre de bricolage mais le monde est dans l’attente. Comme disait Marx c’est l’anatomie de l’homme qui explique celle du singe, le présent nous incite à sans cesse puiser dans l’histoire en privilégier tel ou tel épisode et si l’histoire est la science de ce qui ne se répète jamais, elle est aussi recherche de sens, de valeurs. Alors se téléscopent des faits, comme la mort d’Harry Belafonte, la lutte pour une autre Amérique débarrassée de ses ferments nazis, les illusions et les combats en train de chanter ce peuple grec et son invention démocratique, l’horizon des voyages.

A quatre vingt cinq ans que soit beni ce choix communiste même s’il a perdu la terre ferme sur lequel il y avait encore des compagnons. Ce Congrès du PCF a été celui de l’ultime lâcheté celle qui me fait augurer de tous l’attitude d’un Tsipras… Comme le vote de la révolution 390 en faveur de l’oTAN, pas la moindre résistance à gauche…

Quel rapport avec le nazisme ? La question est face à la menace de la mise en esclavage, de la colonisation interne, de savoir l’état réel des peuples, ce qu’ils pensent être la politique et leur rôle ? J’espère à la fin de ce reportage vous faire mesurer à quel point les choix politiques sont aussi de civilisation, intellectuels, ethiques autant qu’économiques… On a poussé les peuples à s’agenouiller, à passer sous les fourches caudines de la contrerévolution et aujourdhui comble de lâcheté on pousse au desespoir, par une propagande qui peut pousser une forte majorité de délégués à un congrès du PCF a cautionner le mensonge digne de Goebbels que le génocide Oïghour… Quel espoir reste-t-il après cela d’avoir un peuple combattant… En Grèce, l’opération Syriza, la reddition devant la menace d’étranglement économique a laissé les têtes basses et les coeurs amers… J’ai entendu plusieurs fois des voix s’élever contre le fait que le vote communiste, le seul vote honorable, ne menait nulle part puisque les communistes ne seraient pas au pouvoir.

C’est là qu’entre le PCF, le KKE et bien d’autres partis communistes s’imposerait un dialogue qui n’existe plus parce que visiblement les peuples ont oublié ce qui s’est passé à cette époque, une piqure de rappel s’impose avant qu’il ne soit trop tard. Se rendre compte du “nouveau champ magnétique dans lequel notre conception de la démocratie va pouvoir peut-être s’épanouir”, nous avons des fragments de ce savoir là… Il reste l’essentiel favoriser l’intervention populaire… j’ai baissé la tête et éteint la retransmission du Congrès du PCF et je guette le sursaut du peuple grec et celle de mes camarades…

Danielle Bleitrach

(1) Mark Mazower; dans la Grèce d’Hitler, tempus WWW editions Perrin P11. 2012

(2)Mes cinq grandes années 1940-45, Athènes 3 e édition en 2 tomes syncroni Epochi 1984 tome II p. 395 cité par Joelle Fontaine, de la résistance à la guerre civile 1941-1946 La fabrique, éditions. 2012, p.55

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