A propos d’une épidémie, l’humanité peut-elle apprendre à connaître ? C’était le 2 février dans le blog précédent, je m’interrogeais sur la manière dont on peut connaitre d’autres civilisation pour coopérer à la recherche de ce que nous avons de commun et en nous enrichissant des différences. Un lecteur aujourd’hui a fait référence à ce film, qui passait récemment sur une chaîne privée. J’ai retrouvé la critique que j’en faisais alors. Mais voici le témoignage de l’indécrottable optimisme qui était alors le mien et il y a eu peu à peu la découverte que mon pays avait basculé dans quelque chose que j’avais cru longtemps caractériser la société des USA.
02 FÉV 2020 A PROPOS D’UN SÉJOUR DANS LES MONTS FUCHUN
Regardez sur les plateaux de télévision actuellement la différence d’attitude entre les chercheurs scientifiques qui nous parlent de l’épidémie du coronavirus et les politologues qui s’affirment spécialistes de la Chine, sans parler de ceux qui ont lu deux ou trois articles sur ce pays et qui mènent souvent le débat. Ceux-là nous infligent leur vision du « péril jaune » incontestablement aggravé par le fait qu’il est rouge. La manière dont la Chine a mis en quarantaine des villes énormes, le vide qui s’est créé dans les rues et les hôpitaux construits en quelques jours provoquent non pas l’admiration, mais l’inquiétude légitime chez ceux qui ne sont pas informés. à l’idée d’être confrontés à une fourmilière d’anonymes dirigés par le big brother habituel. Face à ce mouvement spontané d’inquiétude devant l’inconnu qui est celui de la population surtout en temps d’épidémie, quelles sont les réponses médiatiques?
Il existe une catégorie particulièrement pernicieuse de gens qui se disent informés puisqu’ils occupent les médias et qui en profitent pour faire passer leur haine de la Chine, leur anticommunisme primaire. Ces gens là sont souvent les mêmes qui non seulement s’estiment compétents sur tout mais qui souvent dénoncent le complotisme des réseaux sociaux. Dans cette affaire, comme dans d’autres, ils le pratiquent sans état d’âme en utilisant leur place d’éditorialistes bien vus du pouvoir et des groupuscules médiatiques.
Le véritable problème n’est plus la Chine pourtant, il est le sous développement. Des pays entiers qui ne peuvent être mis en veille sanitaire et qui n’ont pas les laboratoires, les hôpitaux qui peuvent isoler. Les zones de sous développement chez nous et qui s’étendent… Les échos de transmission du virus proviennent tous de pays développés, que se passe-t-il dans ceux où la surveillance est insuffisante, les voyageurs dont on ignore tout. On ne peut pas nier les migrations, il faut gérer avec humanité, soigner, prévenir., parce que depuis plus de trente ans , les digues s’effondrent.
L’autre problème est la capacité qu’a un pays à imposer à sa population la discipline extraordinairement contraignante des mises en quarantaine de masse. Certains urgentistes qui font des simulations sont aujourd’hui confrontés à cette inconnue que la Chine traite à une échelle inouïe, celle de l’ensemble de la population française, comment obtenir la discipline si on ne nourrit pas, assure la sécurité… Apaise les peurs, crée la confiance.
De la méthode, apprendre à lire, à voir, à penser autrement… La raison, certes, le bon sens autant que le marxisme léninisme en ce qui me concerne, mais la raison pour connaitre a besoin des sens. S’ouvrir à quelle mondialisation? Peut-être faudrait-il là aussi ouvrir le dialogue avec ce que la Chine tente de nous dire : « Construisons ensemble une communauté de destin », dit Xi Jinping dans ce livre que j’ai le privilège de lire avant qu’il soit diffusé en France. C’est-à-dire, restons ce que nous sommes avec nos valeurs propres, nos mœurs, mais cherchons entre nous les points d’intersection qui garantissent progrès et sécurité pour l’ensemble de l’humanité.
la raison et le sens, les sens…
Apprendre à lire par exemple, à se documenter réellement, . « Tirer d’un livre jusqu’à la dernière goutte de substance est un art presque aussi difficile que celui d’en écrire un. Lorsqu’on a appris à le faire, un seul livre profite autant que des centaines. » Henry Miller.
Je suis d’autant plus d’accord avec cette remarque que personnellement je ne connais que deux manières de lire. La première que j’ai pratiquée depuis ma plus tendre enfance consiste à recopier les livres que je lis. Il m’est arrivé dans les bibliothèques de recopier durant des mois des livres et j’en ai encore un doigt déformé avec une boule que même la pratique de la machine à écrire puis de l’ordinateur n’a pas totalement résorbé. L’autre manière qui m’a gagnée à l’adolescence a été de prétendre écrire un livre et de se documenter.
Si je suis obligée de recopier des livres entiers, c’est que je suis une visuelle, le sens me parvient par le sens regard mais ce qui me pousse, moi comme tant d’autres à lire, à me documenter est pourquoi le nier une sorte de transcendance typiquement humaine. Comme le disait récemment François Cheng dans une émission de la grande librairie, la quête du beau est quête du sens. Ce mot français, « le sens » une sorte de diamant à multiples facettes: le sens qui est une direction, un mouvement de votre propre transformation, le sens qui est non seulement un contenu mais l’essentiel de ce contenu, sa substance. Le sens qui est l’instrument privilégié de votre compréhension, la sensualité, et pour moi c’est l’oeil d’abord et après le goût.
La connaissance est recherche et celle-ci est quête de l’autre, de ses potentialités, de l’échange. A partir de cette réflexion de François Cheng, s’impose à moi le film « séjour dans les monts Fuchun », tous les sens sont magnifiés dans ce film et cela vous permet à la fois de vous ouvrir à une autre civilisation, à son irréductible étrangeté et dans le même temps avoir avec elle le contraire des stéréotypes ambiants, l’hostilité, la peur, la manière de plaquer ce que nous avons de pire sur ce que nous découvrons. Cette manière de croire savoir parce que nous refusons le temps de connaitre, celui des gestes en commun pour faire face.
C’est en quelque sorte le contraire de ce que favorisent les réseaux sociaux, les like après un article dont on a vaguement lu le titre et quelques lignes, parce que c’est le seul intérêt que l’on puisse avoir pour votre interlocuteur que celui d’un post où tout ce qu’il a à vous dire tient en une phrase qui a le bon goût de confirmer vos idées reçues sur la question. Et pourtant il y a un désir de savoir. Il faut bien traumatiser les êtres humains pour vaincre ce qui est inné en eux, le fait d’être des animaux sociaux, d’avoir besoin des autres. Ce qui crée l’enfant humain c’est qu’il a le plus longtemps besoin de soin avant d’être adulte, comment réussit-on à faire oublier cela?
j’ai cru longtemps que la politique…
J’ai cru longtemps que la politique était la voie royale de cette connaissance qui part de nos intérêts pour atteindre ceux de l’humanité, je pense que telle qu’elle se présente aujourd’hui elle reste incontournable comme un vide à franchir. Et c’est pourquoi elle mérite d’être considérée aussi dans ses limites actuelles, le fait qu’il existe un état de la science qui a besoin de mondialisation, d’investissements collectifs, la force productive du travail et que celle-ci ne trouve pas les rapports sociaux, les institutions à la mesure de ses avancées potentielles dont l’humanité a besoin pour sa survie. Le fait que lutter contre les entraves a d’abord une dimension nationale, comme la lutte contre l’épidémie, mais que ce qui est recherché en terme de coopération est international. Quelle force politique est en capacité de penser cette contradiction et son dépassement?
Danielle Bleitrach
PS. aujourd’hui 14 novembre, voici ce qu’un lecteur m’écrit à propos de l’union européenne et du Venezuela : Quelle bande de larbins ces dirigeants européens. Au fait, je viens de recevoir dans ma boîte aux lettres un beau dépliant sur papier glace(rien que ça) appelant à signer une pétition contre le PCC, le Parti Communiste Chinois, qui selon eux ferait des choses horribles à la population telle que la vente d’organe etc… Ce n’est pas nouveau ce genre d’insinuations mais en regardant de plus près je découvre le nom de C. O’Brien, conseiller américain à la sécurité nationale à côté de grands démocrates comme E. Ciotti, Christian Habulot, Françoise Hostalier ancienne député UMP, et l’avocat David Maras qui se voit déjà en prix Nobel de la paix et jusqu’à N Dupont Aignan qui rejoint la la pire extrême droite. Enfin bref j’ai trouvé d’où ça venait et qui payait. La C I A!
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