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Dieu me pardonne c'est son métier

Le sombre passé d’Avril Haines, nouvelle directrice nationale du Renseignement américain

Le sombre passé d’Avril Haines, nouvelle directrice nationale du Renseignement américainpar LesCrise

Source : Consortium News, John Kiriakou

Traduit par les lecteurs du site Les-Crises

Il y a actuellement au sein de l’administration et des nominations une lutte entre la tendance disons de Bernie Sanders et celle de Clinton et des néo-conservateurs. Dans certains domaines clés ces derniers imposent malheureusement leurs candidats alors qu’il est fait grand bruit sur le sociétal. Il en est ainsi des lieux d”influence des principaux lobbies et parmi eux le complexe industrialo militaire, quand un de ses candidats trop voyant est obligé de s’écarter, celui ou celle qui prend sa place ne vaut guère mieux. Donc sans grande illusion mais toujours en refusant la politique du pire appuyons leur dénonciation (note de Danielle Bleitrach)

Il y a trois domaines controversés où Avril Haines s’est fait un nom et pour lesquels elle devrait répondre lors d’une audience de confirmation.

La Maison Blanche avec les décorations de Noël de 2020. (Maison Blanche, Flickr)

L’ancien directeur par intérim de la CIA, Mike Morell, qui a prétendu pendant des années avec malhonnêteté qu’il n’avait rien à voir avec le programme de torture de l’agence, mais qui a continué à le défendre, s’est retiré de la course pour devenir le nouveau directeur de la CIA du président élu Joe Biden.

Cette décision est une victoire pour le groupe pacifiste Code Pink, qui a été le fer de lance du mouvement Stop Morell, et c’est une excellente chose pour tous les Américains. Mais maintenant, nous devons nous préoccuper de la candidate de Biden au poste de directrice du Renseignement national (DNI), Avril Haines.

Sur le papier, Haines est certainement qualifiée pour diriger la communauté du renseignement. Collaboratrice de longue date de Biden, elle a la confiance du président élu. Mais cela ne suffit pas. Haines est exactement le genre de personne qui ne devrait pas être en position d’autorité dans le domaine du renseignement. Elle est le genre d’apologiste du renseignement néolibéral auquel beaucoup d’entre nous s’opposent depuis tant d’années. Mais ne me croyez pas sur parole. Regardez son palmarès.

Haines a commencé à travailler pour Biden lorsqu’elle a occupé le poste d’avocate générale adjointe de la Commission des relations étrangères du Sénat, sous la présidence de Biden. Lorsqu’il est devenu vice-président en 2009, Haines a rejoint le département d’État, où elle était conseillère juridique adjointe pour les questions relatives aux traités. Après seulement un an, elle est arrivée à la Maison Blanche, où elle est devenue assistante adjointe du président et conseillère juridique adjointe du président pour les affaires de sécurité nationale, le procureur général du Conseil national de sécurité.

Avril Haines, au centre, avec le président Barack Obama à droite, et d’autres collaborateurs, le 13 juillet 2015. (Flickr, Maison Blanche, Pete Souza)

C’est une jolie situation. Cela signifie que son travail consistait à justifier légalement les décisions du président Barack Obama sur des questions de renseignement telles que les attaques de drones et la publication ou non du rapport de la CIA sur la torture. Elle y a servi sous les ordres du directeur de la CIA, John Brennan. Obama a apparemment aimé son travail, car en 2013, il a nommé Haines directrice adjointe de la CIA.

Haines a été la première femme à être nommée directrice adjointe de la CIA, et elle a de nouveau servi sous Brennan, qui a prouvé à maintes reprises qu’il n’était pas favorable à la surveillance par le Congrès. L’attitude de Haines était similaire à celle de Brennan : la CIA faisait ce qu’elle voulait, comme elle l’a toujours fait, et elle ne s’en excuserait pas.

Il y a eu trois domaines controversés où Haines s’est fait un nom et pour lesquels elle devrait répondre lors d’une audience de confirmation : le refus de la CIA de publier le rapport du Sénat sur la torture et la décision de pirater le système informatique de la commission sénatoriale du renseignement ; la décision de la CIA de ne pas punir les agents qui ont effectué le piratage et qui ont tué et torturé des prisonniers au-delà même de ce que le département de la justice a déclaré être permis ; et le programme de drones du gouvernement, dans lequel des centaines, voire des milliers de civils ont été tués.

Des « pilotes » de drones manoeuvrent un drone MQ-1 Predator pour un raid au Moyen-Orient. (Armée américaine)

La dissimulation de la torture par Haines

Vous vous souvenez peut-être qu’en décembre 2014, le personnel démocrate de la Commission des relations étrangères du Sénat a publié une version fortement expurgée du résumé du rapport sur la torture de la commission, résultat d’années d’enquête utilisant des documents de source primaire de la CIA. Le résumé faisait environ 525 pages, soit une fraction seulement des quelque 6 000 pages du rapport complet. Et la publication de ces 525 pages a été le résultat de longues négociations entre le comité et la CIA.

Au final, le public a appris quelques détails sur ce que les prisonniers de la CIA ont subi dans les prisons secrètes du monde entier. Mais l’histoire complète n’a jamais été rendue publique. Il est probable qu’elle ne le sera jamais. Et cela grâce à Avril Haines.

La sénatrice Dianne Feinstein en 2010. (Steve Jurvetson, Flickr, CC BY 2.0, Wikimedia Commons)

Plus tôt cette année-là, Dianne Feinstein, alors présidente de la Commission du Renseignement du Sénat, s’est exprimée au Sénat de manière très inhabituelle et a accusé le directeur de la CIA, Brennan, d’espionner les membres du personnel de sa commission. Plus précisément, Feinstein a déclaré que des agents de la CIA avaient piraté les ordinateurs du Sénat pour voir sur quoi les enquêteurs de la commission se penchaient.

Le piratage était sans précédent, et Feinstein l’a transmis au Département de la justice pour qu’il engage des poursuites. Le procureur général Eric Holder a cependant choisi de ne pas poursuivre. Brennan a pris la responsabilité d’ordonner le piratage et il ne s’en est pas excusé. Mais sa principale adjointe, son assistante, sa conseillère juridique tout au long de l’épisode était Avril Haines. Elle n’a jamais expliqué ses décisions de soutenir le piratage.

De plus, c’est Haines qui a passé outre l’inspecteur général de la CIA et qui a décidé de ne pas punir les agents de la CIA qui ont piraté les ordinateurs du comité, ou ceux qui sont allés au-delà de ce que le ministère de la Justice avait autorisé dans son programme Enhanced Interrogation Techniques, [techniques d’interrogatoire améliorées, NdT] tuant et mutilant des prisonniers.

En fin de compte, non seulement aucun agent de la CIA n’a été puni, mais les dirigeants et les agents les plus importants du programme de torture ont été promus, dans certains cas à des postes parmi les plus recherchés de la CIA. Je sais que c’est vrai. J’ai travaillé pour eux.

Haines et les drones

Un domaine dans lequel Haines n’a guère reçu de couverture médiatique, est son rôle dans le programme de drones. Lorsque Haines était la meilleure avocate du Conseil national de sécurité, Brennan était le gardien de la « liste des personnes à abattre ». C’est Haines qui prenait le téléphone au milieu de la nuit pour lui demander l’autorisation légale – la permission – de lancer des attaques de missiles à partir de drones. Elle n’a jamais répondu de ses actes.

Le moment est venu pour les Américains de mettre le holà sur les personnes nommées par Biden à la sécurité nationale. Morell était tout à fait inapte pour un poste de haut niveau dans l’appareil de sécurité nationale de Biden. Haines l’est aussi. Elle a, tout simplement, commis des crimes contre l’humanité. Je ne me fais pas d’illusions sur le fait que Biden soit progressiste ou qu’il sera très différent des précédents présidents démocrates en matière de sécurité nationale.

Mais je crois que le mal est le mal. Avril Haines est exactement le genre de personne que nous ne voulons pas voir diriger la communauté du renseignement. C’est le moment pour les opposants à sa promotion de faire pression sur les sénateurs de la Commission du renseignement. Il est encore temps de la défaire.

John Kiriakou est un ancien agent de la CIA chargé de la lutte contre le terrorisme et un ancien enquêteur principal de la Commission des relations étrangères du Sénat. John est devenu le sixième lanceur d’alerte mis en accusation par l’administration Obama en vertu de la loi sur l’espionnage – une loi destinée à punir les espions. Il a purgé 23 mois de prison suite à ses tentatives de s’opposer au programme de torture de l’administration Bush.

Source : Consortium News, John Kiriakou, 29-12-2020

Traduit par les lecteurs du site Les-Crises

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