Contre la « raison anesthésiée » du capitalisme, il s’agit de développer une autocritique dialectique indissolublement liée à un programme d’action qui corrige les déficiences à court, moyen et long terme. C’est ce que nous tentons ici, de plus en plus nombreux, engagés et indépendants, communistes de diverses manières mais sans adhérence avec ceux qui fabriquent armes et divertissements. (note de danielle Bleitrach)
Nombreuses sont les méthodes et les intérêts que les bourgeoisies ont mis au point pour « anesthésier » la force mobilisatrice et révolutionnaire du peuple
Auteur: Ferdinand Buen Abbad | informacion@granmai.cu
25 novembre 2020 17:11:07
Nombreuses sont les méthodes et les intérêts que les bourgeoisies ont mis au point pour « anesthésier » la force mobilisatrice et révolutionnaire du peuple.
Elles y destinent des sommes colossales, et c’est l’un des fronts les plus impitoyables de la guerre de classe menée par le capitalisme. Nous ne nous lasserons pas de le répéter.
« L’idéologie de la classe dominante » affirme qu’elle a entièrement raison de nous mentir, de nous désorienter, de nous enivrer, de nous droguer, de nous donner des complexes et de nous humilier de mille manières.
Ils disent qu’ils le font pour notre « bien », que nous sommes comme de petits animaux qui ont besoin de la main du maître pour savoir suivre le chemin du « bien », autrement dit le chemin qui multiplie les biens de la bourgeoisie.
Dans l’ordre de ses priorités suprêmes, dans la défense de la propriété privée et des valeurs hégémoniques de classe, la bourgeoisie recrute des outils et des mercenaires spécialistes en perforage des têtes dans lesquelles elle infiltre, jour et nuit, sans perdre une minute, tout l’éventail des anti-valeurs qui ont détruit les économies, les écosystèmes, les cultures et des générations entières de personnes victimes de toutes formes de plus-value. Y compris la « plus-value idéologique », telle que la définit Ludovico Silva. La réalité n’est pas telle qu’ils la dépeignent.
Nous ne nous lasserons pas de le répéter. Le diagnostic sur l’appropriation monopolistique des armes de la guerre idéologique aura beau être raffiné ou millimétrique, le rapport sur les régions et les territoires contrôlés par les multinationales du commerce de l’information et du divertissement aura beau être détaillé, et le paysage rempli par le schéma complet de la propriété privée en termes de « communication »… cela ne servira à rien si nous ne complétons pas ce paysage par le plan des tâches qui nous permettront de nous détoxiquer de ce magma aliénant pour nous réveiller de l’anesthésie idéologique bourgeoise qui a inoculé tant de dépendances à son ennemi de classe. En le détruisant au quotidien.
Et nous savons déjà que la fabrique d’anesthésiques idéologiques, méticuleusement financée par la bourgeoisie, comprend des universités, des institutions gouvernementales, des églises, des sectes, des partis politiques, des agences de publicité et des bunkers de « think tank »…[laboratoire d’idées] des intellectuels, des journalistes, des artistes et des vedettes de toutes sortes.
Une faune et une flore qui constituent un crime organisé de lèse-humanité qui a frappé les êtres humains depuis que le capitalisme est ce qu’il est.
Ceci dit, cela ne sert à rien de savoir tout cela, ou de larmoyer sur tous les tons pleurnichards possibles, si nous ne mettons pas en œuvre un programme d’union et de lutte qui envisagerait des actions efficaces de dénonciation et de substitution pour en finir systématiquement et définitivement avec le capitalisme et toutes ses machines de guerre idéologique contre les peuples. Insistons.
Par exemple, certains calculs complets indiquent qu’en 2013, et seulement « aux États-Unis, les dépenses militaires réelles se sont élevées à 839 milliards de dollars ».
Et, « selon l’Institut international de recherche sur la paix de Stockholm, les dépenses militaires mondiales en 2012 se sont élevées à 1,74 trillion de dollars ». [1]
Nous n’allons pas éviter la question, jamais inutile, de savoir qui est responsable de la violence dans le monde et quels intérêts la précèdent jusqu’à ce qu’elle devienne une méthode de domination et – « croyez-le ou non » – de divertissement pour les enfants, les adolescents et les adultes. Constamment.
Par exemple. En Amérique latine, non contentes d’avoir été les paradigmes des pires aberrations idéologiques et culturelles, de s’être infiltrées dans les peuples, les machines d’anesthésie débridée, camouflées en monopoles médiatiques, s’allient désormais tels des boutoirs du putschisme, en obéissant au modèle impérial yankee qui fait précéder ses invasions par des opérations putschistes.
Ces monopoles médiatiques se sont transformés en « Luperca » [2] qui accueille désormais en son sein et allaite les Frankenstein « politiques » qui viennent, à la demande des oligarchies, accoucher du capitalisme (et de son néolibéralisme) entre deux césariennes de conjoncture.
Contre cette « raison anesthésiée » qui est une nécessité et une offensive du capitalisme, l’antidote est l’organisation et la mobilisation depuis les bases qui pétrissent leur conscience de classe dans le feu des batailles économiques et idéologiques qui progressent quotidiennement dans le monde.
L’antidote est un système démocratique et dynamique d’information critique et d’interprétation organisationnelle.
L’antidote, c’est aussi un réseau mondial de combattants contre l’idéologie dominante, entraînés à ne pas se laisser endormir par les effluves anesthésiants qui s’échappent de l’appareil de domination idéologique et qui se sont enkystés comme des « coutumes » ou des « traditions » du peuple.
Cela inclut de vaincre l’individualisme, le sectarisme et le bureaucratisme. Vaincre l’idéalisme et tous ses mirages. Vaincre l’élitisme et le légalisme… vaincre tous les modes d’échappatoire.
Contre la « raison anesthésiée » du capitalisme, il s’agit de développer une autocritique dialectique indissolublement liée à un programme d’action qui corrige les déficiences à court, moyen et long terme.
Contre la « raison anesthésiée » du capitalisme, il est urgent de mettre en place un programme d’unité et d’action qui ne se contente ni de « bonnes volontés » ni de cascades de chiffres et de noms. Nous avons besoin de plus que de simples « observatoires » ; nous avons besoin de laboratoires capables de transformer et non pas seulement de regarder.
Nous avons fait le tour à plusieurs reprises de nos diagnostics et de nos erreurs. Nous en avons fait le tour et nous continuerons à le faire, aussi longtemps que cela sera nécessaire, à condition que ces tours ne contribuent pas à nous anesthésier aussi, par nos propres moyens, en facilitant à la bourgeoisie le travail de nous immobiliser.
Nous continuerons à faire le tour d’un sujet crucial et très complexe, mais nous en ferons le tour dès lors que nous saurons qu’il s’agit de tours dialectiques et non de cercles vicieux dans lesquels, sans issue, nous nous enivrerons de nos propres discours, en nous laissant paralyser par l’ivresse. Un autre type d’«anesthésie » que seule la lutte peut conjurer. Ne vous endormez pas.
Notes
1
http://demilitarize.org/wp-content/uploads/2013/04/El-gasto-militar.pdf
2
Nom de la louve qui, selon la mythologie, allaita Romulus et Rémus lorsqu’ils furent abandonnés par Mars.
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