Où nous apprenonc grâce à Marianne les moeurs russes concernant leurs vacances et les problèmes qui naissent de la nouvelle configuration internationale et la manière dont ils redécouvrent leur pays. (note de DB, traduction de Marianne Dunlop)
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Dans moins d’un mois, il y aura des congés, mais trop courts pour partir loin. Les 29 et 30 avril (samedi et dimanche), ainsi que le 1er mai, ‘fête du printemps et du travail’, seront des “jours fériés”. Les 6-9 mai, en l’honneur du Jour de la Victoire, sont également des jours chômés. Mais les 6 et 7 mai tombent encore une fois des samedis et des dimanches, jours de congé légaux. Or, moins on a de temps pour se reposer, plus on a envie de le passer agréablement. Cependant cette saison-ci, les occasions de le faire ne sont pas aussi nombreuses qu’il y a cinq ans.
Certaines destinations sont trop chères, d’autres sont dans des pays qui n’accordent pas de visa. Et si le temps de trajet, par monts et par vaux, excède plusieurs jours, c’est carrément impossible en si peu de temps. Cependant, les Russes n’ont pas l’habitude d’économiser sur leurs vacances, a déclaré Alexander Mkrtchyan, vice-président de l’Alliance of Travel Agencies (ATA).
– Les vacances sont la dernière chose sur laquelle les gens essaient d’économiser. Il est compréhensible que nos revenus réels diminuent depuis neuf ans déjà. Mais les gens préfèrent se priver d’un nouveau canapé ou d’un pneu neuf pour leur voiture plutôt que de rogner sur les loisirs. Ils peuvent réduire le nombre de jours de vacances, réduire le nombre d’étoiles des hôtels, voire changer leur but de voyage pour des destinations plus économiques, mais s’ils ont l’habitude d’aller quelque part pour les vacances, ils s’en tiennent à cette tradition. Beaucoup avaient l’habitude de choisir des destinations européennes pour le mois de mai, mais aujourd’hui ils préfèrent passer leurs congés en Russie.
“SP : L’Europe nous a fermé le ciel, et par voie terrestre, cela prend beaucoup de temps. De plus, dans les pays voisins membres de l’UE, en principe faciles d’accès en voiture, il n’est pas très agréable de voyager.
– Aujourd’hui, en fait, il est plus facile d’aller en Europe occidentale qu’en Europe orientale. En effet, l’Europe de l’Ouest délivre des visas aux Russes, alors que l’Europe de l’Est ne le fait pas. Alors qu’avant, il y avait beaucoup de gens qui voulaient partir en avion pour deux ou trois jours vers Prague ou Varsovie, Riga ou Jurmala.
SP : Qu’en est-il des nouvelles destinations ? De nombreux pays sont amicaux à l’égard de la Russie. Il est clair que le Kenya ou le Brésil ne sont pas faits pour les petites vacances de mai, mais la Chine semble déjà faire tout son possible pour accueillir les touristes. Ou encore, l’Iran qui est une nouvelle destination.
– Ah, ces pays amis ! Ils aiment qu’on les appelle ainsi. Mais ils ne suppriment pas les visas pour les Russes. Nous avons depuis longtemps un régime sans visa avec une Thaïlande beaucoup moins “amicale”, si bien que les gens y vont, même si la destination n’est pas bon marché. Tandis que pour obtenir un visa chinois, les rendez-vous sont donnés maintenant pour la fin du mois de mai. En d’autres termes, si quelqu’un veut vraiment y aller, il ne pourra pas le faire en mai. En ce qui concerne les pays de la CEI, le Belarus, l’Arménie et la Géorgie sont très demandés. La Turquie, l’Égypte et les Émirats offrent des vacances balnéaires. Les plus fortunés choisissent la Thaïlande ou les Maldives. En ce qui concerne les vacances en Russie, Saint-Pétersbourg et Sotchi sont en tête. Aucune nouvelle destination n’est apparue.
“SP : Et l’Iran ? Nous sommes de grands amis. Le ministre iranien des Affaires étrangères a rendu visite à M. Lavrov. L’Iran a besoin de touristes, il a ce dont nous avons besoin là-bas : la mer et le soleil.
– Soyons francs : tout d’abord, ils ne suppriment pas les visas, la discussion à ce sujet traîne en longueur. Cela rend les choses très difficiles. Deuxièmement, on ne peut s’y rendre qu’à partir de Moscou. Pour les personnes qui vivent dans la région de Moscou, c’est pratique. Pour les autres, ce n’est pas le cas. Enfin, il y a beaucoup de conventions dans ce pays. Par exemple, un mari et sa femme partent en vacances. Même s’ils ont un certificat de mariage, ils ne peuvent pas prendre le soleil ensemble. Il y a des plages séparées pour les hommes et les femmes.
Le code vestimentaire est très strict. Il y a une semaine, une jeune touriste a rapporté qu’elle avait été réprimandée de manière très dure et désagréable par la police locale parce qu’elle ses cheveux sortaient de sous son foulard. Il faut convenir que l’on ne part pas en vacances pour se faire réprimander sur son apparence. Surtout si les règles de bienséance généralement acceptées dans le pays sont respectées. En outre, il est interdit de boire de l’alcool en Iran. Il n’en vendent pas, et même si vous apportez de l’alcool avec vous, il vous sera retiré à l’aéroport. Vous ne pouvez donc pas fêter un anniversaire ou un mariage comme nous en avons l’habitude. D’ailleurs, vous n’avez pas non plus le droit de boire de l’alcool dans un hôtel. Tant que l’Iran n’assouplira pas ses exigences à l’égard des touristes et n’instaurera pas un régime d’exemption de visa, il n’y aura pas d’afflux de touristes en provenance de Russie.
Un certain nombre de pays musulmans ont une attitude détendue à l’égard des habitudes des touristes, a déclaré l’expert. Dans les Émirats, il est possible de ne pas porter de foulard et de prendre le soleil en famille sur la plage. Il est également possible de boire de l’alcool, non seulement dans les hôtels, mais aussi dans les restaurants. Les touristes russes s’y sentent donc beaucoup plus à l’aise qu’en Iran. L’Égypte et la Turquie sont également connues pour leur tolérance à l’égard de nos habitudes. Peut-être se sont-ils habitués, ont-ils accepté l’inévitable…
Le fait que l’Iran ne soit toujours pas attractif est confirmé par les données du service des frontières du FSB, selon lesquelles le pays n’est que le 29e pays le plus visité par nos touristes. En 2022, seuls 8 700 citoyens russes y ont passé leurs vacances, tandis que 3,6 millions de nos compatriotes se sont rendus en Turquie.
Mais revenons au tourisme intérieur. Selon un important service russe de réservation de vacances, les stations balnéaires de la région de Krasnodar sont la destination la plus populaire en mai. Sochi arrive en tête : 21 % des réservations pour le mois de mai. Anapa figure également dans le top 10. Quant à Krasnaya Poliana [site des JO d’hiver de Sotchi, NdT], elle a cédé ses positions. La plupart des touristes préfèrent manifestement aller à la mer plutôt qu’à la montagne. N’est-il pas un peu tôt pour ouvrir la saison des plages ?
– Oui, il est impossible de se baigner dans la mer au début du mois de mai, confirme Alexan Mkrtchyan. – Il fait encore un peu froid pour prendre un bain de soleil. Mais beaucoup de gens viennent simplement pour respirer l’air frais, se promener le long du rivage et manger des fruits de mer. Cela peut se faire à n’importe quel moment de l’année. En outre, la côte de la mer Noire offre de nombreux sites à voir lorsqu’il n’y a pas de foules de vacanciers qui se promènent. Et bien sûr, il est garanti qu’il fait doux et que tout est en fleurs.
“SP : Il est clair que les personnes vivant loin des régions chaudes se précipitent vers le sud. Mais existe-t-il un processus inverse, lorsque les habitants du Sud se rendent en masse dans le Nord et l’Extrême-Orient pour admirer l’exotisme du froid ?
– Nous avons ce qu’on appelle des tarifs forfaitaires, qui permettent de voler de Moscou à Vladivostok, au Kamtchatka ou à Sakhaline et de revenir pour seulement 30 000 roubles. Et un vol Moscou-Sochi-Moscou ou Moscou-Minvody-Moscou en mai coûterait le même prix, bien qu’il faille deux heures pour atteindre Minvody [littéralement “eaux minérales”, dans le Caucase, NdT] et une journée entière pour atteindre Vladivostok. La tendance est donc que les gens choisissent de plus en plus de passer leurs vacances dans cette région, car le gouvernement subventionne les vols vers les régions éloignées. C’est ce qui s’est passé en 2021, lorsque la pandémie était sur le déclin. Nos concitoyens ont compris que les frontières étaient fermées, mais nous avons aussi de belles choses à voir.
“SP : Et quel est votre conseil pour le mois de mai ?
– Cela dépend surtout de l’épaisseur du portefeuille. En général, vous pouvez passer de bonnes vacances sans quitter votre région. Si vous vivez dans la région centrale, vous pouvez visiter l’Anneau d’or. Sur le Baïkal, il y a beaucoup d’endroits économiques autour du lac. Dans le Caucase, il existe de magnifiques sentiers de randonnée dans les montagnes. Dans le nord-ouest, la Carélie et le Ladoga. De très nombreuses personnes – environ 60 % – ne quittent pas du tout leur région. En effet, cela n’a pas de sens de partir loin, s’il est possible de passer de bonnes vacances à moins de 200-300 km de chez soi.
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