Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

Suite du débat sur le premier pas du socialisme et le PCF

Jean-Claude Delaunay propose que nous ouvrions une rubrique consacrée au débat qui s’est ouvert ici, voici un premier échange, auquel je voudrais ajouter la réflexion d’un jeune camarade, artisan menuisier de son état, très impliqué dans la vie de sa section et qui intervient dans le petit groupe de réflexion facebook (très fermé) dans lequel je tente de faire régner une discipline de fer avec deux exigences 1) qu’on lise les textes en débat même s’ils sont très longs. 2) que l’on ne s’égare pas dans les leurres habituels (pour ou contre la chloroquine, pour ou contre le voile, pour ou contre me too, pour ou contre la France insoumise, etc…) et que l’on reste sur le sujet (Danielle Bleitrach).

Première intervention Jean-Pierre Heloir

Le “avec qui” est le piège dans lequel on nous a enfermé depuis des années et qui justifie les alliances qui font passer le parti sous la table. Je pense que le passage au socialisme est une longue phase historique dans laquelle nous sommes engagés. Comme de nombreux camarades j’ai pensé pendant longtemps que nous étions sur le seuil, je suis moins optimiste aujourd’hui, il me semble que le chemin est encore long et qu’il faut s’inscrire dans ce long terme. Ce qu’entre parenthèse, fait le PCC.
Une petite remarque sur la robotisation, le Japon y est fortement engagé, notamment pour des raisons de vieillissement de la population problème que la Chine va aussi avoir à affronter.

En réponse à Jean-Pierre HELOIR de Jean-Claude Delaunay

Tout à fait d’accord avec vous, Jean-Pierre Heloir. Mieux vaut s’inscrire dans le long terme. Cela dit, le plus long des voyages commence par un pas. Et l’Histoire ne comporte pas moins d’incertitudes que l’Economie. Elle s’accélère. Mais restons-en à l’idée du “premier pas”. Même dans une perspective de long terme, nous devons avoir une action de court terme. Laquelle? Personnellement, je trouverais vraiment utile que certains des lecteurs, ou des lectrices de ce débat, osent réfléchir à ce premier pas et proposent à Danièle Bleitrach la publication de leurs réflexions. Je ne sais pas si mon propos peut aider au démarrage de ce processus. Je vais énoncer 4 remarques.
 
1) Tout d’abord les forces susceptibles d’agir. En tant que communiste inscrit au PCF, j’ai le réflexe parti. Bon, nul n’est parfait. Mais mon sentiment est que, dans ce qui reste encore de ce parti, il y a certainement des personnes, plus peut-être qu’on ne croit; considérant que le socialisme, sans être une potion magique, est la société vers laquelle nous devons tendre pour commencer d’aborder rationnellement et efficacement les problèmes qui s’accumulent dans notre société capitaliste. Je ne dis pas que nous ne devons rien attendre de l’actuelle direction. Mais je crois quand même que nous devons agir sans attendre que Fabien Roussel et son équipe puissent s’exprimer.
 
2) Il y a les forces du PCF mais il y a aussi tous les autres camarades et plus généralement tous ceux, toutes celles qui accordent de l’importance au mot “socialisme” et à son contenu. Il existe de ce point de vue une grande diversité de situations. Certains sont isolés mais actifs. D’autres ont fondé une organisation, comme le PRCF, etc. Nous devons, ici, avoir l’ambition de faire en sorte que chacun s’exprime et trouve dans cette expression le besoin de se rassembler, de faire en sorte que le plus grand nombre des personnes concernées, ainsi que les membres du PCF précédemment évoqués, fassent émerger, dans la société française, la conviction du socialisme. Car il faut en finir avec cette fange qui nous dirige et qui nous gruge et qui n’est qu’une bande de racailles.
 
3) Tout cela pour faire quoi? C’est évidemment la question la plus importante mais aussi la plus difficile à traiter. Je crois qu’il faut adopter une démarche de grande ouverture. Chacun a sa propre idée de la chose et nous devons être patients les uns envers les autres. Mais je crois que nous devons tendre néanmoins à dégager les 2 ou 3 points majeurs qui seront autant de leviers idéologiques permettant que les organisations de lutte et les masses populaires s’emparent de l’idée du socialisme. Pour ma part, j’avance les 3 idées suivantes :
 
a) Dire aux capitalistes, au plan politique : c’est fini. Allez vous rhabiller. La comédie est terminée (c’est la fin de la démocratie bourgeoise).
b) Dire aux capitalistes, au plan économique : c’est fini. Cette fois, c’est la tragédie qui est terminée (c’est la fin du mode de production capitaliste, c’est la dictature démocratique du peuple).
c) Penser cependant que le socialisme est une construction et donner aux entreprises capitalistes qui accepteront cette nouvelle règle du jeu la possibilité de continuer à travailler en France, dans le cadre de la légalité socialiste (le socialisme est une société de droit).

Intervention de Jonathan Julliard dans le groupe facebook

Le fait de la désindustrialisation a effectivement diminué la couche ouvrière.
Cependant il faut regarder les modifications de la société en face.
Le prolétaire occupant massivement la place de l’ouvrier du XXème en France, bien qu’existant toujours dans la production industrielle restante, sont les caissières, les infirmières, les travailleurs du BTP, les ouvriers agricoles – représentants par exemple en Vaucluse plus de 20 000 travailleurs, ce qui en fait le secteur ouvrier le plus important du Vaucluse, etc.

Il ne faut pas oublier non plus le processus contradictoire intrinsèque au développement du capitalisme, qui plus il grossit, plus il développe un prolétariat, voire un prolétariat sur-exploité.
C’est le cas de la petite-bourgeoisie prolétarisée par le mécanisme appelé uberisation. Il suffit de regarder le remplacement des petites boutiques où boulangeries artisanales devenues des chaînes qui les rachètent massivement dans les centres ville, et dont les anciens propriétaires retournent bien souvent dans le salariat.
Idem pour le BTP où, sous couvert d’auto entreprenariat, le capital réinvente le travailleur à la tâche, à peine camouflé.

Le danger présent avec ce processus, c’est clairement le développement du fascisme. Car la conscience anti libérale de la petite bourgeoisie seulement basée sur une notion subjective des gros contre les petits possède en elle tous les mécanismes qui ont construit l’Italie fasciste de Mussolini.

En l’absence d’un parti communiste fort, à même de comprendre les possibilités d’une alliance objective de ces deux classe, en l’abordant par ses intérêts de classe propre, la dérive arrive vite (il n’y a qu’à regarder les Onfray et autres fascisants et le succès qu’ils rencontrent auprès de cette gauche petite-bourgeoise, avec les conséquences que cela comporte).

C’est en cela que nous avons besoin, voire même que nous avons le devoir suprême de reconstruire notre grand Parti, de façon complète, par la base.
En redéveloppant des moyens de propagande adéquats, en se formant afin d’apprendre à analyser toujours mieux les situations et être au plus près des travailleurs.

En cela, nous avons déjà du matériel intéressant.
Je suis menuisier indépendant. Je n’ai pas droit au chômage, rien. Là proposition de Boccara d’emploi formation est un élément qui me permettrait d’avoir la sécurité de ne pas tomber dans la merde si je n’avais plus rien.

Il faut cependant faire attention aux reprises du capital sur ce genre de mesures, mais aller dire cela aux travailleurs, directement, c’est impossible que ça ne rencontre pas de succès.
De même que la nationalisation et socialisation des crédits à l’investissement des petits indépendants, qui leur permettrait de se libérer de l’emprise des crédits à la consommation qui écrasent le travailleur.

Tous ces éléments sont des point d’appui. Ils ne doivent pas être considérés comme des forme de lutte, mais bien des moyens de retoucher, dans leur intérêts de classe propre, les individus composant la part laborieuse.

Ce que je propose, c’est qu’il nous faut redévelopper un ensemble de moyens, d’outils permettant dans un premier temps de se réaffirmer, de se restructurer, puis dans un deuxième temps, d’aller au combat, convaincre, persuader.
Persuader de participer au parti, proposer la construction commune d’un nouveau modèle, enthousiasmant, intéressant, novateur pour des millions de travailleurs.

C’est ainsi qu’en grossissant les rangs du parti avec une population cohérente avec le réel, et non pas composée que d’instit retraités et de cadre managériaux, que nous renverserons la tendance.

Le parti ne peut en être que renforcé. Car comme le précise Lénine, le parti se renforce en s’épurant. Mais ce processus n’a pas besoin d’être violent, dans la confrontation… Il a juste besoin d’être mécanique. Changer la composition sociale d’un organisme, c’est changer sa ligne et sa visée. Les parasites disparaîtront, après s’être pliés au cours de l’histoire.
Tout est question de rapports de forces. Toujours.

C’est ainsi qu’en rendant le parti plus fort, plus sûr, plus conséquent, que nous pourrons avoir une réelle portée.
Car je le dis, je le répète, quand on est négligeable on est négligé.
Il ne faut donc plus être négligeable.

Chaque militant communiste, impliqué doit, car c’est son devoir œuvrer à la reconstruction, démarrée par le 38eme congrès du Parti.
Cela doit être fait en dépit des attaques, des insultes, des vindictes.
Les chiens aboient, la caravane passe.
Nous devons nous inspirer de la persévérance des chinois, cette façon formidable d’agir sans conflit inutile ou dévorant.
L’énergie doit être utilisée à la réalisation du bien commun, l’apport de soi à la construction du socialisme.
Ceci doit passer par la base, en organisant des réunions, des formations matérialistes, complètes, des formations économiques etc.
En organisant des études sur le développement de formes de tracts, de propagande (vidéo, images, etc).
En retournant dans les entreprises, régulièrement, même si c’est pour comme moi, retourner la queue parfois entre les jambes… Y retourner.
Développer la constance, la conscience et l’intérêt.
Ne pas se contenter de dire, mais faire; démontrer avant de faire des leçons aux autres camarades.

C’est le seul moyen d’avancer. Avec comme obsession la question suivante ” est ce que cela nous fait avancer dans la direction du socialisme ou pas ? “

Car une fois la visée nommée, qualifiée : le socialisme.; il faut développer le plan à même de nous y conduire.
Cela ne peut passer que par l’investissement massif des camarades conséquents au sein de leurs cellules, de leurs sections, pour peser au niveau des fédérations et ainsi renverser la tendance social démocrate. Ce n’est que par l’action et le résultat que nous convaincrons et que nous pourrons persuader les autres camarades de se lancer et quant aux autres de quitter le navire.

Mais ceci doit devenir notre obstination, notre devoir suprême, car sans cette considération, rien ne changera et la question qui se pose alors est :
“est-ce que je milite pour moi et satisfaire ma conscience ou bien, est-ce que je milite pour l’ensemble des humains et de notre émancipation au travers de la construction d’un système productif socialiste ?”

Évidemment tous ceux tentés par la première option ont soit besoin d’être formés sérieusement afin de délibéraliser leur pensée et ôter le voile de l’Idéologie dominante, soit n’ont rien à faire dans le parti communiste et devraient plutôt aller militer avec les trotskistes.

Les récents débuts de collisions entre les forces productives et les rapports de production devraient nous inciter à considérer l’entrée dans une période de changement sociaux importants… À nous de faire en sorte qu’ils soient du côté Progressiste et socialiste plutôt que de les laisser à la réaction, faute grave de notre part, car condamnant le futur de par notre absence.
C’est notre devoir, sombrons dans l’oubli de l’histoire si nous sommes incapables de l’assurer.

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7 Commentaires

  • Danielle Bleitrach
    Danielle Bleitrach

    j’ai voulu placer l’intervention de Jonathan à la suite du passionnant échange entre Delaunay et Heloir parce qu’il parle du PCF, et malgré tout on sent bien que beaucoup de choses en dépendent… On ne peut rien faire sans mais on ne voit plus trés bien ce qu’il est passible de faire avec. C’est comme si sur le chemin du futur la locomotive avait été renversée. En outre, bien sur je suis d’accord avec ce qu’il dit sur la nécessaire re-prolétarisation du PCF et sur le fait que ce parti demeurerait ce qu’il y a de “mieux” ou de “moins pire”, mêlant la fraternité et la solidarité d’une manière qui renvoie à ce que dit Heloir: c’est le seul lieu ou il demeure un peu de “collectif” tous les autres après de brèves périodes d’enthousiasme se dissolvent . Surtout l’adhérant ne sait plus pourquoi il est là, seules les périodes électorales donnent un semblant d’utilité à l’organisation qui se délite.

    Mais peut-être faut-il pousser la réflexion.

    Le néo-libéralisme, ce stade sénile de l’impérialisme est passé par là, cette manière d’individualiser à l’extrême, chaque individu devenu consommateur d’un monde de la marchandise, et le dirigeant vendu à la passion de l’instant à coup de publicité… Et le pCF a été pris là-dedans.. Que la mutation de Robert Hue ait joué son rôle c’est évident, mais ses effets ont été d’autant plus considérables qu’il y avait un contexte qui passait pour la “modernité”. La classe ouvrière, le collectif par excellence a été attaquée par la désindustrialisation mais plus encore dans sa composition sa capacité d’intervention. Il n’y avait pas d’autre issue et tout autre était ringard, rarement autant de conjonctures paraissaient sonner le glas du communisme.

    Ce contexte évolue avec ses perspectives et ses résistances. Il évolue de manière accéléré au plan objectif, mais la conscience que nous en avons est en retard, elle est resté “figée”sur l’antérieur.

    Prenons un exemple.

    Hier, j’ai jeté un oeil sur le journal local “La Provence”. IL y avait un interview de la candidate marseillaise de droite, Vassal, qui disait en toute simplicité que la candidate du printemps Marseillais préparait un putsch à “la cubaine”… Imaginez Rubirola, une verte FI, qui n’a pas laissé s’inscrire le mot communiste dans ses appels et Coppola, le tête de liste de la mairie du 15 et 16, jadis fief du PCF abandonné sans lutte au PS et quel PS le clientélisme un tantinet mafieux, Coppola ce n’est pas Billoux qui jadis avait reconquis avec les dockers ces quartiers là sur la pègre… pourtant ce n’est pas la pègre qui manque, mais ce n’est plus d’actualité… Imaginer Rubiroa et Coppola en révolutionnaires cubains est la galéjade la plus extraordinaire. les prendre pour le Che et Fidel est de l’ordre du grotesque… Je connais les uns et les autres et je vous jure qu’il est impossible de les confondre…

    Cela pose une première question ?
    Pourquoi la droite et l’extrême-droite continuent-elles à transformer un quelconque Edouard Herriot en Lénine dès qu’il y a la moindre gauche à l’horizon, alors qu’il est visible croyez-moi qu’avec eux rien ne changera, cela peut paraître cela mais la droite a besoin de ce ridicule… Mais cela dit bien ce que reste l’alternative.

    Deuxième constat: qu’ils dégagent …
    Pourtant chez ceux qui s’apprêtent à voter pour le printemps marseillais, la seule vérité est de l’ordre du soulagement,en dehors de l’implication de toute bataille électorale, avec pareil attelage la seule chose qui se puisse espérer qu’il nous débarrasseront des précédents, en l’occurrence Gaudin et son système insupportable, son clientélisme, le sacrifice des catégories populaires…

    Nous n’en sommes pas au “pour” mais au “contre”… avec ses éternelles déceptions alors même que le fantasme demeure le communisme, “les partageux”… ça fait pas mal de temps que c’est comme ça mais ça leurre de moins en moins de gens…et l’épidémie renforce cela avec le refus du politique…70% d’abstentions au premier tour…


    ALORS DANS UN TEL CONTEXTE QUE SIGNIFIE DEBATTRE DU SOCIALISME

    Débattre du socialisme c’est passer au “pour”, et poser une alternative, une issue qui ne soit pas la reproduction du même… pas facile…Il me semble que ce “pour” est là quand le rassemblement s’organise autour de l’hôpital et il devient très large, c’est là que Jonathan a raison: la question reste celle du travail.

    Il en est de la plupart des choix alternatifs aujourd’hui y compris la manif contre le racisme, de la destruction des statues on a l’impression que quelque chose est intolérable au point que n’importe qui fera l’affaire par défaut du “pour” même s’il s’agit simplement de passer de l’idée du personnel politique au capital, c’est là je crois le fond.

    Mais où jonathan me parait ne pas aller assez loin c’est quand il limite l’embourgeoisment du PCF aux catégories sociales qui ont peu à peu envahi ses rangs…
    C’est vrai et en même temps, j’accorde également beaucoup d’importance à la situation internationale, au fait que des phénomènes qui ont été longtemps (à partir de 1974) réservé aux sociétés dites sous développées sont désormais celles que nous connaissons, l’embourgeoisement et le pillage, les expéditions sous couvert de droit de l’homme, tout cela a été le contexte de la contre-révolution “de la fin de l’histoire”… Et il demeure quelque chose de la peur en meme temps la conscience que ce qui nous atteint est insupportable.

    c’est la thèse que j’ai tenté de défendre dans mes mémoires, il y a dans la destruction du PCF d’abord l’absence de stratégie vers le socialisme alors que débute la contre révolution néo-libérale et surtout le fait qu’alors que cette contre révolution est un drame terrible pour l’URSS et aussi pour les pays du sud, je décris l’Afrique, l’Amérique latine, en France c’est un gouvernement socialiste avec des ministres communistes qui l’inaugure… Et c’est sur cette lancée là que nous sommes encore idéologiquement. L’impossibilité de penser une alternative simplement nous débarrasser du même, on dégae ce qui est…

    ce n’est pas un hasard si ceux qui nous invitent au socialisme le font de la Chine et de Cuba, voir du Vietnam, peut-être faut-il fouiller cela.

    Dans ce cas s’agit-il du premier pas dont parle Delaunay: “aller dire à ces messieurs les capitalistes d’aller se rhabiller?”
    c’est cette question-là à laquelle tout est subordonné…
    Quand et comment l’avons-nous abordée?
    Pourquoi est-ce que nous avons peur qu’elle interdise le rassemblement le plus large ?
    Et qui le fera? C’est pourtant parce qu’il n’y a pas d’alternative que chacun la cherche dans le dernier leurre à la mode, celui des médias… Prétendre les distraire de leurs obsessions du moment leur est insurmontable, il ne faut surtout pas du moins pour le moment sortir de l’idée qu’il suffit de changer un petit quelque chose… et ils s’inventent des épouvantails dérisoires. mais c’est vrai que cela peut aussi aller très vite, il suffit parfois de trouver ce qui produit l’ébranlement de l’ensemble…

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    • Jonathan
      Jonathan

      Tout d’abord merci pour la considération de mon propos et son ajout dans cet article, j’en suis très touché.

      Je suis d’accord, on ne peut limiter la situation à une modification de la composition sociale du Parti.

      Il semble, et je tiens cela de camarades plus anciens que moi, que la ou les mutations de société qui ont suivi la chute de l’Union Soviétique, mêlées à tout un tas d’autres choses ont fait que les communistes ont eu du mal à se situer, à analyser et agir en fonction des changements brutaux et de la violence de la société capitaliste.

      Cependant, j’appuyais sur ce point, car il me semble qu’il faille attraper le drap par un bout. Or, ce levier me paraît aujourd’hui le levier majeur que les communistes aient entré les mains.

      Comme vous le précisez, je suis menuisier.
      Pour travailler j’ai besoin d’outils spécifiques.
      Une scie sert à scier. Et le savoir-faire sert à utiliser cette scie dans de bonnes conditions afin de parvenir à la pièce désirée, afin de réaliser un ouvrage.

      Si un individu prend une scie sans avoir appris à l’utiliser, il va couper de biais, courbe, gauche.
      Rajoutons à cela qu’il n’a pas de mesure préetablie, la pièce produite sera gauche et faussée et aura compromis l’ouvrage.

      Il en est de même pour la construction du socialisme.
      Le Parti, c’est l’outil.
      Le savoir-faire, c’est le marxisme.
      La pièce, le socialisme.
      L’ouvrage, le communisme.

      Si les militants n’ont pas les moyens théoriques nécessaires à utiliser le bon outil pour produire la pièce de façon correcte, alors l’œuvre du communisme est compromise.

      C’est pour cela que j’insiste sur la formation:

      Former la base militante au matérialisme, ce à quoi elle n’est pas formée peut permettre de trouver collectivement les moyens de reconquérir la classe ouvrière.
      Recoller avec le prolétariat d’aujourd’hui, sans oublier la petite-bourgeoisie, allié indispensable au renversement du capitalisme, c’est un des leviers majeurs pour la bonne tenue de l’outil qu’est le Parti.

      Car si ma scie est mal affûtée, rouillée, tordue, comment puis-je couper, même avec la meilleure volonté mon bois droit ?!
      Et plus ma scie aura de bonnes dents, bien tranchantes, unies dans un effort de même direction, plus ma pièce sera droite et juste et mon ouvrage abouti.

      Certes, c’est une réflexion limitée.
      Mais éparpillées dans tous les sens dans des groupuscules divers, les petites dents de la scie ne sont plus ensemble et séparées elles ne peuvent pas couper.

      Mon outil est alors hors d’usage.
      Mais pas de par sa faute, ni de par sa nature. Non, c’est par la faute de mon usage.
      Moi qui n’ai pas utilisé le savoir-faire de la menuiserie, moi qui ait laissé ma scie rouiller, les brasures se détacher.

      N’ai-je pas honte ? La scie forgée par mes aïeuls, qui a coupé si bien, tant de fois depuis déjà cent ans !

      Alors ma conviction est qu’il nous faut la reprendre. Réapprendre collectivement à se servir de l’outil matérialiste afin de retrouver toutes les dents nécessaires pour que notre outil commun qu’est le Parti Communiste Français, nous permette de construire ensemble l’ouvrage que nos aïeuls ont entrepris et dont nous avons le devoir de prolonger la tâche.

      Vous avez raison, il faut regarder à l’international, se tourner vers ceux qui chaque jour participent à la construction de cet ouvrage, car il concerne l’ensemble de l’humanité et ce devoir, pour nous, commence par le renforcement de notre base, reconstruire une avant-garde qui, un pas en avant, engage nos efforts vers le socialisme.

      Ça semble bien minime, au regard de l’action menée jadis par les soviétiques et le camarade Lenine… C’est cependant la condition qui me semble primordiale pour la construction révolutionnaire vers le socialisme. C’est donc notre devoir, et je le dis, avec fermeté mais en toute sympathie à nos camarades éparpillés, revenez au Parti !

      Et je le dis à tous les camarades de bonne intention, notre avenir est dans la classe prolétaire, formons les camarades au matérialisme, afin de retourner avec un discours touchant aux intérêts de classe des travailleurs ; c’est un des leviers du renforcement du Parti et du recouvrement de sa nature révolutionnaire.

      Je ne vois pas d’autre façon de reconstruire les conditions matérielles nécessaires à la construction d’une classe prolétaire, consciente de ses propres intérêts de classe et agissant dans la réalisation révolutionnaire du socialisme.

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  • Pédinielli Dominique
    Pédinielli Dominique

     
    Militant communiste de base, pourquoi rien ne change depuis le 38em congrès, la minorité devrait appliquer la démocratie, aider la sortante à faire avancer les choses dans le sens du 38em congrès.
    J’ai bien peur que les compromis pour une soi-disant unité du Parti fausse le débat pour le socialisme à la Française.
    La minorité n’en veut pas, elle veut continuer les compromis avec la sociale démocratie pour sauvegarder leurs intérêts personnels. J’attends 2022 les Présidentielles, candidat communiste ou pas..? 

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  • Reitnomud
    Reitnomud

    Bonjour à tous.
    Peut-on se joindre à vos échanges ?
    pour aiguiser les échanges entre “horlogers de la Révolution” et “insolents de l’instinct de classe” ?
    Bien fraternellement
     

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  • Philippe, le Belge
    Philippe, le Belge

    Bonjour,
     
    Je rebondis sur l’excellente métaphore de Jonathan que je comprends d’autant mieux qu’hier, moi qui ne suis pas menuisier, j’ai complètement foiré une latte en bois en utilisant ma scie sauteuse comme un béotien.
    Par ailleurs, un point de vue extérieur (belge dans le cas présent) ne fait jamais de mal. Je ne cherche ci-dessous ni à juger, ni à donner de leçon de morale, je n’en ai certainement pas la légitimité. Chacun en fait ce qu’il veut.
     
    Le Parti, c’est l’outil! Lecteur assidu du blog de Danièle depuis 13 ans, c’est une des nombreuses choses que j’ai commencé à comprendre!
    J’ai aussi compris que chez vous, l’outil était mal en point! “Mal affûté, rouillé, tordu”. Est-il seulement récupérable?
    Certains de ses utilisateurs vont en magasin en “acheter” un nouveau, reviennent parfois avec un modèle plus moderne mais, comme souvent aujourd’hui , de moins bonne qualité, moins solide, moins endurant. Ici un groupuscule, là un mouvement. Puis ils regardent avec nostalgie en direction de leur vieil outil pendu au crochet au-dessus de l’établi et se disent que le mieux est peut-être de le restaurer!
    C’est ce que les communistes français ont peut-être commencés à faire à leurs 38ème congrès!
     
    Malheureusement, l’outil abîmé est aussi utilisé avec la main droite du gaucher, celle qui n’a pas bien acquis le savoir-faire! … et elle ne veut pas lâcher le manche!
    Avant de pouvoir entamer un vrai travail de restauration, il faudra donc l’y résoudre!
     
    Au 38ème congrès, cette ancienne direction a été désavouée par la majorité des militants, le signe que quelque chose se passe, que les bruits stridents que fait l’outil mal réglé commencent à taper sur les nerfs!
    Certes! Mais est ce que cette majorité a assez de savoir-faire (qualitatif et quantitatif) pour comprendre comment le réparer?
     
    Et d’ailleurs, c’est quoi le savoir-faire communiste? Est-ce juste le marxisme comme le propose Jonathan? Les menchéviques,anciens ou modernes, pour la plupart se revendiquent de Marx!
    N’est ce pas plutôt le marxisme-léninisme? La combinaison théorie/pratique qui a permis la création des seuls gouvernements communistes ayant réellement apporté quelque chose à l’humanité et/ou ayant survécu jusqu’à aujourd’hui dans le monde?
    Les anciens menchéviques ont été débarqués du parti par Lénine! N’est-il pas temps de faire de même, au PCF, avec les modernes? De transformer l’essai réalisé au congrès? De bouter hors du parti les non-communistes qui le dénaturent*?
    Pour ce faire, il est probable qu’un maximum de voix doivent se faire entendre à l’intérieur du parti, des voix avant-gardistes ayant acquis un savoir-faire marxiste-léniniste!
    Probablement, comme le demande Jonathan, est-ce le bon moment pour ceux ayant quitté le navire ( PRCF et autres) d’y revenir, de préférence ensemble, de manière concertée et stratégique!
     
    La période est cruciale et, vu de l’extérieur, la célébration du centenaire du parti pourrait être une bonne occasion de faire de l’agit-prop marxiste-léniniste!
    Je ne connais pas trop le fonctionnement du PCF et comment pourraient être éjectés les parasites (convocation d’un nouveau congrès extraordinaire d’urgence nationale? putsch? révocation pure et simple pour non conformité à l’idéal communiste?) mais dénoncer à l’occasion de cette célébration certains faits avec force, précision, voire éclat, d’en rappeler d’autres avec ferveur et admiration, serait un bon début de tentative de reprise en main de l’outil. Une occasion aussi de première sélection entre le bon grain et l’ivraie!
     
    Revenir au parti, n’empêche pas pour autant dans un premier temps de pouvoir conserver des accessoires de formation en dehors! Étant donné l’apparente carence en formation au sein du parti, ce serait même une obligation, en tant qu’auxiliaire indépendant, pour permettre au bon grain “sélectionné” de développer son savoir-faire en dehors de l’emprise de la main droite! Le présent blog en est un formidable qui a, j’en suis sur, déjà joué en partie ce rôle! Le PRCF en est sans doute un autre.
     
    Les temps changent! De plus en plus de gens se mettent à questionner le système capitaliste mais comme le répète souvent Danièle, aujourd’hui ce sont trop souvent les fascistes (bien aidés par la démocratie bourgeoise, ses Mouvements et sa pensée “fast food”) qui leurs donnent les réponses! Celles-ci sont simplistes, réactionnaires et souvent haineuses, communautaristes, racistes, toujours anti-communistes!
    L’avancée économique actuelle de la Chine et son rôle dans la lutte contre le coronavirus peut faire fortement évoluer la conscience politique des masses. Mais aujourd’hui encore, dans l’esprit de la majorité des gens, ce n’est toujours qu’une sale dictature communo-capitaliste (on sait pas trop comment l’appeler) polluante et liberticide! Tout sauf un modèle! Ne parlons même pas de l’URSS de Staline!
     
    L’exigence communiste est sa force idéologique mais aussi sa faiblesse pratique dans une société décérébrée! Faire comprendre à un social-démocrate honnête et sincère qu’il faudra passer par une dictature (du prolétariat) démocratique avec un parti probablement unique exerçant un pouvoir fort, se disant communiste mais acceptant, éventuellement à forte dose, le (grand) capitalisme, etc, etc… n’est pas une chose simple et requiert une forte capacité de persuasion, basée sur une grande connaissance, peu courante aujourd’hui.
     
    Reprendre en main l’outil et en éjecter ses traitres anti-communistes est, il me semble, votre première tâche à accomplir!
    Le restaurer en qualité (savoir-faire) et quantité (nouveaux membres prolétaires) et en faire une machine de guerre indépendante, sure de sa puissance et de son efficacité, est l’étape suivante.
    Seulement alors, à moins de circonstances extraordinaires à ne jamais négliger, l’éducation à grande échelle des masses hors parti, (prolétaires, petites bourgeoises) pourra être envisagée et les grands capitalistes interpellés !
     
     
    *(je me suis d’ailleurs toujours demandé comment des non socialistes ou des non communistes pouvaient statutairement diriger des partis socialistes ou communistes! Pensez-vous qu’un communiste resterait longtemps à la tête d’un parti socialiste? Pourrait-il même y accéder?)
     
     

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    • Jonathan
      Jonathan

      Bonjour,
      Pour commencer, je partage votre position sur le marxisme-leninisme.
      Je ne l’avais, ici, pas précisé (et c’est peut-être une erreur de ma part) car il me paraît naturel de considérer que le leninisme est le développement du marxisme de l’ère impérialiste. (d’autres parleront du maoisme, mais ici n’est pas le débat.)

      Je pense que quand j’utilise la métaphore de la scie, il y a quelques limites au raisonnement tout de même.
      Aussi, j’aimerais préciser, que je vivrais personnellement le fait de ” virer” les brebis galeuses comme un échec.

      Un échec car premièrement, je ne me reconnais aucune autorité à distribuer des points de pureté politique à quiconque, n’ étant moi-même pas un matérialiste accompli ; mais aussi parce que je considère que dès lors qu’on fait entrer dans le domaine de la lutte de classe la notion subjective de pureté, on y fait entrer celle de l’impureté, et donc, par conséquent, le jugement moral du bien et du mal. Or, même avec tous les manquements théoriques et intellectuels que je porte, je sais qu’il n’y a aucun matérialisme dans ces considérations.
      J’ajoute ici que ces membres ne sont que des produits d’un mode productif et que le socialisme doit être pour tous.
      Leur ôter la possibilité d’évoluer en révolutionnaire est donc improductif.

      De même, commencer à rentrer dans ce jeux, c’est se risquer soi-même un jour à être dégagé, possiblement de façon injuste.

      Je pars du principe que tout est question d’intérêts et de rapports de forces.

      Qu’elle est la motivation première des cadres actuels dont est fait ici le reproche ou du moins la critique ?
      -c’est le fait que le parti est la seule organisation qui leur donne à manger, et bien en leur laissant une autonomie totale, érigée sous le dogme de la ” democratie”.

      Coupez la nourriture au tourterelles, elles iront grailler ailleurs.

      Seulement, comment faire en sorte d’ arrêter de donner du grain ?

      Et bien en changeant les rapports de forces au sein du parti.
      Le congrès a été gagné à quelques chose près comme une moitié/moitié.
      Ça veut dire, concrètement, en prenant en considération que beaucoup ont voter en suivistes ou du moins pour ne pas déranger etc, que nous n’avons pas la majorité.
      Nous n’avons pas le rapport de force en notre faveur au sein même de notre propre parti, alors même que nous somme dans le camps vaincoeur du congrès.

      Il faut d’ailleurs préciser le dévoiement complet du texte du manifeste et des ajouts, suppressions, modifications terribles qu’il a subi.

      Partant de ce constat, il ne faut pas vouloir atelier la charrue avant les bœufs.
      Il faut s’assurer d’avoir le bon outil théorique pour analyser de façon révolutionnaire et donc matérialiste la situation: nous l’avons, c’est le marxisme-leninisme.

      Ensuite il faut réformer de partout, autant que possible les militants au sein des structures de base du parti, afin de pouvoir être plus à même d’avancer dans le retour dans les entreprises.

      Il faut reconquérir la couche laborieuse, et proposer pourquoi pas, des soirées formation, des choses intéressantes.
      Mettre à disposition la capacité des camarades à organiser des actions concrètes du parti à l’intérêt des travailleurs, réaffirmer notre constance et notre présence.
      Reconstruire des liens entre sections.

      Tout cet effort devant mener à l’intégration nouvelle de membres de la classe ouvrière actuelle au sein des directions de section, puis de fédération.
      Si, en deux ou trois ans, une dizaine de fédération se retrouvaient modifiée dans leur ensemble social, avec en tête de sections, dans les bureaux, des membres influents du prolétariat ouvrier, formé lui-même au marxisme-leninisme, donc au matérialisme dialectique, alors un changement de rapport de force s’installe.
      C’estdonc à partir de ce rapport de forces nouveau que nous pouvons construire, en profondeur, une ligne révolutionnaire et ainsi nous inscrire dans le réel afin d’amener les conditions nécessaires à une révolution socialiste.

      Sur la nature obsolète ou pas de l’outil PCF, je pense que le débat n’a même pas besoin d’être mené. En tout cas, je n’y participerai pas.
      Le parti est le seul outil dont nous disposons.
      Aucun groupuscule n’est en capacité de détenir les forces matérielles du PCF.
      Il est notre seul devoir de le reconstruire, de lui redonner sa forme révolutionnaire.
      Ne pas le faire, ne pas y participer, c’est laisser seuls, les jeunes camarades qui EUX, en dépit de toute propagande ont renoué avec ceux qualifiés de ringards, c’est abandonner la jeunesse et donc l’avenir communiste en se contentant de participer à des groupuscules inconsequents, qui, tout comme les gauchistes ou autres révolutionnaires societaux se premunissent malheureusement du travail profond révolutionnaire, en gardant bonne conscience.
      C’est sans haine que je dis cela. C’est juste réel, et si cela touche ou indigne, ça ne fait qu’ajouter de la valeur à mon propos.
      Nous avons besoin de vous, dans notre Parti.

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