Encore une analyse, un diagnostic imparable de nos amis trotskystes WSWS, qui s’ils voient dans la Russie de Poutine un régime impérialiste, oligarchique, dans le même temps ne renvoient pas dos à dos le pays réellement agressé et l’impérialisme qu’il faut combattre si l’on veut réellement faire face à la plus grande attaque contre le niveau de vie des travailleurs qui ait été mené depuis un siècle. Je partage mille fois le constat qui aboutit à l’idée que ceux qui prétendent réellement se battre dans leur propre pays contre cet assaut, prétendent honnêtement mobiliser la classe ouvrière et qui ont une attitude ambigue face à ce qui se passe en Ukraine, face à l’UE et à l’OTAN, mais aussi à Taiwan nous mentent et se mentent à eux mêmes. Si nous avons relevé ici seulement le diagnostic et pas les solutions préconisées que le lecteur pourra retrouver sur le site de WSWS (lien ci-dessous), c’est parce que ce ne sont pas celles que nous préconisons du moins pour la France mais nous partageons l’idée que beaucoup de choses sont liées à cet internationalisme qui voit l’assaut du capital contre le travail, comme contre la nature elle-même. (note de danielle Bleitrach pour histoireetsociete)
https://www.wsws.org/fr/articles/2022/09/03/pers-s03.html?pk_campaign=newsletter&pk_kwd=wsws
illustration: il y a quelques paradoxes à illustrer le diagnostic d’un courant trotskiste par la couverture d’un livre de Michael Parenti qui vient de paraitre chez Delga, dénonçant le mythe des jumeaux totalitaires fascisme et communisme. Mais le paradoxe n’est qu’apparent, c’est une leçon retenue des Cubains : ce qui divise c’est la capital, ce qui unifie c’est le combat de classe, anti-impérialiste et leur choix avec Fidel Castro du communisme leur a permis de surmonter la plus terrible des divisions de classe, celle de race hérité de l’esclavage sucrier. Nous sommes dans un moment où se pose face à l’offensive du capital et les guerres internes et externes qu’il suscite partout il y a la nécessité de dénoncer la mise en concurrence, les guerres et de fonder des coopérations, des luttes et des dialogues sur des bases claires. ‘note de danielle Bleitrach
Peter Schwarz
La classe ouvrière européenne fait face à la plus grande attaque contre son niveau de vie depuis un siècle, lorsque l’inflation de l’après-guerre et les conséquences du krach boursier de 1929 ont détruit les moyens de subsistance de larges segments de la classe ouvrière et de la classe moyenne. Sous l’effet conjugué de l’inflation élevée et des bas salaires, les revenus fondent aujourd’hui comme neige au soleil.
Selon Eurostat, l’office statistique de l’Union européenne, les prix à la consommation dans les 27 États membres de l’UE ont augmenté de 9,8 pour cent en juillet par rapport à l’année précédente; 16 États dépassent ce chiffre. Les pays baltes sont en tête, avec une inflation supérieure à 20 pour cent, suivis par la République tchèque, la Bulgarie, la Hongrie et la Pologne, où les prix ont augmenté de 14 à 17 pour cent. Au Royaume-Uni, qui ne fait plus partie de l’UE, l’inflation est de 12 pour cent et pourrait atteindre 18 pour cent d’ici la fin de l’année, selon les experts.
Les revenus sont loin de suivre le rythme de la hausse des prix. En Allemagne, par exemple, les salaires n’ont augmenté que de 2,9 pour cent, alors que les prix ont progressé de 8,5 pour cent. Les salaires réels ont donc baissé en moyenne de 4,4 pour cent en un an, selon les calculs de l’Office fédéral de la statistique. Les salaires réels avaient déjà reculé au cours des années pandémiques de 2020 et 2021. La situation est similaire dans d’autres pays européens.
Cependant, les statistiques officielles reflètent à peine l’impact réel de l’inflation. Surtout, les prix des denrées alimentaires, du gaz, de l’électricité et de l’essence, qui pèsent particulièrement sur les ménages ouvriers, ont augmenté à un rythme supérieur à la moyenne et explosent aujourd’hui. Des millions de familles ouvrières font ainsi face à l’alternative de mourir de faim ou de froid, et beaucoup doivent subir les deux.
En Allemagne, le prix des denrées alimentaires a augmenté de 12,7 pour cent et celui de l’énergie de 38 pour cent depuis un an. Le mois prochain, on s’attend à une nouvelle flambée des prix, car plusieurs mesures d’aide gouvernementales expireront le 1er octobre et la surtaxe sur le gaz entrera en vigueur, une sorte de taxe spéciale imposée à tous les utilisateurs finaux pour compenser la perte des approvisionnements en énergie russe. En outre, les prix élevés du marché mondial de l’électricité et du gaz commencent à être répercutés sur les factures des ménages. Le prix de l’électricité sur la Bourse européenne de l’énergie (EEX) a été multiplié par vingt dans certains cas. La Bundesbank s’attend donc à ce que le taux d’inflation soit largement supérieur à 10 pour cent cet hiver.
Au Royaume-Uni, le plafond officiel des prix de l’énergie pour les ménages augmentera de 80 pour cent pour atteindre 3.549 livres (4.200 euros) par an le 1er octobre. Un nouveau doublement est prévu d’ici avril prochain, pour atteindre 7.200 livres. Il y a un an, le plafond était encore de 1.042 livres. Environ 50 pour cent des ménages britanniques risquent de tomber dans la pauvreté à cause de cette mesure. Le National Health Service s’attend à ce que des milliers de personnes meurent parce qu’elles ne pourront plus chauffer leur maison.
Aux Pays-Bas (taux d’inflation de 11,6 pour cent), la hausse des prix menace de plonger dans la pauvreté 1,4 million des 17,4 millions d’habitants, selon l’institut de recherche économique du gouvernement. Un ménage néerlandais sur cinq ne sera pas en mesure de payer ses factures de gaz et d’électricité cet hiver, selon l’institut.
En Europe de l’Est, où les salaires sont plus bas et les hausses de prix plus importantes, la situation est encore plus catastrophique. En Roumanie, par exemple, en juillet, l’électricité était environ deux fois plus chère qu’en Pologne et six fois plus chère qu’en Finlande, ce qui la rendait inabordable pour une grande partie de la population.
Les gouvernements présentent l’inflation et ses conséquences sociales comme une catastrophe naturelle imprévisible ou comme un sacrifice à faire pour «défendre la démocratie et la liberté en Ukraine». Mais ce sont des mensonges éhontés. Cette attaque contre le niveau de vie de larges couches de la population est la continuation de la guerre de classe que l’oligarchie financière mène avec une intensité croissante contre la classe ouvrière depuis les années 1980.
Cela est démontré par le fait même que les profits continuent de croître – comme ils l’ont fait pendant la crise financière et la pandémie – tandis que les salaires s’effondrent.
L’évolution en Grande-Bretagne est symptomatique: les marges bénéficiaires des plus grandes entreprises cotées en bourse (FTSE 350) sont 73 pour cent plus élevées qu’en 2019, l’année précédant à la pandémie. Selon le Bureau des statistiques nationales (ONS), les bénéfices des entreprises ont augmenté de 11,7 pour cent rien qu’entre octobre 2021 et mars 2022, alors que les salaires n’ont progressé que de 2,6 pour cent sur la même période, chutant d’un peu moins de 1 pour cent une fois ajustés à l’inflation.
Les grandes entreprises énergétiques regorgent de liquidités. Les six géants multinationaux du pétrole, ExxonMobil, Chevron, Shell, BP, TotalEnergies et Eni, ont déclaré des bénéfices combinés de plus de 64 milliards de dollars pour le deuxième trimestre de 2022. La moitié de cette somme est allée directement dans les rachats d’actions et les dividendes pour enrichir les actionnaires. Les sommes gargantuesques arrachées aux familles ouvrières pour le chauffage et l’électricité ont donc atterri directement dans les comptes bancaires des super-riches.
Les attaques contre le niveau de vie de la classe ouvrière montrent avant tout le lien indissociable entre la guerre impérialiste et la guerre de classe.
Contrairement à la manière dont la propagande officielle dépeint la situation, la guerre par procuration que les États-Unis et l’OTAN mènent contre la Russie en Ukraine n’est pas une guerre pour la «liberté» et la «démocratie», mais une guerre impérialiste pour la redivision du monde. Elle fait suite aux guerres criminelles dans les Balkans, en Irak, en Afghanistan, en Libye, en Syrie et ailleurs à travers lesquelles les États-Unis et leurs alliés européens ont cherché à placer le pétrole, le gaz et d’autres matières premières sous leur contrôle et ont imposé une domination stratégique sur le Moyen-Orient, l’Afrique et la masse continentale eurasienne.
La guerre en Ukraine n’a pas commencé avec l’attaque russe du 24 février 2022, mais avec l’encerclement systématique de la Russie par l’OTAN, l’installation d’un régime fantoche occidental en Ukraine, l’armement systématique de l’armée ukrainienne et le refus d’offrir à la Russie des garanties de sécurité.
Le président Poutine, qui représente les intérêts des oligarques russes, a réagi par la plus réactionnaire de toutes les réponses imaginables. Il a attaqué militairement l’Ukraine, renforçant les forces nationalistes les plus à droite et fournissant à l’OTAN le prétexte souhaité pour la guerre. Depuis lors, l’OTAN intensifie impitoyablement la confrontation avec la deuxième plus grande puissance nucléaire du monde, fournissant à l’Ukraine de grandes quantités d’armes et de munitions et en dirigeant dans les faits l’effort de guerre.
Ce faisant, elle poursuit des objectifs économiques et géostratégiques tangibles: l’assujettissement colonial de la Russie, le démembrement de son vaste territoire, le pillage de ses richesses en matières premières et l’élimination d’un allié potentiel: la Chine.
Toutes les expériences du 20e siècle montrent que les guerres impérialistes exigent la répression et l’exploitation impitoyables de la classe ouvrière dans le pays. Non seulement celle-ci doit supporter les coûts du réarmement dont des sommes presque inépuisables sont disponibles, tandis que les écoles, les cliniques et les infrastructures sociales sont dilapidées. Mais elle doit en plus subir les conséquences des violentes perturbations de l’économie mondiale qui accompagnent les préparatifs de la guerre et la guerre elle-même.
L’inflation est l’une des formes sous lesquelles cela se produit. Lorsque les gouvernements et les médias prêchent que la population doit faire des «sacrifices» pour devenir indépendante des approvisionnements énergétiques russes – ou des puces informatiques et des batteries de voitures électriques chinoises – ils parlent en réalité de guerre.
Hitler et Mussolini ont fait la promotion de l’autarcie nationale lorsqu’ils se sont préparés à la Seconde Guerre mondiale. Alors que le nationalisme économique «En son temps, faisait avancer le genre humain… le nationalisme fasciste décadent qui prépare des explosions volcaniques et des affrontements grandioses dans l’arène mondiale n’apporte que la ruine.» Comme l’a écrit Léon Trotsky en 1933 dans l’article «Nationalisme et vie économique», qui est à nouveau d’actualité aujourd’hui.
Ceux qui promettent aux travailleurs qu’il est possible de lutter contre les conséquences de l’inflation sans rejeter en même temps la guerre des États-Unis et de l’OTAN en Ukraine et les préparatifs de guerre contre la Chine les trompent. Le niveau de vie ne peut être défendu sans rejeter la guerre et le militarisme.
Partout en Europe et dans le monde, les travailleurs résistent aux attaques contre leur niveau de vie. On constate une augmentation sensible du nombre de protestations contre les coupes sociales et de grèves pour des salaires plus élevés. Mais ces luttes ont besoin d’une orientation et d’une perspective claires. Elles doivent être développées en un mouvement socialiste européen et mondial contre le capitalisme.
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