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Allemagne : victoire sur fond de répression par Andrei Doultsev

Alors même qu’à la suite de la pression internationale la Cour constitutionnelle d’Allemagne a annulé l’a décision de la Commission électorale allemande interdisant au Parti communiste allemand (DKP) de participer aux élections du Bundestag en septembre prochain, ce qui est une victoire, la lutte contre le communisme se lance sur une autre proie. L’opération vise cette fois des archives de recherche Hans Litten. En 1931, Hans Litten, un jeune avocat, réussit à convoquer Hitler devant le tribunal de Berlin pour essayer de barrer la route au nazisme. Il y a eu un documentaire sur Hans Litten. Combinant images d’archives, témoignages des proches de Litten et interviews d’historiens et d’avocats, ce documentaire a dévoilé l’immense audace du jeune avocat, qui sera en 1933 envoyé en camp de concentration où il décèdera. Ce contexte est important pour nous Français qui souvent ignorons tout de la résistance allemande. Le fait que de telles archives soient menacées prouve à quel point le communisme et l’antinazisme sont menacés d’interdiction alors que le lit est fait pour le nazisme. (note de Danielle Bleitrach, traduction de Marianne Dunlop)

La Cour constitutionnelle d’Allemagne a annulé une décision de la Commission électorale fédérale : le Parti communiste allemand (DKP) peut participer aux élections du Bundestag en septembre prochain. Dans le même temps, les autorités allemandes ont lancé une opération de répression contre les archives de recherche Hans Litten, proches du mouvement de gauche.

Le parti communiste allemand pourra participer aux élections du Bundestag en septembre. La Cour constitutionnelle allemande a annulé une décision de la Commission électorale fédérale qui ne reconnaissait pas le parti comme une association politique et refusait de l’autoriser à participer aux élections. C’est ce qui ressort d’une copie de la décision du 22 juillet du deuxième collège de la Cour constitutionnelle allemande, qui a été remise au service juridique du DKP mardi.

Le 8 juillet, la Commission électorale fédérale allemande a décidé à la majorité (dix contre un) que le Parti communiste allemand, fondé en 1968, “n’est pas reconnu comme un parti” parce qu’il a tardé à soumettre les rapports de conformité du parti à l’administration du Bundestag au cours des six dernières années. Selon la loi sur les partis politiques, un parti perd son statut si, entre autres, il ne soumet pas de rapport de conformité dans le délai imparti. Dans le même temps, lors d’une réunion de la Commission électorale fédérale allemande, les rapports soumis tardivement par le DKP jusqu’en 2017 inclus ont été reconnus de facto par les commissaires présidés par Georg Thiel : la majorité, y compris les représentants du Parti de gauche, qui ont ensuite voté l’exclusion du DKP des élections, ont interprété la disposition en question de manière à ce que l’admission aux élections s’applique également aux rapports des partis soumis tardivement.

Il est également apparu que le commissaire électoral fédéral n’a pas donné de réponse spécifique et sans équivoque à une question qui lui a été posée par le DKP en septembre 2020, à savoir si le parti est en conformité avec les lois sur les rapports. Cela indique que Thiel voulait garder le DKP dans l’ignorance jusqu’au dernier moment de la révocation du statut du parti et de sa disqualification.

La décision de la Commission électorale fédérale, décrite par les observateurs comme une tentative d’interdire le parti, a été contestée par le DKP devant la Cour constitutionnelle le 12 juillet. La Cour constitutionnelle allemande a statué que si un parti ne dépose pas de rapports de conformité juridique dans un délai de six ans, il n’est pas privé de son statut de parti. Un rapport de conformité tardif ne peut pas être simplement considéré comme un “défaut de dépôt de rapport”. Sur cette base, l’avis du commissaire fédéral aux élections est erroné. Dans l’ensemble, selon la décision du tribunal, la Commission électorale fédérale n’a pas procédé à une évaluation factuelle du parti, ce qu’il est clairement, “ce qui démontre le sérieux de son implication dans la formation de la volonté politique”.

Patrick Köbele, président du DKP, a déclaré à propos de cette victoire : “Cette décision de justice est une gifle retentissante pour le président de la Commission électorale fédérale. La tentative de mettre en danger l’existence du DKP par des “moyens bureaucratiques” a été repoussée. Ce succès est également le fruit de la solidarité avec le DKP, tant en Allemagne qu’au niveau international.”

Au même moment, le service de contre-espionnage allemand “Verfassungsschutz” a lancé une opération de répression contre les archives de recherche portant le nom de Hans Litten, antifasciste, prisonnier de Dachau et victime des nazis, “un avocat du prolétariat”. Les archives sont proches du parti communiste allemand et de la Rote Hilfe (Secours rouge), une organisation de soutien juridique aux prisonniers politiques en Allemagne. Selon le contre-espionnage, le caractère anticonstitutionnel des archives de recherche s’exprime dans le soutien à l’organisation Rote Hilfe, qui est également classée comme une organisation “d’extrême gauche”. Cependant, la seule publication des archives sur les activités de la Rote Hilfe au cours des dix dernières années est une brochure sur la résistance antifasciste de la “Rote Hilfe” dans l’Allemagne nazie des années 30.

Suite à la persécution de l’archive, son président Nikolaus Brauns a lancé un appel : “Au vu de la diffamation dont font l’objet nos recherches et nos activités journalistiques, il nous semble peu important que nous soyons considérés comme une “structure extrémiste”, et encore moins comme un “groupe”. En fait, les archives Hans Litten ne sont ni l’un ni l’autre ; il s’agit d’un institut consacré à la collecte de documents historiques et à la recherche sur les activités du Secours Rouge et des organisations du mouvement ouvrier dans la première moitié du XXe siècle. Oui, travailler avec l’histoire n’est pas une fin en soi pour nous. Nous voulons préserver les expériences et les leçons du passé face à la menace du démantèlement des institutions démocratiques et de la montée de la menace fasciste. Si le contre-espionnage allemand considère cela comme de l’extrémisme, cela témoigne avant tout de la nature de ce service de renseignement. Avec nos avocats, nous examinerons s’il est judicieux d’engager une action en justice contre le contre-espionnage, ou s’il est préférable d’investir nos ressources financières extrêmement limitées dans l’acquisition de documents historiques rares. En tout état de cause, le personnel de nos archives ne tolérera pas les calomnies du Verfassungsschutz et ne permettra pas aux autorités de mettre un terme à nos activités scientifiques et journalistiques. Nous appelons le public démocratique à ne pas permettre au service de contre-espionnage de la République fédérale d’Allemagne d’agir comme un censeur de l’activité scientifique.

Andrey Dultsev

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