Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

Et si on voulait comprendre la Chine

encore un texte de mon sinologue capitaliste mais qui nous invite à travers les mécomptes des USA à nous interroger : et si le pouvoir chinois était tout simplement communiste? (note de Danielle Bleitrach pour histoire et societe)

Certains passages du discours de Robert C. O’Brien du 24 juin, conseiller à la Sécurité Nationale à la Maison Blanche, m’ont fait sourire. Faucon parmi les faucons, il est venu remplacer Bolton qui compte les millions de dollars sur son compte après la parution de son livre,  The Room Where it Happened.
Si on avait voulu comprendre la Chine, « on n’en serait pas là? »

Doux optimisme


Ces lignes me rappellent ce doux optimisme occidental qui croit souvent avoir tout compris en Chine et qui veut enseigner à la Chine comment il faut faire. O’Brien reconnaît la naïveté américaine face à la Chine, le plus grand échec dans la politique étrangère américaine depuis 1930 et l’incompréhension sur la véritable nature du gouvernement chinois.

Fast food et démocratie


Les Etats-Unis pensaient que la démocratie américaine allait s’exporter avec l’ouverture économique. Oui, Monsieur, exporter une démocratie à l’américaine en Chine n’est pas la même chose que de développer un réseau de fast food ! Ne rions pas des Américains, les Européens ne sont pas plus clairvoyants. 
Je ne reprends pas le reste du discours qui est une charge dans la ligne des sorties de Pompeo et Pence. Autre propagande, cette fois américaine, répétée des dizaines de fois ces derniers mois !

Volonté de comprendre?


Au-delà de l’aspect politique, cet aveu d’échec permet de rappeler la difficulté occidentale à vouloir comprendre la Chine. On vient avec notre grille de lecture, nos fantasmes et nos désirs et on les applique sur le pays. On n’essaie pas vraiment de se mettre à la place de l’autre. Il y a ce sentiment de supériorité conscient ou inconscient, long héritage de notre histoire économique, culturelle et religieuse. Nous nous prenions pour la civilisation et il était difficile de concevoir qu’il y ait de meilleurs modèles à l’extérieur; les missionnaires avaient bien retenu le « Hors de l’Eglise, point de salut » de Saint Paul. Bien entendu, les mentalités évoluent, les failles du modèle de démocratie occidental obligent à se remettre en question. Les échanges avec la Chine et la connaissance s’amplifient. Fort heureusement, tout bouge! Mais que de temps perdu par manque d’humilité et d’un véritable désir de comprendre!


J’avais écrit un article sur le pari perdu américain ici.
Les passages du texte de O’Brien ci-dessous et le discours sur le site de la Maison Blanche ici.
 
“As China grew richer and stronger, we believed, the Chinese Communist Party would liberalize to meet the rising democratic aspirations of its people.  This was a bold, quintessentially American idea, born of our innate optimism and by the experience of our triumph over Soviet Communism.  Unfortunately, it turned out to be very naïve.

Nous n’aurions pas pu nous tromper davantage – et cette erreur de calcul est le plus grand échec de la politique étrangère américaine depuis les années 1930. Comment avons-nous fait une telle erreur? Comment avons-nous échoué à comprendre la nature du Parti communiste chinois?

La réponse est simple: parce que nous n’avons pas prêté attention à l’idéologie du PCC. Au lieu d’écouter ce que les dirigeants du PCC disaient et de lire ce qu’ils ont écrit dans leurs documents clés, nous avons fermé les oreilles et les yeux. Nous avons cru ce que nous voulions croire – que les membres du Parti n’étaient communistes que de nom. »

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3 Commentaires

  • Jean-Claude Delaunay
    Jean-Claude Delaunay

    Ces individus estiment que tout est idéologie. Comme ils ont appris, depuis Gustave le Bon, à manipuler avec succès les opinions publiques et les désirs de consommation, ils se croient en mesure de tout contrôler. La science sociale est pour eux manipulation. Elle n’est pas d’abord et fondamentalement observation, repérage des faits, théorisation, contrôle par la pratique. Je crois que nous devons, nous, marxistes, tirer en permanence leçon de leurs erreurs. Le marxisme, c’est sans doute la lecture des auteurs. Mais c’est, à mon avis encore, l’observation simultanée de la société, et la mise en oeuvre de tout ce qui en découle au plan de la méthode scientifique. Evidemment, l’observation dont je parle est une forme très pointue de l’observation.

    Je vais rappeler deux séries de faits auxquels l’article que publie Danièle Bleitrach me font penser.

    La première série, ce sont des dates. Entre 1989 et 1992, soit dans un intervalle de 4 ans, il me semble, a postériori, que l’histoire du monde conteporain s’est condensée.

    1989 : révolte étudiante, surtout à Beijing.
    1989 : chute du mur de Berlin
    1989-1991 : disparition des démocraties populaires d’Europe centrale
    1991 dissolution de l’URSS
    1992 réunion du comité central du PCC et promotion du concept “d’économie de marché socialiste”
    1992 signature du Traité de Maastricht

    Voici mon interprétation des faits de ces 4 années : 1) La grande bourgeoise nord-américaine réussit un “joli coup” (la liquidation de l’URSS et des démocraties populaires), 2) Aussitôt, les grandes bourgeoisies d’Europe se mettent en ordre de bataille (Maastricht), car elles sont alliées et concurrentes de leur homologue américaine, 3) Deng Xiaoping comprend que la Chine socialiste doit vraiment se réformer pour résister et cela non seulement pour des raisons internes (Tian anmen) mais aussi pour des raisons externes (le renforcement de l’impérialisme sous conduite américaine).

    La deuxième série de faits est l’apparition du concept “d’économie de marché socialiste”. C’est “un fait théorique”, ce n’est pas un fait de l’actualité ordinaire. Mais c’est un fait et, à mon avis, quand le PCC l’a adopté, ceux qui en ont défendu la formulation n’ont vraisemblablement pas eu l’intuition complète de ce dont il était porteur.

    Je dirai même que, de façon générale, la portée révolutionnaire de ce concept n’a pas été perçue. Les Américains ont seulement vu Tian anmen. Ils se sont alors frotté les mains en se disant : “Chouette, ça va bouillir”. Quant à nombre de marxistes en France, je crois que la portée, les potentialités, et donc aussi les obscurités, de ce concept leur ont échappé. Mais l’important est que cela ait échappé aux penseurs de la grande bourgeoisie américaine. Pour eux, il n’existe qu’un seul marché, le vrai, le marché capitaliste, en sorte que, quand on met la main dans la machine marchande, c’est le corps tout entier qui s’y engage et cela ne peut être que le marché capitaliste.

    Bref, en l’espace de 4 ans, le monde d’après 1917 et 1945 a été refaçonné. L’impérialisme sous conduite américaine a cru que désormais le monde entier était à nouveau sous sa coupe. En réalité, ce n’était qu’une rémission, car il était déjà fort malade. Cela dit, s’il existe des déterminismes, il existe aussi une liberté humaine. A tout instant, les Hommes peuvent prendre de bonnes ou de mauvaises décisions. En 1992, les dirigeants de la Chine et Deng Xiaoping en premier lieu, ont mis le socialisme sur les bons rails. Pour savoir ce que sont de bons rails, il faut disposer d’un critère dont les idéologues de la grande bourgeoisie américaine sont bien incapables de penser la rationalité et les formes. Ce critère est celui de la satisfaction prioritaire et permanente des intérêts économiques, politiques, et culturels des classes ouvrières et populaires. Jean-Claude Delaunay

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  • Xavier

    Merci pour votre fidélité!
    Capitaliste, je ne crois pas l’être. J’essaie d’observer sans trop de biais et je raconte. Le fait aussi d’avoir été plongé très tôt dans un univers différent du monde occidental et de l’avoir apprécié aide à ne pas croire à toutes les sornettes qu’on nous rabâche.

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  • COMAGUER
    COMAGUER

    Leur aveuglement est tel qu’ils ne voient pas que leur “démocratie” est le pays du monde où les élections se gagnent avec le plus d’argent ce qui veut dire que ceux qui distribuent l’argent – les grands groupes capitalistes – organisent des jeux du cirque électoraux pour distraire la population et qu’ils remplacent régulièrement les gladiateurs ; THE SHOW MUST GO ON . A la place de ces jeux du cirque le PC chinois fait vivre des débats de société avec 80 millions de participants.

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