Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

17 OCTOBRE 1961 – 17 OCTOBRE 2020 : 59e ANNIVERSAIRE – VÉRITÉ ET JUSTICE

Il s’est avéré que le 17 octobre 1961, nous étions avec trois autres jeunes étudiants aixois de l’UNEF monté en voiture à une réunion du syndicat à Paris. C’était toute une expédition, pas d’autoroutes, il fallait s’arrêter et comme nous étions médiévistes nous faisions des haltes pour voir les hauts lieux de l’art roman. Il faut savoir que la censure battait à plein et que parfois l’humanité paraissait avec des blancs à la place des articles. Ce matin là en arrivant à Paris, nous avons appris dans les locaux de la rue Soufflot, que des corps d’Algériens flottaient sur la Seine… J’avais 23 ans, imaginez notre révolte, le silence qui nous était imposé et dont nous refusions la complicité, mais à cette époque là nous étions nombreux, il y avait un parti communiste même si nous trouvions qu’il n’en faisait jamais assez, nous avions de la chance, celle du combat et de la résistance internationaliste. (note de danielle Bleitrach)

Le 17 octobre 1961, des dizaines de milliers d’Algériens manifestaient pacifiquement à Paris contre le couvre-feu discriminatoire qui leur avait été imposé par le gouvernement de l’époque dont le Premier ministre, Michel Debré, était hostile à l’indépendance de l’Algérie, et le préfet de police Maurice Papon sous ses ordres. Ils défendaient leur droit à l’égalité, leur droit à l’indépendance et le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. Ce jour-là, et les jours qui suivirent, des milliers de ces manifestants furent arrêtés, emprisonnés, torturés – notamment par la “force de police auxiliaire” – ou, pour nombre d’entre eux, refoulés en Algérie. Des centaines perdirent la vie, victimes d’une violence et d’une brutalité extrêmes des forces de police.

La municipalité communiste de Givors en 2007, a été la 1ère  ville de province en France, à créer un lieu de mémoires en créant le « Square du 17 octobre  » . Mr Abdesselem Bouras ancien président de l’A.P.C.A. a été à l’origine de cette requête auprès de la municipalité.

Christiane Charnay aux côtés d’Abdesselem Bouras, l’ancien président de l’association.

59 ans après, la vérité est partiellement en marche. Cependant, la France n’a toujours pas reconnu sa responsabilité dans les guerres coloniales qu’elle a menées, – en particulier la guerre d’Algérie – non plus que dans le cortège de drames et d’horreurs qu’elles ont entraînés, comme ce crime d’État que constitue le 17 octobre 1961. Le 17 octobre 2012, le Président de la République (François Hollande) avait certes fait un premier pas important, en déclarant : « Le 17 octobre 1961, des Algériens qui manifestaient pour le droit à l’indépendance ont été tués lors d’une sanglante répression. La République reconnaît avec lucidité ces faits. Cinquante et un ans après cette tragédie, je rends hommage à la mémoire des victimes. » Mais le terme de crime n’est pas repris, et la responsabilité, sous entendue, n’est pas clairement définie. Nous demandons une parole claire aux autorités de la République, au moment où certains osent encore aujourd’hui continuer à parler des « bienfaits de la colonisation », à célébrer le putsch des généraux à Alger contre la République, à « honorer » les criminels de l’OAS.

Dans ce domaine, il est donc nécessaire que des mesures significatives soient prises : 

  • Que la lumière soit faite sur les soi-disant « retours vers leurs douars d’origine » des Algériens survivants du 17 octobre envoyés en fait dans des camps de la mort de l’Algérie coloniale.
  • Que la création d’un lieu de mémoire voué à cet évènement, demandée dans la résolution votée par le Sénat en octobre 2012 qui reconnaissait elle aussi ce massacre, soit rapidement mise en œuvre par les autorités de l’Etat, de la ville de Paris et la région Ile-de-France.
  • Pour être fidèles à leur mission scientifique, les historiens ont besoin de pouvoir accéder librement aux archives, échapper aux contrôles des pouvoirs ou des groupes de pression et travailler ensemble, avec leurs collègues algériens.
  • La vérité doit être dite sur l’organisation criminelle de l’OAS que certains, comme au sein de la droite et extrême droite politique veulent la réhabiliter.

Ce n’est qu’à ce prix que pourra disparaître la séquelle la plus grave de la guerre d’Algérie, à savoir le racisme, l’islamophobie dont sont victimes aujourd’hui nombre de citoyennes et citoyens, ressortissants d’origine maghrébine ou des anciennes colonies, y compris sous la forme de violences policières récurrentes, parfois meurtrières.

On ne construit pas la démocratie sur des mensonges et des occultations. Après plus d’un demi-siècle, il est temps :

  • Que le Président de la République, au nom de la France, confirme, par un geste symbolique, la reconnaissance et la condamnation de ce crime d’Etat. Comme il la fait en septembre 2018 pour l’assassinat de Maurice Audin par l’armée française et pour l’existence d’un système de torture généralisé. Cette reconnaissance doit s’étendre aux milliers d’Algériens qui en ont été victimes (voir le site http://www.100autres.org).
  • Que l’Etat français reconnaisse sa responsabilité dans l’internement arbitraire, pendant la guerre d’Algérie, d’Algériens dans des camps.
  • Que la liberté d’accès aux archives soit effective pour tous, historiens et citoyens.
  • Que la recherche historique sur ces questions soit encouragée, dans un cadre franco-algérien, international et indépendant.

A L’OCCASION DE CE 59E ANNIVERSAIRE, NOUS EXIGEONS VÉRITÉ ET JUSTICE

Associations et organisations syndicales

17 octobre contre l’oubli4ACG (Association des anciens appelés en Algérie et leurs amis contre la guerre),  ACCA (Association contre le colonialisme aujourd’hui), ACDA(Association pour le changement démocratique en Algérie), ACORT (Assemblée Citoyenne des Originaires de Turquie )  ,     ANPROMEVO (Association nationale pour la protection de la mémoire des victimes de l’OAS), Association Josette et Maurice AUDIN , Au Nom de la mémoire ,   APCV (Association pour la promotion de la culture et du voyage), APPEL-EGALITE , ATTAC , ARAC (Association républicaine des anciens combattants), ASABP (Association de Soutien aux Amoureux au ban Public),

  ATMF (Association des travailleurs maghrébins de France), CEDETIM (Centre d’études et d’initiatives de solidarité internationale) , Collectif Faty KOUMBA , CRLDHT (Comité pour le respect des libertés et des droits de l’Homme en Tunisie), Confédération Nationale du Logement , Institut Mehdi Ben Barka , Conseil National des Assos Familiales Laïques , LDH (Ligue des droits de l’Homme), Fédération Nationale de la Libre Pensée , FTCR (Fédération des Tunisiens pour une citoyenneté des deux Rives),Mrap (Mouvement contre le Racisme et pour l’Amitié entre les Peuples), Mouvement de la paix

ANPNPA (Association nationale des Pieds-Noirs progressistes et leurs amis),  ARAC (Association républicaine des anciens combattants), , CAPJPO-EuroPalestine,  Comité Vérité et justice pour CharonneDroits devant !!, France el Djazaïr Fasti (Fédération des Associations de solidarité avec tou-te-s les immigré-e-s), Fondation Frantz FanonFUIQP, Les Oranges,  Liaison de la fédération anarchiste pour le lot/ Aveyron, , Réfractaires non-violents à la guerre d’Algérie, RMCP (Réseau Mémoires de combat politiques), Sortir du colonialismeUJFP (Union juive française pour la paix), URIF-CGT (Union régionale Ile de France de la confédération générale du travail)

Partis politiques : PCF (Parti communiste Français), GDS (gauche démocratique et sociale, Parti de Gauche

https://c.leprogres.fr/rhone-69-edition-sud-lyonnais/2017/10/16/commemoration-du-17-octobre-les-deux-ceremonies-qui-s-opposent

https://c.leprogres.fr/rhone/2015/10/18/54e-anniversaire-de-la-tragedie-du-17-octobre-1961

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1 Commentaire

  • GENDRE DANIEL
    GENDRE DANIEL

    17 octobre 1961

    Je pense à ces corps errants dans les méandres du fleuve,

    Je pense à ces âmes brisées par un espoir aboli,

    Je pense à l’enfant qui par la main brutale n’adviendra pas,

    Je pense à mes sœurs, amputées de leurs frères,

    Aux mères de leur fils, aux épouses de leur mari,

    Ombres fragiles, errant dans nos mémoires,

    De la liberté chérie qui vous avait mis en marche,

    J’en fais la lumière de mes démarches,

    Tant l’indélébile pourpre du fleuve me rappelle à vous,

    Vous étiez si bien vêtus ce jour-là, en habit du dimanche,

    Vous marchiez prudemment sur les trottoirs,

    Bien rangés, respectueux, pacifiques en bel espoir,

    C’en était trop pour le joug barbare,

    Lâchant ses sombres soldats

    Vous arracher le cœur de votre jeunesse,

    Je pense à vous, Mohamed, Lakhdar, Kader, Younes,

    Je pense à vous Jamila, Houria, Kheïra, Latifa,

    Puissiez-vous enfin entrer dans le sublime tombeau,

    Celui du cœur des vivants.

    Daniel GENDRE

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