Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

VLADIMIR POUTINE : UN COUP PLUS LOIN

Avec les réserves que d’un point de vue communiste j’ai émis sur le déclenchement des opérations militaires, cet article de Régis de Castelnau me semble tout à fait pertinent, non seulement dans ce qui rend la guerre inévitable et sur quoi nous ne cessons ici d’alerter, mais également sur l’idée fondamentale que nous sommes entrés dans une nouvelle phase historique avec la fin de l’hégémonie des USA dont cette intervention serait le signal comme la prise de Constantinople inaugurerait les temps modernes autant que la découverte de l’Amérique. Je suis heureuse que quelqu’un s’intéresse à ce temps-long de l’histoire et de la transition dans laquelle nous sommes entrés mais qui remonte peut-être à la première guerre mondiale: impérialisme stade suprême. (note de Danielle BLEITRACH histoireetsociete)

RÉGIS DE CASTELNAU15 COMMENTS

L’intervention militaire russe en Ukraine constitue une surprise et il est nécessaire d’apporter quelques compléments à l’article que nous avons publié il y a deux jours. Nous entrons probablement dans une phase d’accélération comme l’Histoire en a toujours connu. Mais qui plonge justement dans un inconnu difficilement prévisible

Nous avions pointé la probable fin d’un cycle historique entamé avec l’effondrement de l’Union soviétique. Et par référence à la débandade américaine en Afghanistan actant la fin de l’ère des « guerres de 20 ans ». Il est possible avec l’intervention russe en Ukraine que nous venions de rentrer brutalement et plus loin que l’on pouvait le supposer dans la nouvelle séquence. Caractérisée par le déclin de l’empire américain et l’émergence de ces grands rivaux comme d’abord la Chine et ensuite la Russie, que la stupide stratégie américaine mise en œuvre depuis 30 ans a rejeté vers l’Asie.

Répétons que la façon dont le camp occidental a récemment et délibérément piétiné tous les principes du droit international devait conduire inéluctablement à brutal retour de boomerang. Ce que les Russes font aujourd’hui, les Américains l’on fait aux quatre coins de la planète parfois avec un cynisme écœurant comme les deux symboles de la Serbie et l’Irak. L’opération entamée par la Russie est la jumelle de celle des Balkans avec génocide inventé, bombardement de populations civiles et amputation d’un territoire national. On pourrait aussi faire référence à la destruction de l’État libyen, là aussi sur la base de massacres inventés par BHL occulte ministre des affaires étrangères, dictant leur conduite à des dirigeants ineptes. Mais il faut être clair, si les agressions occidentales étaient condamnables, celle de la Russie aujourd’hui l’est tout autant.

Simplement en attendant de plus amples informations, il semblerait que l’objectif annoncé par Vladimir Poutine soit celui, non seulement de protéger les républiques séparatistes qu’il vient de reconnaître, mais également de « démilitariser et dénazifier l’Ukraine ». Donc Moscou a décidé semble-t-il d’aller encore « un coup plus loin » en ne se contentant pas de la neutralisation de l’Ukraine que nous avions décrite, mais en procédant de force à la création d’un État tampon. Et elle bénéficie pour le justifier de l’invraisemblable aveuglement diplomatique dont l’Occident a fait preuve. D’abord en passant son temps à maltraiter et à humilier la Russie depuis la chute de l’Union soviétique. Ensuite à ne pas comprendre le changement qui s’est produit à l’automne dernier quand les Russes ont clairement dit qu’eux aussi pouvaient fixer des lignes rouges et que le refus de renoncer à faire rentrer l’Ukraine dans l’OTAN en était une. Enfin en continuant à soutenir un régime corrompu faisant mener une guerre atroce contre les habitants de l’Est ukrainien par des néonazis avérés. Il est surprenant que personne n’ait relevé ce qu’a dit Vladimir Poutine dans son discours du 21 février à propos du massacre de la maison des syndicats « nous savons qu’ils sont, nous connaissons leurs noms, nous les prendrons et nous les punirons ». La complaisance occidentale avec l’incontestable présence active en Ukraine d’un fort courant néonazi héritier de ceux qui furent les collaborateurs de la Shoah, était quelque chose de scandaleux.

Vladimir Poutine avait obtenu avec la reconnaissance des républiques séparatistes une neutralisation de fait de l’Ukraine pour assez longtemps. Il a semble-t-il décidé de rapidement de jouer un coup de plus avec la création d’un État tampon institutionnalisé. On voit difficilement comment les occidentaux pourraient s’y opposer efficacement, autrement que par des surenchères verbales et des sanctions contre-productives.

Alors bien sûr il est toujours inquiétant de voir les armes se mettre à parler, surtout quand les protagonistes ont de quoi détruire plusieurs fois la planète.

Mais concernant les responsabilités, on rappellera cependant ce que disait Montesquieu : « Les responsables des guerres ne sont pas ceux qui les déclenchent, mais ceux qui les ont rendues inévitables… »Régis de Castelnau

Print Friendly, PDF & Email

Vues : 813

Suite de l'article

5 Commentaires

  • etoilerouge6
    etoilerouge6

    excellent article de DE CASTELNAU et une maxime à ne pas oublier et qui devrait orner interventions ettracts

    Répondre
  • marsal
    marsal

    Clairement, l’occident, mené par les USA, a choisi de voir l’Ukraine envahie plutôt que de négocier sa neutralité. On a beaucoup consulté, mais rien de concret n’a été mis sur la table de négociation et donc, la négociation est restée un voeux pieux.

    Premièrement, il faut constater que l’Europe est la première victime. Les marchés financiers, dont la spécialité est de compter les points l’ont immédiatement enregistré. Baisse de 3,8% du Cac 40 à Paris, hausse de 3,4% du Nasdaq à New York, ce qui tranche avec la tendance des dernières semaines où cet indice phare des valeurs technologiques américaines était en difficulté.
    L’Europe a été incapable (on pourrait dire comme d’habitude) d’affirmer de manière autonome ses intérêts. Elle va être la principale victime des “sanctions” économiques annoncées contre la Russie. Elle va se trouver naturellement coupée ou a minima en difficulté pour accéder à ses ressources naturelles les plus proches, notamment sur le plan énergétique, mais pas seulement. Comme la France est simultanément en grande difficulté en Afrique, autre source possible de pas mal de matières premières, l’avenir se présente mal, en période de fortes tensions inflationnistes sur tous les marchés et même de pénuries chroniques sur un certain nombre de produits.

    A mon avis, il y a plusieurs raisons à ce déroulement.

    D’avbord, en géopolitique, il faut toujours avoir à l’esprit que la compétition entre allié peut-être souvent beaucoup plus douloureuse que la confrontation entre ennemis, même si elle est plus policée. La croissance des forces productives n’est plus suffisante pour satisfaire les appétîts impérialistes concurrents. Il va donc falloir faire de la place pour les plus voraces et l’Europe est en train de s’afficher comme une cible de premier choix.
    Dans une période où l’énergie devient chère, le monde se divise en deux catégories : ceux qui en ont (les USA font partie de cette première catégorie depuis 10 ans, grâce au développement du gaz et pétrole de schiste) et ceux qui en manquent : L’Europe fait clairement partie de cette seconde catégorie, dès qu’elle est coupée des approvisionnements russes, et ce d’autant plus que sa première puissance industrielle a fait le choix aberrant de renoncer à l’énergie nucléaire.

    La deuxième raison, c’est que l’Ukraine elle-même était de toutes façons au bord du gouffre. Personne ne le dit, mais tout le monde le savait. Garder l’Ukraine dans le giron occidental devenait de plus en plus difficile. L”économie ukrainienne, qui est la seule ex-république soviétique a n’avoir pas encore retrouvé un pib égal à celui qu’elle avait à l’époque soviétique ne tenait que grâce aux chèques réguliers accordés par le FMI. Ces crédits étaient accordés – pour des raisons politiques – avec beaucoup plus de largesse que ce qui a été concédé aux autres pays, comme la Grèce. Mais cela ne pouvait pas durer. Cette situation financière était intenable. Le coup d’état de Maïdan avait privé l’Ukraine d’une bonne partie de ses débouchés en Russie et constitué un choc économique redoutable pour une économie fragile. La liberté de visas accordée par l’UE a de plus saigné l’Ukraine d’une partie de sa jeunesse. Beaucoup d’Ukrainiens ont fui l’Ukraine bien avant l’arrivée des chars russes.L’ouverture du gazoduc NordStream2 en réduisant les débits de gaz transitant par l’Ukraine (pour lequel l’Ukraine reçoit des paiements substantiels) allait porter le coup de grâce à l’économie ukrainienne. La restructuration devenait inévitable à court terme, et vu la fragilité du pouvoir ukrainien, celui-ci n’aurait probablement pas résisté longtemps à une telle politique. Et, ni l’UE ni les USA n’avaient l’intention de payer durablement ni d’investir massivement dans un pays à la structure politique et sociale aussi fragile. Comme le disait Jacques Chirac, les promesses n’engagent que ceux qui les croient. Si on examine avec un peu de recul la politique de l’occident vis à vis de l’Ukraine, le mot qui me vient à l’esprit, c’est cynisme. L’occident (et particulièrement les USA) s’est servi de l’Ukraine pour contenir la Russie, il la jette comme un mouchoir usagé désormais. Leçon à retenir pour tous …

    La troisième raison est que la crise actuelle ne coupe pas seulement l’Europe de ses meilleures ressources énergétiques possibles, elle coupe également l’Europe des nouvelles routes de la soie portées par la Chine. Et là encore, c’est l’Europe qui va en être la principale victime, bien davantage que la Chine;

    Pourquoi ? Et bien, les routes de la soie ne seront pas coupées à leur origine, mais à leur extrémité. L’Europe sera privée des sources d’énergies et de matières premières russes, qui devront donc être adressées vers l’Asie, De même, l’accès aux composants et produits industriels chinois devra passer par des routes maritimes largement contrôlées par les USA. L’Europe sera doublement dépendante des USA.

    A l’inverse, la Russie ne sera pas privée de débouchés pour ses matières premières ni son énergie, puisque son principal client est désormais la Chine. Quant à la Chine, elle conserve l’accès à des marchés certes jeunes et immatures, mais qui sont les zones au développement démographique et économique le plus prometteur du monde : l’Asie centrale et du sud, l’Afrique, et dans une moindre mesure l’Amérique latine.

    Les routes de la soie n’ont pas pour seul objectif de desservir l’Europe, celle-ci est un débouché à haute valeur ajoutée, compte tenu de la richesse actuelle de ce continent, mais à faible potentiel de développement.

    L’Asie compte en 2019 4,6 milliards d’habitants (60 % de la population mondiale), dont plus de 2 milliards ont moins de 20 ans. Selon les projections de l’ONU (https://population.un.org/), d’ici à 2045, la population mondiale devrait augmenter de 1 687 millions de personnes. La population de l’Asie et de l’Afrique augmentera de 1 552 millions de nouvelles personnes, soit la quasi-totalité de l’augmentation mondiale et plus de 3 fois la population totale actuelle de l’Union Européenne.

    Qui sera le plus en difficulté ? La Chine coupée de l’Europe ? ou l’Europe, coupée de l’Asie ?

    Une fois les connections entre Russie et Europe coupées ou réduites, quelles seront les routes commerciales accessibles pour l’Europe pour accéder aux marchés asiatiques ? Par voie terrestre, si on ne passe pas par la Russie, il faut passer par la Turquie. On comprend pourquoi l’Allemadne a tenu à ne pas fâcher Erdogan. Ensuite, il y a la voie maritime du canal de Suez, qui emprunte ensuite la Mer Rouge et le Gorlfe d’Aden. Zone instable, fragile et déjà très empruntée. Zone qui sera demain bordée de géants, à commencer par l’Egypte dont on prévoit qu’elle compte 150 millions d’habitants en 2045.

    L’Amérique n’a pas fait mystère de son projet de “pivot vers l’Orient”, qu’elle nomme officiellement région “Indo-Pacifique”. Pour pouvoir se tourner vers cette zone, il fallait au préalable que les USA s’assurent que l’Europe qui cessait d’être la priorité de son investissement géopolitique et militaire ne devienne pas un concurrent ni ne tombe sous la coupe de son ennemi désigné, l’Eurasie Chino-russe. Grâce au pourissement final de la crise ukrainienne et avec le soutien des idiots utiles du moment, le couple Scholz – Macron, c’est fait. L’Europe est sur la touche (pour le dire gentiment) comme acteur du jeu géopolitique mondial pour les 20 ou 40 ans qui viennent.

    Répondre
  • Daniel Arias
    Daniel Arias

    Les soldats de la 53 brigade ukrainienne déposent les armes et demandes aux autres soldats de faire de même.

    https://youtu.be/aS4L0LcIrTY

    Répondre
    • Jeanne Labaigt
      Jeanne Labaigt

      Je viens de regarder les commentaires qui suivent cette video.
      Il y en a un qui dit en substance: Vous et nous avions une seule patrie l’URSS.
      toutes disent vous êtes des braves, vous méritez de retourner après de vos pères et de vos enfants.
      Tout à fait dans le ton de ce que dit le texte de Ziouganov mis en ligne plus haut par Danielle:
      Ziouganov : “Tout doit être fait pour établir la paix en Ukraine et au Donbass”.

      Répondre
  • Daniel Arias
    Daniel Arias

    Les forces populaires de Donetsk progressent dans le reconquête du Donbass.

    https://youtu.be/ckeqPqbDxGs

    P.S: Le bataillon Azov encerclerai Mariupol, espérons que ce soit la tombe de ces nazis.

    Répondre

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée.

La modération des commentaires est activée. Votre commentaire peut prendre un certain temps avant d’apparaître.