Ce n’est peut-être pas ce dont traite le film mais c’est de cela dont chacun meurt à sa manière pour n’avoir pas osé exhumer le cadavre et s’être compromis dans le silence et la fête autour de ce silence… Ne pas croire surtout que la majorité de la jeunesse espagnole et européenne en est à ce degré de conscience. (note de Danielle Bleitrach pour histoire et société)
“Pourquoi les pères de la constitution ont laissé mon grand-père dans une fosse ?”.
Voilà la question que se posent de jeunes espagnols.
46 ans sans justice pour les victimes du fascisme et leurs enfants.
Castellon:71, Valencia; 184, Alicante: 44
299 C’est le nombre de fosses connues uniquement autour de Valencia.
Valencia ou ce mois de décembre est fouillée la fosse numéro 127 où l’on recherche 170 assassinés.
Oui, il reste encore des fosses inconnues en Espagne adhérente de l’UE et de l’OTAN, les bourreaux et assassins franquistes n’ont pas dévoilé les lieux de leurs massacres.
Andalousie au moins 45 566 assassinats dans 708 fosses communes.
Asturies 324 fosses.
Aucune région n’est exempte de fosses communes.
L’Espagne compte plus de 4200 fosses et encore plus de 100 000 disparus.
Sans compter les victimes transportées au “Valle de los Caidos”.
Lieux enfouis invisibles aux touristes venus se prélasser sous le soleil espagnol.
Pendant ce temps les Républicains continuaient à être présentés comme des bandits et des violeurs dans les écoles. Jean Ortiz, un camarade du PCF qui travaille sur la mémoire me racontait comment lors d’une de ces interventions dans l’Université de Santander les jeunes étudiants ignoraient une bonne partie des massacres commis par les franquistes et avaient une vision déformée de la Guerre d’Espagne.
Dans le même temps fin des années 2000, Mola était à nouveau présent dans les librairies espagnoles.
Emilio Mola: “Il faut semer la terreur… Il faut donner le sentiment de domination en éliminant sans scrupules ni hésitations tous ceux qui ne pensent pas comme nous. Pas de lâchetés”.
Selon le journal el Mundo l’Église espagnole coûtait entre 7 et 10 milliards d’euros par an à l’État (2011). Église alliée à la monarchie et au franquisme, à de très rares exceptions, présentée comme la grande victime des “rouges”.
Des fosses qui ont été remplies également dans les années suivant la fin de la guerre.
Et la terreur et le silence se sont imposées dans les familles avec l’Église pour veiller à l’éducation des futures mères, dans la culpabilité et la soumission, pour produire une génération d’enfants dociles.
Du côté de ma mère son oncle et son épouse, instituteurs dans un village proche de Burgos, se sont cachés dans l’entresol d’une maison à l’arrivée des franquistes. Ils ont été découverts embarqués dans le camion qui s’est arrêté au bout du village où ils ont été exécutés.
Leur seul crime être instituteurs de la République. Je n’ai jamais su leurs noms.
En Espagne de nombreux oubliés ont pour sépulture une fosse démocratique.
Ce que Pablo Hasel dénonce également: la fausse transition démocratique où les mêmes dirigeants restent au pouvoir, où Santiago Carrillo, remplaçant de la valeureuse Dolores Ibarruri, va appuyer la “transition démocratique” et s’éloigner de l’Union Soviétique, quoi d’étonnant pour un ancien militant des jeunesses socialistes. De plus dans les Asturies il ne pouvait pas ignorer le mouvement communiste mené par los terceristas qui vont fonder le PCOE bien implanté dans cette région et au Pays Basque. Il reconnaîtra également le monarque imposé par Franco sous le gouvernement d’Alfonso Suarez chef de la Phalange, ceci en échange de la reconnaissance du PCE.
La continuité c’est aussi les commissaires de la police politiques qui continuent leur carrière comme Claudio Ramos Tejedor qui interrogeait les résistants avec le révolver posé sur le bureau.
Un flic qui commence sa carrière dans la ville où croupis aujourd’hui Pablo Hasel, LLeda (Lerida).
Il est ambitieux et ose en 1947 aller en zone de guerre, dans les Asturies, où il commence dans les bureaux et demande très rapidement à rejoindre la Brigade Sociale, c’est la brigade la plus dangereuse, l’équivalent de la Gestapo. Seuls les flics punis étaient envoyés dans les Asturies.
Ramos s’illustrera dans la capture des derniers guérilleros et surtout dans la répression des grèves de 1962. Il faisait surtout preuve de courage accompagné de son bourreau Fuente une brute qui frappait à sa place et en qui il avait totale confiance.
Il sera responsable de la mort de Tina Bayon, morte des suites des tortures en 1965.
Aucun de ces tortionnaires ne sera jugé en Espagne.
(Voir sa bio en note plus bas)
Nous sommes des milliers de descendants, petits-enfants de combattants de la Guerre d’Espagne, ou enfants des persécutés de l’après guerre lors des mouvements sociaux de 1962, disséminés partout en Europe. Jamais nos parents n’ont reçu la moindre réparation, nous avons été arrachés à nos familles avec parfois des interdictions de retour dans certaines régions.
Et ce sont parfois des blessures profondes qui se transmettent y compris à ceux nés dans l’exil. Même si un jour la justice est rendue rien ne réparera la déchirure, les familles détruites, rien ne remplacera les liens que l’ont a pas pu tisser avec notre famille.
La demande en réparation et de justice se fait à 10 000km d’ici en Argentine.
C’est le sujet d’un film produit par Pedro Almodovar “Le silence des autres”.
“Dans le drapeau de la liberté, j’ai brodé le plus grand amour de ma vie.”
Cette phrase est écrite sur le Mur des Libertés à Lièges, suite à une initiative de descendants de réfugiés espagnols en Belgique.
En 2022, La Falange (espagnole) de las JONS a un site Internet actif.
La charte graphique ne prête à aucune confusion.
Il proposent leur aide au lumpen proletariat prêt à se vendre, c’était déjà une des méthodes de leur fondateur Primo de Rivera. Tout cela sous la protection de la Vierge Marie et sous une couverture national syndicaliste. Un discours potentiellement dangereux dans une Espagne saignée par le chômage, la désindustrialisation et l’inflation.
“Ce qui me parait terrible c’est l’indifférence des gouvernements d’Espagne et de toute la classe politique au sort des victimes de Franco et à la souffrance des familles qu’ils ont laissées derrière.”
“Lo que me parece terrible es la indiferencia de los gobiernos de España y de toda la clase política por la suerte de las víctimas de Franco y el sufrimiento de los familiares que dejaron atrás”
Baltasar Garzón
http://memoriahistorica.dival.es/recursos/mapa-de-fosas/
https://www.elmundo.es/elmundo/2011/05/31/espana/1306858266.html
https://www.elplural.com/sociedad/religion/la-iglesia-catolica-recibe-mas-de-11-000-millones-anuales-del-estado_31031102
La policia se llama Claudio Ramos:
https://helicon.es/dig/499/fouz02.pdf
Témoignages de la torture faite par Claudio Ramos:
https://www.nortes.me/2020/05/08/asturies-tambien-tuvo-sus-billy-el-nino/
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