Histoire et société

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Trois Français sur quatre n’espèrent rien de l’Europe

Seuls 26 % des Français voient un « espoir » dans la construction européenne selon un sondage Odoxa. Pire, 35 % la craignent. Les jeunes sont tout aussi pessimistes que leurs aînés, nous décrit ce sondage publié par le Parisien. Dans ce domaine comme dans bien d’autres les Français ne croient plus ce qu’on leur raconte et sont proches de la lucidité à partir de leurs conditions de vie. Mais dans ce domaine comme dans d’autres – leur inculture scientifique de masse- faute de force politique réellement révolutionnaire, leur lucidité sur le mensonge des gouvernants peut-être récupérée par l’extrême-droite ou les conduire au repliement. Un PCF qui renonce à porter la vision de la social-démocratie dans ce domaine comme dans d’autres est nécessaire à tout changement, celui qui mettra l’accent sur les coopérations tout en dénonçant l’inféodation irréversible de l’UE au capital monopoliste et financiarisé (note de Danielle Bleitrach pour histoire et société).

La plupart des jeunes pensent que l’Europe est inefficace en particulier sur la question de l’emploi et de l’environnement.

Par Henri Vernet Le 28 février 2020 à 15h20, modifié le 28 février 2020 à 20h25

Un mois après le Brexit, y a-t-il encore quelqu’un pour croire en l’Europe? Pas grand monde, hélas, à en croire le sondage Odoxa réalisé à l’occasion des Entretiens européens d’Enghien ( NDLR : le samedi 29 février, Pergola Nova, 87 rue du Général-de-Gaulle, inscription sur www.iris-france.org ), organisés par l’Institut des relations internationales (Iris), en partenariat avec le Parisien et Aujourd’hui en France. À peine un Français sur quatre (26 %) voit dans la construction européenne un « espoir ». Le sentiment vis-à-vis de l’UE le plus représenté parmi les sondés (pour 39 % d’entre eux) est la « crainte ». Tandis qu’un Français sur trois (35 %), désabusé, n’éprouve ni l’un ni l’autre.

Il y a dix ans, l’espoir dominait (50 % en 2011, et un énorme 61 % en 2003). Plus décevant encore pour l’Europe, les jeunes – les 18-34 ans – sont tout aussi pessimistes que leurs aînés. Si l’on rentre dans le détail de l’enquête Odoxa, un clivage inquiétant apparaît : plus les jeunes sont ruraux, peu ou pas diplômés et populaires, plus ils sont « craintifs » vis-à-vis de l’Europe, les jeunes Franciliens, cadres et aisés étant sensiblement plus « optimistes ». Comme un air de Gilets jaunes envers l’Europe de Bruxelles.

L’Europe perçue comme un facteur d’aggravation des inégalités

Pourquoi ce désamour? « Parce que nos concitoyens pensent que l’action de l’Europe n’est pas efficace dans les domaines les plus importants à leurs yeux, notamment sur l’emploi et l’environnement », répond Gaël Sliman, président de l’institut Odoxa. Ainsi, alors que l’emploi est la priorité numéro 1 pour 72 % des jeunes, ils sont 67 % à juger l’UE « inefficace » sur ce sujet. De même, la grande majorité des 18-34 ans (68 %) n’attend rien d’elle sur l’environnement, deuxième priorité. Un comble, quand on se souvient que la nouvelle Commission présidée par Ursula von der Leyen a fait de son « Green new deal » – Pacte vert – son point fort. À l’évidence, les actes forts avec des résultats visibles vont devoir supplanter d’urgence les belles paroles.

Trois Français sur quatre n’espèrent rien de l’Europe

Autre raison de désenchantement, l’Europe est perçue comme un facteur d’aggravation des inégalités. « Nos concitoyens, tous âges confondus, sont persuadés que les cadres (68 %), les chefs d’entreprise (68 %) ont été les grands gagnants alors que les ouvriers (59 %), les retraités (60 %) et les agriculteurs (61 %) sont les grands perdants, précise Gaël Sliman. Plus les personnes interrogées appartiennent elles-mêmes à des milieux populaires, plus elles considèrent que l’Europe a favorisé les forts et pénalisé les faibles. »

L’avenir de l’Europe vu par les jeunes Français est plutôt sombre. Les 18-34 sont 65 % – davantage que l’ensemble des Français – à prédire que, dans les dix prochaines années, d’autres grands pays historiques de la construction européenne sortiront de l’Union, comme vient de le faire le Royaume-Uni. Et, comme leurs aînés, ils voient proliférer sur le Vieux continent les contestations populaires de type Gilets jaunes ou Indignados en Espagne, et se multiplier les gouvernements populistes et autoritaires comme en Hongrie ou en Pologne. « Il y a vingt ans la jeunesse française rêvait de vivre l’Auberge espagnole de Romain Duris, aujourd’hui elle semble craindre que l’UE ne lui rejoue le Grand dictateur de Charlie Chaplin », conclut le politologue.

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