Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

Au G7, l’Amérique est de retour, oui mais dans quel état…

Il y avait deux “nouveaux dirigeants” au G7 (1) ouvert ce vendredi : l’italien Draghi et surtout Jo Biden. Draghi symbolise bien des choses, la débâcle des politiques d’austérité et la tentative malgré et à cause de cette débâcle d’imposer une intégration européenne accélérée, une mise en tutelle des nations. Quant à Jo Biden, le président US, il a visiblement choisi de faire du G7 le terrain d’une démonstration de la capacité des États-Unis à consolider l’Occident et à regrouper autour de lui ses alliés contre la Chine et la Russie. L’ entreprise souffre néanmoins de l’état réel du camp en question.

La réunion a été virtuelle et centrée autour de sujets comme la lutte contre le Covid-19, le changement climatique, la reprise de l’économie mondiale, sujets sur lesquels les performances des USA et de ses alliés frisent le désastre. Rouler les mécaniques en prétendant lancer un défi à la Chine encore faudrait-il en avoir les moyens. L’exemple des vaccins à lui seul illustre ce qu’est ce leadership de l’occident et la capacité dont il témoigne à œuvrer dans le sens de solutions pour lui comme pour les autres.

  1. L’épidémie et les vaccins, cas d’école

Selon les données publiées par l’Organisation mondiale de la Santé, le nombre de cas confirmés d’infections par le coronavirus dans le monde a dépassé les 108 millions, augmentant de plus de 300 000 chaque jour, et le nombre de décès a augmenté de plus de 7 700 au cours des dernières 24 heures, dépassant maintenant 2,38 millions. Rien qu’aux États-Unis, selon les données publiées sur le site web de l’Université Johns Hopkins le nombre quotidien moyen d’infections est de 100 000 depuis novembre de l’année dernière, et le nombre total de décès est de près de 500 000 !

Plusieurs milliers de décès auraient pu être évités, le Directeur de l’OMS, le Dr Tedros Adhanom Ghebreyesus, et la Directrice exécutive de l’UNICEF, Henrietta H. Fore ont déclaré qu’environ 130 pays dans le monde avec une population de 2,5 milliards de personnes n’ont pas encore reçu les doses pour les vaccinations primaires contre le COVID-19, et n’ont pas commencé à vacciner leurs citoyens contre le coronavirus. Selon le communiqué, 128 millions de doses du vaccin utilisé à ce jour (plus des trois quarts des vaccinations) sont administrées dans seulement dix pays qui représentent 60% du PIB mondial. Certains pays riches achetant des quantités excessives de médicaments pour aider à lutter contre le COVID-19, mettant ainsi tout le monde en danger.

Cette thésaurisation n’aboutit pas plus à protéger les populations occidentales, là n’est pas leur but. La politique européenne de vaccination ne vise pas à protéger la population contre le COVID-19, mais l’UE a profité de la crise pour promouvoir l’idée d’une Europe fédérale (2). Cette stratégie s’est avérée contre-productive par rapport à d’autres pays qui ont signé directement des contrats d’approvisionnement en vaccins. Autre cas, le Canada, qui a commandé le plus de doses de vaccin par personne en 2020, seulement 1,5 % de la population du pays avait été vaccinée en février. Cela s’explique en grande partie par le fait que les États-Unis forcent leurs partenaires à attendre le vaccin et quoi que proclame au G7 Biden la situation n’est pas près d’évoluer En raison de problèmes d’expéditions et de ses propres pénuries d’approvisionnement, l’UE a également imposé des contrôles à l’exportation qui bloquent le Canada.

Ce qui se passe dans le club occidental prend des allures dramatiques pour le reste du monde qui assiste impuissant à ces jeux de nantis. Des jeux de nantis dans lesquels les profits sont en tête, les gouvernements occidentaux ont consacré des milliards de dollars à la mise au point de vaccins, une course politique au cours de laquelle un certain nombre de cadres et de scientifiques des groupes pharmaceutiques sont devenus milliardaires, avec des effets d’annonce mais peu sont parvenus à maturité”. (3).

L’administration Biden déclare engager 4 milliards de dollars pour COVAX, un programme de vaccination, lors de la réunion du G7 pour les pays en développement, ont annoncé jeudi des responsables américains. Les cas confirmés de COVID-19 des membres du G7 représentent environ 40% du total mondial. La vertueuse indignation de Macron face à la pénurie africaine, ses propositions de partage se heurtent à la réalité celle de l’incapacité à assurer un programme correct à leurs propres citoyens et à obtenir de leurs groupes pharmaceutiques des résultats probants.

Tout cela dans le but d’exclure Chinois et Russes, d’assurer des profits à leur groupe et enfin pour l’UE de renforcer le pouvoir fédéral sur les nations.

2) Ces derniers mois, les pays occidentaux ont été confrontés à une série de crises qui ont remis en cause leur leadership.

Le battement de tambour médiatique autour du”retour” de l’Amérique souffrait de l’état du champion, de ses 500.000 morts du covid-19 et de l’incapacité de son état énergétique le Texas a fournir la plus élémentaire couverture à ses citoyens dans une vague de froid.

Sur le plan de la santé, de l’énergie en matière de survie, comme sur ceux des résultats climatiques, économiques les occidentaux sont arrivés au G7 avec un bilan proche du nul. La démonstration était faite de leur capacité à désorganiser les remèdes tant leur volonté était politicienne, isoler la Russie, interdire le vaccin dont chacun s’accordait à reconnaitre qu’il est le meilleur avec des conditions de production et de distribution optimale. Ce blocage s’est accompagné comme pour la Chine d’une campagne de diffamation dès l’annonce de la possibilité d’existence de ces vaccins alors même que ces mêmes pays organisaient la gabegie pour le monde et pour eux-mêmes.

Il est vrai que ce retour de l’Amérique qui s’annonçait sous de telles auspices n’avait pour seul atout que la menace contre les concurrents- adversaires et ce que l’occident a comme capacité de nuisance. D’ailleurs la réunion du G7 a eu lieu après les réunions des 30 membres de l’OTAN mercredi et jeudi, au cours de laquelle les alliés militaires les plus puissants du monde auraient discuté d’une série de défis, y compris ceux de la Chine et de la Russie. Le secrétaire d’État Biden a également rencontré jeudi virtuellement ses homologues du Japon, de l’Australie et de l’Inde dans le cadre du « Quad ».

Le tout notez-le bien alors que toutes les économies occidentales ne connaitront pas de croissance et que le seul pays encore susceptible de tirer celle-ci est justement désigné comme l’adversaire pour de fort mauvaises raisons.

Dans un discours prononcé lors du sommet virtuel du G7, M. Biden a déclaré : « Nous devons nous préparer ensemble à une concurrence stratégique à long terme avec la Chine » et s’est engagé à relancer le multilatéralisme après quatre ans de politiques « l’Amérique d’abord ». « Je sais que ces dernières années ont tendu et testé nos relations transatlantiques, mais les États-Unis sont déterminés – déterminés – à reprendre contact avec l’Europe, à vous consulter, à reprendre notre position de leadership de confiance », a-t-il affirmé en répétant « L’Amérique est de retour ». Mais ce qui est également apparu c’est l’absence d’un plan concret proposé par M. Biden, alors que la situation pour le moins l’exige, là encore sa seule carte est le retour à la politique d’Obama ce qui n’est une garantie de rien.

Traduisons après Donald Trump, le « club de l’Ouest » a tenté une réouverture pour marquer que le shérif était de retour et qu’il offrait une tournée générale dans le mess avant de partir en expédition punitive. Mais là encore, la déclaration d’intention se heurte à l’état des lieux. Est-ce que les États-Unis sont en situation de reprendre le leadership à la Chine dans la lutte contre le virus, le changement climatique et le commerce multilatéral surtout avec la Russie comme alliée la réponse parait négative.

Donner une image d’unité autour des Etats-Unis le grand éclopé du moment alors que les domaines dans lesquels on tente la démonstration sont ceux où l’on a le plus grand mal à montrer la moindre capacité au leadership, le tout dans un contexte de méfiance réciproque dans lesquels se multiplient les différends commerciaux et les règles de droits de douane entre eux. En fait dans la pandémie, la crise économique la plupart ont renforcé leur dépendance à l’égard de la Chine et c’est cette dépendance qu’ils agitent pour proclamer la nécessité du “défi” assorti bien sûr de l’éternelle référence aux droits de l’homme qui provoque ou devrait provoquer l’hilarité générale.

Sans espérer un tel effet de lucidité chez les médias aux ordres, on peut considérer qu’entre eux cette bande de brigands ne se fait pas d’illusion sur la vertu de l’autre et que cette croisade visant à renouveler l’allégeance des vassaux se heurte aux intérêts concrets de chacun et ce qu’ils ont à gagner avec les USA et avec la Chine. Si les gouvernants peuvent proclamer n’importe quoi, leurs capitalistes les rappelleront à leurs devoirs.

Ce qu’ils peuvent obtenir avec une pression collective c’est de tenter d’imposer une plus grande soumission à des organisations internationales dépendant de leurs financements mais considérer que le Front uni ira au-delà est peu vraisemblable.

On pourra proclamer la nécessité morale de l’union du camp occidental, le parer des vertus démocratiques cela aboutira au caractère vague des conclusions finales dans lesquelles on trouve plus ou moins reconnu le rôle de la Chine dans l’épidémie et le reflet de l’attitude de Merkel : nous sommes alliés certes mais cela ne nous empêche pas de faire des affaires si nos intérêts l’exigent. Du côté de Macron, l’intérêt est européen mais il est clair que Les troupes ne sont pas totalement en ordre de bataille autour des États-Unis.

Sans parler du fait que les proclamations vertueuses concernant la démocratie en Chine et en Russie se heurtent à la manière dont ces Tartuffe non seulement soutiennent partout les amis dictateurs et bellicistes, une liste déjà longue à laquelle on peut ajouter l’Inde et la répression exercée par son gouvernement d’extrême droite, en paraissant ignorer ce qui se passe chez eux.

La Chine qui n’appartient pas au G7, la Russie qui en a été exclue ont une stratégie assez proche : les chiens aboient, la caravane passe, on discutera d’une manière bilatérale étant bien entendu que chacun des larrons joue sa propre partie et qu’il faut tenir compte de ce que celle-ci a besoin ou non de renforcer ses liens avec les USA, ce qui est le cas particulièrement pour le Royaume uni. La France et l’Allemagne grappillent quelques avantages en jouant le double jeu. Pour le Japon le réalisme économique s’oppose au rôle que les États-Unis prétendent lui faire jouer avec la Corée du sud sur le plan militaire. Les Chinois qui ne laissent rien passer aux Australiens envoient par ce biais un message à l’ensemble des pays asiatiques.

Bref la réponse des Russes quand par la voix de Macron on leur a fait miroiter une réintégration dans le G7 redevenu le G8 a été une leçon de réalisme sur la puissance réelle de club de l’occident. Le monde bouge et à choisir le G20 est plus représentatif, mais nous conservons un désir de dialogue avec chacun d’entre vous.

Jo Biden et son fan club dans nos médias serait venu proclamer à ce G7 le retour des USA au multilatéralisme (sous domination US) mais il semble avoir complètement oublié qu’il ne suffit pas de décréter la fin de l’ère Trump et nier l’évolution de ces dernières années. Le monde a effectivement accompli des pas de géant vers le multilatéralisme mais ce n’est pas celui que Jo Biden prétend restaurer.

Danielle Bleitrach

(1) Le Groupe des sept (G7) est un groupe de discussion et de partenariat économique de sept pays réputés en 1975 pour être les plus grandes puissances avancées du monde qui détenaient alors environ les 2/3 de la richesse nette mondiale puis 45 % en 2019 : AllemagneCanadaÉtats-UnisFranceItalieJapon et Royaume-Uni. Le groupe rassemble 7 des 10 pays avec le plus important PIB du monde, avec l’absence de la Chine qui occupe le 2e rang. Le sommet du G7 réunit chaque année les chefs d’État ou de gouvernement de ces pays, ainsi que les présidents de la Commission et du Conseil européens (ainsi que, pour certaines activités, des représentants d’autres pays ou d’autres unions internationales, invités à participer). Le G7 est considéré comme le groupe impérialiste dont la vocation affirmée et de dominer la planète.

(2) Les choses vont si mal que certains hauts fonctionnaires sont appelés à démissionner. En particulier, de graves plaintes sont déposées auprès de l’organe exécutif de l’UE, la Commission européenne, en raison de son incapacité à lutter contre le coronavirus. La présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, a même été convoquée au Parlement européen, qui lui a demandé d’expliquer ses actes et de démissionner.

(3) « En tant que composante constitutif de l’établissement, les producteurs de vaccins ne font l’objet d’aucune critique; et personne ne les punira pour leurs méfaits », a souligné le Washington Post. « Ils sauveront la face (et leur modèle d’affaires). Les données montrant comment leurs produits ne sont pas efficaces seront modifiées et présentées sous un jour favorable. Ensuite, ils proposeront de développer des boosters pour différentes options du vaccin – qui seront aussi inefficaces dans la lutte contre le COVID-19 que leur vaccin original »

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