Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

A propos du “Le Vol de Piatakov. La collaboration tactique entre Trotsky et les nazis”

Je n’ai pas encore lu le livre dont nous parle ici Aymeric et que les éditions Delga viennent de publier(1) mais je fais confiance à sa probité et au sérieux de l’équipe de Delga pour offrir aux lecteurs d’histoire et société cette vidéo de présentation… qui devrait vous inciter comme cela m’incite à lire ce livre, qui comme ceux d’Annie Lacroix-Riz, sont incontournables quant à la méthode. Je me permets après cette vidéo et à travers un dialogue avec Aymeric Monville de resituer l’importance de ce travail dans la configuration politique actuelle.

de ce livre Aymeric dit “Il s’agit de notre livre le plus important quant à ses conséquences politiques concrètes et immédiates : la disparition de la légitimité de la scission trotskyste dans le courant léniniste. Merci de le lire attentivement et d’en parler abondamment autour de vous.” dans une conversation récente, il a précisé: “

Le livre évidemment le plus incontournable (et à mon avis le plus concluant) sur la question me semble celui que nous venons de publier : “Le Vol de Piatakov. La collaboration tactique entre Trotsky et les nazis” de Burgio, Leoni et Sidoli, dont l’objectif est d’étudier les éléments qui corroborent, dans les archives Trotsky notamment mais aussi dans les contradictions internes à d’autres sources trotskystes, l’énoncé du second procès de Moscou.
Mais il faut laisser sans doute le temps aux lecteurs de le découvrir. J’avais personnellement averti Jean-Jacques Marie, qui lit certainement l’italien, de la traduction de ce livre en français il y a plusieurs mois de cela.
Lors de la parution de l’ouvrage original, Marco Ferrando (le Besancenot local) s’était risqué à une réponse, et il faut s’en réjouir, même s’il s’est emmêlé les pinceaux au sujet des archives utilisées. Il ne s’était néanmoins pas aventuré à expliquer pourquoi Trotsky s’est subitement mis à rompre des lances (avec pas moins de quatre articles) pour l’indépendance de l’Ukraine dans une période aussi lourde de sens que celle comprise entre avril et septembre 1939. Vu la date en question, il ne me semble pas que cette proposition soit vide se sens.

Le second point en appui du premier est qu’en revanche non seulement je sais l’importance pour les communistes et plus généralement les recherches marxistes des éditions Delga mais j’ai lu son court livre sur Staline et je pense que nul ne devrait parler de cette question sans avoir pris la peine d’avoir lu cet opuscule de moins de 200 pages, deux gros articles qui fournissent des précisions irréfutables sur en particulier la répression stalinienne, un travail non hagiographique mais incontournable; la vidéo publiée est dans le même esprit ; Il ne s’agit pas de reprendre les procès de Moscou et de les défendre mais il s’agit de la traduction d’un dossier italien qui fait état de preuves vérifiables y compris de travaux des recherches anglo-saxonnes et dans les archives Trotski reprises mêmes par Pierre Broué : qui dit Pierre Broué dit sans doute le meilleur spécialiste mais aussi disciple de Trotski.


Parler de lui comme le fait Aymeric dit le fond de l’entreprise éditoriale de Delga. Je m’explique : j’ai connu pierre broué quand j’ai donné des cours à l’insitut de sciences po Grenoble, dans les années 69 et 70. il fit tout pour empêcher que je sois nommée au poste auquel je postulais alors à Grenoble alors que je subissais une répression à UIII de la part du doyen debbasch qui a très mal fini, on le sait, et qui ne voulait pas plus d’une communiste. Broué n’ignorait rien du contexte de répression que je subissais en tant que communiste et syndicaliste mais il a néanmoins bloqué ma candidature. J’ajouterai que mes cours étaient très suivis et les amphis de 300 personnes débordaient, il m’envoyait de jeunes disciples contredire le cours que je faisais sur Gramsci, l’Etat et les modes de vie ouvrier et j’ignorais tout de la plupart des individus avec lesquels mes jeunes contradicteurs prétendaient me mettre en défaut mais je leur faisais remarquer gentiment qu’ils étaient hors sujet… Les conditions étaient donc réunies pour qu’une solide haine s’installe entre nous et pourtant il n’en fut rien… Paradoxalement entre Broué et moi était née une estime réciproque de ces circonstances difficiles et il plusieurs fois témoigné ultérieurement, ma candidature écartée par ses soins, en la faveur de mon ouverture d’esprit et de mon sens du débat.

Je crois qu’Aymeric a raison quand il dit qu’il faisait partie d’une petite partie de personnes pour qui l’antistalinisme justifiait tout. C’était une sorte de “jésuite” en disant cela, je pense au personnage de Thomas Mann de la Montagne magique dont on dit qu’il fut inspiré par Lukacs, et si mes relations furent plus distantes et moins amusées qu’avec ben Said, nos échanges furent toujours de qualité… Plus tard, je n’ai jamais craint de publier des trotskistes y compris dans Révolution et dans ce blog quand il y avait apport, même avec des incidences polémiques que je ne partageais ; je sais que les exigences d’Aymeric sont de même nature.

Je transcris ici la réponse d’Aymeric (2) , elle plaidera mieux que je ne saurais le faire pour l’esprit de ce livre pourtant “à charge sur les relations tactiques entre Trotski et les nazis” et je suis convaincue que comme le dit Aymeric le mouvement communiste ne fera ou refera son unité que quand nous serons en situation de pouvoir échanger non sans passion mais avec des faits sur notre histoire… y compris avec les trotskistes… Parce que nous sommes dans un temps où le débat sur l’histoire est aussi indispensable que possible, avec non seulement les trotskistes mais ceux qui issus de cette mouvance sont prêts à agir autant que d’anciens maos, toutes ces divisions que comme le déplorait Fidel le communisme et les peuples ont payé si cher. Delga, loin des “bondieuseries” et des bigots qui se signent à l’idée d’affronter le politiquement correct médiatique et inculte, inaugure au plan théorique et celui de l’histoire, crée les conditions exigeantes d’un tel débat qui est tout sauf un plaidoyer pro domo.

Quand Aymeric traduit un livre, il se met à travailler le contexte, les autres livres écrits sur le sujet et là Broué est incontournable. Bref la publication d’un livre se fait en un an….

voici donc la réponse d’Aymeric:

Réponse rapide à Danielle, avec mes remerciements et mes salutations fraternelles : sur Broué, je suis admiratif de sa conscience historique l’amenant à dévoiler des éléments qui dérangent son camp (confirmation de l’existence d’un bloc trotskystes-zinoviévistes jusqu’à au moins 1932) et au détour d’une note de bas de page dans sa bio de Trotsky, confirmation que Radek, peu après le putsch fasciste en Espagne, a écrit un article qui constitue « de fait une critique de la politique stalinienne » à propos de l’Espagne (à cette époque, Radek était bien intégré dans l’appareil d’Etat soviétique).  Cette conscience de son métier mettait Broué bien au-dessus des historiens trotskystes actuels.

Bien sûr, il n’ira pas jusqu’à commenter ce qu’on sait désormais par d’autres sources, à savoir que Radek a envoyé ses félicitations à l’attaché militaire allemand à Moscou en mars 1936 pour la remilitarisation de la Rhénanie, tout en condamnant fermement cette remilitarisation dans les Izvestia. Ces informations sur ce double jeu avaient été dévoilées dès 1974 par Francis Ludwig Carsten, à son époque doyen de la recherche britannique en histoire allemande (et nullement un « stalinien »).

En même temps, je reste assez effrayé par le fait que Broué ait continué à rester trotskyste sachant tout ce qu’il savait.  Je pense qu’il faisait partie d’une minorité de personnes pour qui l’antistalinisme justifie absolument tout, d’où son dernier ouvrage « Communistes contre Staline ». « Omnia munda mundis », tout est pur pour les purs. Sauf que nous conviendrons évidemment tous deux;..

LE CONTEXTE INTELLECTUEL FRANÇAIS

cequi m’amène à vous reccommander ces lectures mais aussi les assortir de quelques réflexions générales sur les livres, la création intellectuelle qui suivent:

Aymeric Monville et edmond janssen les éditions Delga auront sauvé l’honneur non seulement des marxistes et des communistes français mais d’une pensée intellectuelle proche de l’asphyxie en France aujourd’hui. Il m’arrive en contemplant le paysage éditorial et le débat d’idées médiatique se songer à jean christophe de romain Rolland (on sait qu’il fut courronné du prix de la “vie heureuse” ce qui pourrait être avec beaucoup d’optimisme l’espérance d’un possible renouveau actuel).Pourquoi Jean Christophe parce que dans ce roman initiatique d’une illusoire réconciliation pacifique entre la France et l’Allemagne, le héros un jeune musicien décrit la véritable fange intellectuelle des temps. qui sont les siens. Des noms aujourd’hui oubliés du roman colonialiste, des friponneries du demi-monde et du théâtre déjà de boulevard, me font songer aux gloires dont un pouvoir qui ne sait qu’exalter les médiocres ambitions et les fausses audaces tandis que la censure baillonne tous les véritables non conformismes. Quand cela a-t-il commencé ? J’ai tendance à faire remonter cette déchéance à Mitterrand qui mit en scène avec jack Lang les paillettes et strass, la courtisanerie, et refusa les funérailles nationales à Aragon … A ce propos, son digne successeur macron les réserve à jonnhy Halliday et Jean Pierre Belmondo… Mais passons et revenons- en à mon propos…

Donc nous sommes dans un temps assez proche de celui décrit avec écoeurement par Jean Christophe… Les communistes, l’ai-je assez proclamé avaient eu l’immense mérite non seulement de donner leur vie contre le nazisme qui était dans la logique de cette infamie d’un dévoiement moral et intellectuel, des “polissonneries”, de l’étouffoir à la chambre à gaz vers lequel fut conduit Robert Desnos, après avoir été dénoncé à l’occupant par Céline… à qui l’on a pardonné Bagatelle pour un massacre alors que l’on ne pardonne toujours pas à Aragon, le crève coeur et “hourrah l’Oural!” obligeant l’immense écrivain et homme de culture que futAragon, (auquel céline enfermé dans sesobsessions ne vient pas à la cheville quel que soient ses mérites stylistiques), à être condamné à faire pénitence à travers une éternelle vieillesse coupable et repentie… Lui l’insolent, lui dont non seulement le style mais la lucidité que l’on retrouve dans ses écrits de journaliste de Ce soir,publié également par Delga, lui le découvreur de talents et celui qui nous fit partager le génie de Matisse, de Godard et de tant d’autres, lui qui passa l’essentiel de sa vie à unir la France à des littératures inconnues d’Asie centrale, à rassembler les intellectuels autour d’un projet de civilisation dans lequel leur oeuvre existerait à part entière… Allons un écrivain ce sont des mots agencés de tel sorte qu’un nouveau réel en surgit mais l’oeuvre c’est aussi celle qui dit ce que fut un siècle et celui d’Aragon a à jamais vaincu celui qui aurait pu être celui de Céline… Aragon redevient cequ’un jour il sera à nouveau et plus seulement un vieillard luttant contre la maladie qui le diminue et qui reste, j’en témoigne, celui qu’il a toujours été, haissant Mitterrand et toutes les compromissions auquel cemédiocrecorrompu et corrupteur vouait les intellectuels…

J’ai vu ignorer tout cela et ne m’en suis point consolée… la médiocrité a étouffé tous les cris vrais! Est-ce que quelque chose pourra être sauvé du naufrage?

Il y a des films, je vous en parle(3), des expositions, à travers les traductions de marianne, les textes de collaborateurs du monde entier, je tente de remonter le courant de la macronie et de la contamination mitterrandienne, mais c’est difficile et parfois le découragement me gagne… Les communistes ont si peu de colère et se contentent de si peu;..

il est donc du devoir de ce blog de vous signaler ce qui manifeste ce plus, cette colère qui ne vitupère pas mais cherche à dégager un peu de vérité de la masse de gravats éditoriaux et autres sous lesquels nous sommes enfouis; c’est là que je reviens à Aymeric monville et à Delga à l’audace intellectuelle dont ils font preuve. Comment dire ?

Dans des temps où l’on peut tout écrire en matière de réhabilitation des collaborateurs dont on vante les qualités littéraires en passant pas l’indispensable dit-on publication de mein kampf, il y a un interdit unaniment respecté en france : oser, non pas faire l’apologie de staline mais oser dire qu’il a accompli de grandes choses dont les Russes et d’autres peuples lui sont éternellement reconnaissants autant qu’ils sont indignés, le mot est faible de le voir confondu avec la barbarie qu’il a puissament contribué à vaincre:le nazisme.

A ce jour, il s’avère que je n’ai pu dépasser la cinquième page le livre d’un dirigeant communiste parce qu’il se croyait obligé avant toute chose de dénoncer le stalinisme… il m’est tombé des mains… cela ne changera rien à mes choix politiques vu l’offre à la présidentielle, mais c’est intellectuellement que je suis étranglée par ce conformisme au politiquement correct d’une époque historiquement incorrecte… un livre c’est un livre et j’appartiens encore à cette civilisation dite Gutenberg, celle de l’importance de l’imprimé et du livre que l’on peut aborder de tant de manières à la fois parce qu’il se présente à la fois comme un tout et des possibles infinis d’entrées, ce qui n’est pas le cas des écrits sur ordinateur. Ce paragraphe affirmant la nécessité de ne pas être “stalinien”bloquait tout le reste tant il relevait d’un fétichisme politique… “je sais bien mais quand même!” j’ai vécu pendant trente ans ces gens-là s’affirmant anti-staliniens et démocrates avant tout pour mieux pratiquer comme leurs frères bourgeois et exalter ce qui était admis par la dite bourgeoisie encensurant comme eux toute rébellion véritable et possibilité d’une “dictature du prolétariat”. Je les ai vécus ces gens-là diffamant, inventant des méfaits imaginaires et traitant de “staliniens” ceux qui simplement voulaient rétablir la vérité ou du moins leur vérité… et j’en vois les tragiques résultats, l’absence de mémoire de lajeunesse, son difficile positionnement dans les luttes, l’avancée de tous les négationnismes et la faiblesse à la fête de l’humanité de ce que l’on considère comme le marxisme,une pensée appauvrie, conformiste avec des tabous étrangers à marx et des complaisances indignes…

Alors quand je vois quelqu’un dire qu’il est communiste mais pas “stalinien” c’est de l’ordre du réflexe conditionné je sais que nous ne sommes pas sortis de l’auberge espagnole chère à Franco et à ses sucesseurs, celui d’un diktat européen dans lequel le néo-nazisme s’étale y compris sous influence allemande;

politiquement je comprends qu’il faille de la patience,il faut tenir compte de l’état catastrophique d’une jeunesse sans mémoire, désorientée, au plan tactique mettre les pires, les vendus en minorité et peu à peu à travers les luttes laisser se construire d’autres exigences et je partage l’attitude de ceux qui agissent ainsi… Mais intellectuellement c’est plus fort que moi c’est impossible, c’est d’ailleurs la raison qui en avril dernier m’a fait renoncer défintivement à mon appartenance au parti communiste français… je n’en avais plus la patience nécessaire etj’aspirais à la liberté de ce blog, sans renoncer au contraire aux fidélités.

tout cela pour dire à quel point je suis reconnaissante à Delga età Aymeric Monville qui nous offre périodiquement des produits intellectuellement irreprochables qui vont totalement a contrario de “l’air du temps” , celui où l ‘on ne craint pas une monstrueuse équivalence entre Staline et Hitler pour mieux réhabiliter tout ce qui a été produit et construit sous l’égide de ce dernier et l’utiliser comme une arme anti-communiste. Il y a non seulement du courage tranquille chez Aymeric, mais c’est celui d’un intellectuel qui choisit de parler en sacrifiant sa notoriété . Un véritable intellectuel face à tous les pouvoirs, mais il y a une attitude consciente que je partage: à savoir que ceux qui croient être accepté avec un communisme assorti au galimatia bourgeois – y compris quand, comme aujourd’hui, le prétexte des droits de l’homme et de la démocratie s’effondre en pans entiers – du blocus de cuba à la débâcle afghane- se font des illusions. Ce n’est pas en se proclamant anti-staliniens, en refusant un véritable soutien à Cuba et en mettant en avant leur amour de l’europe, en répercutant les mensonges sur la Chine et leur adhésion par Kurde interposés aux bonnes oeuvres de l’oTAN qu’ils empêcheront la répression de s’abattre sur eux… Aucontraire, s’ils s’opposent si peu que ce soit aux dépenses militaires ou au “réformes” des retraites, aux privatisations, ils seront à leur tout victimes et comme toujours, ceux qui aujourd’hui se divisent et alimentent l’anticommunisme seront peu à peu traqués, interdits, à leur tour, au nom d’une morale de plus enplus étroite et de leur refus si faible soit-il de tout approuver…

C’est là que le courage intellectuel rejoint le courage politique mais sans toujours avoir la force et la capacité de s’imposer… hélas!!! et pour cela terminer par la réaction d’un camarade toujours auparti à la suite de notre échange avec Aymeric:

Salut !Débat essentiel, crucial, actuel.Je remarque qu’Aymeric dit bien Staline/Trotsky…Stalinisme/trotskisme , c’est plutôt un débat “franco-français”.
A mon arrivée à A…… en 2000, j’avais aussitôt proposé un débat sur l’URSS et notre rapport au socialisme en URSS.Réaction des “vieux” : oui, ça fait longtemps qu’on le voudrait ! Réponse des moins vieux qui pilotent la section : oui, on le fera, on invitera … un historien du parti.Tu parles d’une garantie !Le débat n’a jamais eu lieu.Peut-être dans 20 ou 40 ans ?

et pendant ce temps où communistes vieux et un peu moins vieux débattent au sein du PCF pour surtout ne rien dire… le capital et ses appareils inculquent à la jeunesse que communisme et nazisme c’est pareil y compris dans le matériel scolaire,jour après jour;.. et les trotskistes pour la plupart affirment que c’estvrai de vrai mais qu’eux qui n’ont jamais eu le pouvoir nulle part, se divisent sans cesse, feront mieux, le communisme directement et au niveau mondial… avec le résultat habituel: 2% divisé en 3 chapelles…

Donc si vous ne voulez pas attendre encore quarante ans lisez ce que publie Delga, ce livre en particulier mais pas seulement… Je sais Delga est mis à la portion congrue par certains libraires qui ont le monopole dans le parti tout en s’affirmant indépendant, est interdit dans des initiatives, n’est que rarement l’objet de critiques dans l’Humanité et dans la presse qui a renoncé même à se dire communiste, mais justement c’est peut-être un signe…

danielle Bleitrach

(1) quatrième de couverture : Lors du procès de Moscou de janvier 1937, Guéorgui Piatakov, vice-ministre de l’Industrie lourde soviétique de 1932 à août 1936, a reconnu avoir pris en secret un avion à Berlin en décembre 1935, avec l’aide des hitlériens au pouvoir, pour atterrir quelques heures plus tard en Norvège et rencontrer tout aussi secrètement Trotsky dont il prétendait être, depuis la seconde moitié de 1931, un partisan caché et une « taupe » habile, solidement établie au plus haut niveau de l’appareil économique de l’Union soviétique stalinienne.

Piatakov a-t-il dit la vérité sur les événements de décembre 1935, ou était-ce là le fruit d’une horrible machination du pouvoir soviétique à propos d’un prétendu voyage et d’un entretien avec Trotsky n’ayant jamais eu lieu ? Sommes-nous en présence d’un sinistre complot contre non seulement l’innocent Piatakov mais aussi Karl Radek, un autre accusé au procès de janvier 1937, et surtout Trotsky, faussement accusé, par contumace, d’être devenu un « laquais de Hitler » ?

En réalité, c’est à partir de sources et de documents anti-staliniens incontestables, à commencer par les archives de Trotsky à Harvard, qu’est apparue récemment une série de révélations retentissantes qui prouvent de manière concluante la collaboration directe entre les nazis au pouvoir et Trotsky. En particulier, et à l’encontre des théories encore en vigueur sur l’impossibilité pratique du vol, il est maintenant certain qu’en décembre 1935, Piatakov s’est bien envolé avec l’aide des fascistes allemands pour une rencontre clandestine avec Trotsky, avec qui il eut une confrontation dramatique, précisément sur la question d’une alliance tactique avec les nazis.

Les livres d’histoire sur les années 1930 et 1940 devraient donc être largement réécrits, ce qui ne peut avoir que des répercussions évidentes sur la gauche contemporaine. Daniele Burgio, Massimo Leoni et Roberto Sidoli sont des essayistes italiens, auteurs de nombreux livres : Ratzinger o fra Dolcino ? L’effetto di sdoppiamento nella religione occidentale (Ratzinger ou Frère Dolcino ? L’effet de dédoublement dans la religion occidentale) ; Microsoft o Linux ? Scienza, tecnologia ed effetto di sdoppiamento (Microsoft ou Linux ? Science, technologie et effet de dédoublement) ; Leggi economiche universali e comunismo (Lois économiques universelles et communisme) ; Filosofi di frontiera (Philosophes de frontière) ; Pitagora, Marx e i filosofi rossi (Pythagore, Marx et les philosophes rouges.) Le Vol de Piatakov est leur premier livre traduit en français.

872 pages

(2) par parenthèse Radek semble-t-il a eu une influence indéniable en Chine et on sait que ses capacités linguistiques et saconnaissance des civilisations et contextes internationaux autant que sa haine d’hitler, lui ont assuré un statut particulier auprès de staline : certes exclu du CC, il se voit toutefois confier la formation des cadres du mouvement communiste chinois à l’Université Sun Yat-sen de moscou . Recteur en 1926, il y rencontre de futurs cadres de la révolution chinoise comme deng Xiaoping  et liu Shaoqi  …

(3) quand on en est dans la critique cinmatographique en France de pratiquer le contresens pour des raisons politiques à propos d’abord de Rouge que l’on tranforme en un film écologique qui ferait l’apologie des verts, et pire encore quand on refuse de voir que “chers camarades” est un film anti-khrouchtchevien et pratiquement une apologie de Staline par rapport au gauchisme, aux mensonges, aux choix bureaucratiques de son dénonciateurs on est prêt à tout …

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8 Commentaires

  • PacoB

    Merci pour votre article

    quand comme aujourd’hui le prétexte des droits de l’homme et de la démocratie s’effondre en pans entiers

    Ma réplique sur ce sujet à un tweet d’une officine pro CIA et particulièrement anti CCP

    https://twitter.com/PacoBatali/status/1438035666043080712

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  • Smiley
    Smiley

    Orly avant hier. Un dame porte un tee shirt blanc avec une photo de Staline du temps où il s appelait Koba. Tignasse noire ébouriffée barbe de trois jours foulard en laine autour du cou beau gosse yeux sombres front haut. La photo est surmontée de cette phrase ” do you know who is this hipster ?
    J interroge la dame qui n apprécie pas trop mais me dit l avoir acheté à l aeroport de Moscou.
    Je ne sais pas s il y a des tee shirt avec Trotsky en vente à l aeroport de Moscou je crois que non et tant pis pour la mémoire de Mandel qui a pris les vessies de la contre révolution eltsinienne pour les lanternes de la révolution permanente. Tant pis aussi pour la mémoire de Bensaid qui a fêté la même contre révolution avec champagne et alka seltzer.
    Et comme disait ma grand mère les trotskystes c est des communisses qui disent que le communisme c est pas bien.

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  • pedrito
    pedrito

    “Et comme disait ma grand mère les trotskystes c est des communistes qui disent que le communisme c est pas bien.”
    Ha! Ha ! Ha! Ha!!

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  • Xuan

    IL faut signaler les remarquables conférences de Ludo Mertens, notamment : Le trotskysme un courant anticommuniste !
    Voir à 1h de l’enregistrement “ L’organisation d’un courant défaitiste à l’approche de la deuxième guerre mondiale”

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    • Smiley
      Smiley

      Comme il est jeune et quel bel accent belge. L auteur d ‘ un certain regard sur Staline ‘ est droit dans ses bottes et c est tant mieux
      Il me semble que le PTB d aujourd hui lui tourne un peu le dos…
      Puisque on parle d enrichir ce blog pourquoi ne pas constituer des bibliographies sur certains thèmes.
      A propos de Djougachvili il y Martens Losurdo Mavrakis D Astier Harpal Brar Les entretiens avec Molotov le journal de Dimitrov Erofeev et bien d autres…

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      • Danielle Bleitrach

        qu’est-ce que tu attends pour nous proposer une bibliographie ? TU CAUSES, tu causes… POUR le prochain week end par exemple ou même dans 15 jours mais j’aime aussi ton apport culturel,tu es une mine… MAIS pas de mauvais esprit ou très peu…

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        • Smiley
          Smiley

          Je ne peux évoquer que les livres que j ai lu . Aux huit susnommés j ajouterai annie Lacroix Riz Geoffrey Roberts et Glover Furr. Je n ai pas lu à la cour du tsar rouge dont tu faisais grand cas ni Arch Getty ni certainement des tas d autres sur le sujet qui permettraient de constituer une bibliographie des livres pas méchants avec Staline.

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  • jacques delepine
    jacques delepine

    bonjour camarade Danièlle
    je me suis permis de mettre ce bref commentaire sur la page FB des éditions Delga , a propos du “vol de piatakov”:
    “””“le vol de Piatakov-la collaboration tactique entre Trotsky et les nazis”: je viens de clore le second chapitre. Quel régal intellectuel! Apres des propos de grande tenue sur ce que “les 4 décennies de militantisme marxiste de Trotsky” représentait, on en vient à un monument de logique! Il s’agit à partir d’affirmations confirmées et limitées de dévider tout un enchaînement logique de raisonnements, totalement objectif, au sens indépendant des aprioris politiques. Dans le second chapitre on suit les interrogations minutieuses d’un juge d’instruction, mieux encore d’un LOGICIEN attelé à construire ces tables de vérités que l’on manipulait jadis en seconde et qui depuis sont devenus la base, l’introduction des langages binaires. De ces interrogations type
    Un prisonnier est dans une cellule avec deux gardiens. Devant lui se trouvent deux portes. Il ne peut identifier ni les gardiens ni les portes. Une des portes le conduit à la mort, l’autre vers la liberté. Un des gardiens ment toujours et l’autre dit toujours la vérité. Il n’a droit qu’à une seule question adressée à un seul des gardiens (qu’il ne peut distinguer de l’autre, pas davantage que les portes, je le rappelle). Quelle doit-être cette question pour que le gardien questionné lui indique la porte de la liberté ?”

    Et bien nos italiens et leur traducteur posent et résolvent en logicien la question : le vol de Piatakov a t-il eu lieu? c’est brillant, clair, un peu redondant mais la redondance est en l’occurrence indispensable à “la preuve par neuf”. Très bien je retourne à ma lecture et à sa suite.“””
    salut communiste

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