Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

Réaction face aux propositions du PCF pour protéger la population de l’épidémie, par Danielle Bleitrach

Il s’agit ici d’un positionnement individuel, une contribution pour faire connaître ces propositions et qu’elles deviennent le bien de tous…

Ce blog en effet s’adresse aux militants communistes mais aussi à bien d’autres. Bien sûr, en tant que membre de ce parti, j’attends des positions collectives assez proches des miennes, en particulier sur la question du socialisme. Je m’y associerai à l’intérieur des discussions du parti, pour que le débat soit mieux centré et devienne toujours mieux le fruit de “l’intellectuel collectif” qu’est le PCF. Enfin soyons honnête, cet intellectuel collectif qu’il devrait être. Ce qui ne saurait tarder tant la demande est forte, quand il aura renoncé à la censure et au monopole de la parole de certains dans la presse, dans l’Humanité.

Enfin, il faut bien voir qu’aujourd’hui l’action de tous est limitée par le confinement et que la réflexion devient plus que jamais un mode d’action non négligeable parce que si les idées s’emparent des consciences elles deviennent une force matérielle.

Donc il faut dire que ces propositions d’abord ont le mérite d’exister et que le PCF demeure le seul parti encore en état de proposer des mesures immédiates qui sont effectivement celles qui urgent… Il est le seul à pouvoir agir ainsi parce qu’il a conservé un appareil militant qui – même s’il a été coupé par des dirigeants indignes de sa base ouvrière – reste le seul qui n’est pas dans le déni de réalité. Parce qu’il a encore des dirigeants sincères et dévoués qui pour la plupart ne pensent pas qu’à eux, ce qui est une manière de rupture avec le monde politique et médiatique que nous subissons.

LE TITRE DIT TOUT / PROTÉGEONS LA POPULATION. IL HONORE CE PARTI, LE REND DIFFÉRENT DES AUTRES.

Et à ce titre le PCF n’est pas seulement le parti de ses adhérents, il a autour de lui toute une nébuleuse de ceux qui ont été communistes, ceux qui ne savent pas qu’ils le sont, des groupuscules qui tous croient détenir la solution, tout cela n’est pas rien, même si cela représente souvent un facteur de découragement pour ceux qui tentent de s’engager.

Mais il faut voir aussi que tant sur le plan de la formation que de l’organisation ce parti a été mis à mal depuis des décennies. La rupture n’a pas été seulement avec la classe ouvrière, mais avec sa propre histoire et avec le mouvement communiste international.

Le communisme est au meilleur des cas devenu un espèce d’idéal vague n’ayant jamais existé. Ce qui comme bien des idéalismes permet en fait de le concilier avec tous les opportunismes. Voire pire, en matière internationale, où en suivant la social-démocratie, nous avons cautionné parfois des pillages impérialistes et même dans quelques cas, trahi les partis frères et les forces engagées dans ce combat, comme le peuple cubain. Mais fort heureusement ces pratiques sont restées de sommet et n’ont jamais réellement pénétré le parti qui s’étonne quand il les découvre.

Mais pour en revenir au communisme “idéalisé” que nous opposions à un communisme réel noirci à la mode de la bourgeoisie, même cet idéal vague était encore en rupture avec ce que le capital faisait de notre société et des partis politiques. Le choix de privilégier les élus de la même manière nous a entraîné à des compromis mais il a permis aussi d’avoir des gens de terrain au fait des problèmes concrets, les militants même s’ils étaient transformés en soldats de campagne électorale gardaient l’idée qu’un élu devait être utile et leur refus du fascisme était bien réel. Même si parfois cela s’assortissait de naïveté et d’illusions parce que certains allaient vers la classe ouvrière et les couches populaires sans en être partie prenante.

Il faut bien mesurer là où nous en sommes, ne pas se bercer d’illusions. Célébrer les héros mais voir là où nous mène ce capitalisme, cette absence de masques devenue un symbole, mais aussi les masques volés jusque dans les hôpitaux. L’infirmière qui vient chez moi a désormais non seulement un masque (et un stock insuffisant), mais des lunettes de ski et la tête couverte parce qu’il y a des gens qui crachent des balcons sur les passants parce qu’ils sont seuls malades peut-être et qu’ils veulent que tous meurent avec eux. Ce régime a créé la haine de la police de l’armée, il les a empêchés d’être au service du peuple. Ils ont fait tirer sur lui quand il manifestait pour défendre l’hôpital public. Pourtant, il en faut et il en faudra plus que jamais quand les vivres viendront à manquer, mais ils ne seront crédibles que s’ils ont aidé les militants à organiser l’alimentation et su s’opposer aux dealers. Si nous sommes proches de la population, nous ne raisonnons plus en terme de race, mais nous ne nous inventons pas des bisounours quand des zones entières vivent du trafic de drogue et vont tenter par tous les moyens de s’opposer à toute organisation collective pour protéger la population. Nous saurons aussi que leurs chefs ne sont pas dans les cités, mais dans les beaux quartiers et que les principales victimes de cette violence sont elles encore dans les zones de pauvreté… C’est tout cela qu’il faut regarder en face et savoir que seront nos meilleurs alliés ceux de cette jeunesse qui n’acceptent pas cette loi de la jungle. Et c’est pour cela que l’extrême-droite qui renforce la haine de la police, qui met tout le monde dans le même panier et entretient de fait partout la corruption, les voyous, est le meilleur défenseur du capital quand il n’a plus d’autres solutions face à la révolte des masses. Arrêtez de jouer les dames patronnesses et pratiquons réellement l’antiracisme et la lutte pour nous protéger tous.

Comme nous avons mis un frein total sur les achats qui ne relèvent pas de la nécessité en particulier alimentaire, ceux d’entre nous qui ont encore un peu de latitude dans leur budget auront presque l’impression d’avoir fait des économies, mais déjà ceux parmi nous qui se limitaient à cette nécessité s’aperçoivent de la hausse des prix, en particulier dans l’alimentaire et l’angoisse monte. Ils ont raison, le danger n’est pas seulement celui d’une épidémie, il est celui d’une crise économique qui a précédé l’épidémie (et à déjà été à l’origine de “l’impréparation” de nos gouvernants), et dont il faut prendre conscience dès maintenant pour savoir qui va payer “leur” crise, je veux parler des capitalistes et de l’eur économie basée sur l’accumulation des profits. Pour savoir que nous risquons dans un avenir proche d’être confrontés à des difficultés d’approvisionnement, avec tout ce qui s’ensuit.

Le texte du PCF reflète cela, il est à la fois concret et une esquisse et il a répétons-le le mérite d’exister, de proposer des mesures immédiates utiles. Pourtant dès qu’il sort de là il ne prend pas assez la mesure de ce qui non seulement est déjà là, de ce qui attend les couches populaires en particulier, notre pays en matière de crise économique et donc de civilisation. Il ne dessine pas assez une issue politique qui ne peut être que le socialisme, sans cette issue stratégique nous sommes condamnés à des ravaudages illusoires, le rassemblement nécessaire demeurera purement institutionnel alors que les institutions font eau de toute part. Les militants joueront un rôle associatif, syndical, mais ils ne diront pas l’issue pour lequel ce parti a été créé et qui a inspiré toutes ses réalisations, toutes ses actions, en finir avec le capitalisme et créer un socialisme qui corresponde réellement aux problèmes rencontrés, à l’histoire de chaque peuple, à la nécessite de coopérations internationales autant que locales.

Faute d’une stratégie, d’une issue politique affirmée, le socialisme, il n’arrive pas de ce fait assez à s’arracher à l’existant, alors même que celui-ci s’effondre, le cas de l’Europe est particulièrement clair. Pour penser des formes de coopérations nouvelles à l’échelle du continent, mais aussi sans doute celle de l’Eurasie et de la planète on ne peut pas rester dans un cadre tel qu’il est même en proposant des rafistolages.

L’absence de stratégie pour le socialisme, le fait de ne même pas oser dans un moment aussi grave que celui que nous vivons énoncer le terme prouve à quel point il faut encore travailler, parce que tout dépend de cette issue. Le parti ne pourra pas envisager son organisation, la formation de ses militants sans cette perspective, mais il y a plus, elle conditionne le rassemblement réel pas seulement “institutionnel”. Elle ne permet pas de tirer la leçon de ce que tout le monde constate dans cette crise, c’est à quel point les pays qui ont à leur tête des communistes, qui ont organisé une société civile plus militante, plus collective résistent à l’épidémie et se portent en avant pour aider les autres, par générosité mais aussi parce qu’ils savent qu’en aidant les autres, ils s’aident eux-même. Non seulement le capitalisme exacerbe les individualismes, les concurrences, les haines mais devant le combat il ne sait qu’organiser les luttes intestines, le chacun pour soi et la mort pour tous. Si nous ne disons pas cela, nous laissons la place à l’idéologie de la bourgeoisie qui fait du communisme l’épouvantail bien connu et tous nos beaux discours sur l’humain d’abord resteront lettre morte.

Ce que j’ai essayé d’expliquer dans mes mémoires c’est que cette absence de stratégie ou son inadaptation aux changements tels qu’ils se sont accélérés à partir des années soixante et dix, ce que l’on désigne d’un terme vague comme le néolibéralisme marquait le fait que le capitalisme utilisait sa propre crise et la reportait sur le tiers monde, sur les pays socialistes, puis sur les pays impérialistes eux-mêmes en aggravant les contradictions sociales. Il ne faut pas ne pas lier ce stade du capitalisme à celui de l’impérialisme des guerres mondiales et croire que lui seul est à vaincre, le mal est plus profond, mais il faut avoir une stratégie qui à la fois reste sur les fondamentaux et est très attentif à ce qui change. La plupart des divisions, des erreurs, des fautes commises (en dehors de quelques véritables voyous) ne sont que le fruit de ces difficultés stratégiques et donc de la réflexion sur le parti qu’il nous faut.

Soit un parti est la somme d’intérêts individuels cherchant à faire carrière et on voit à travers l’exemple de la LREM, ce que cela peut représenter d’impuissance caricaturale, soit c’est le parti qui à travers une lutte des classes acharnée impose l’intérêt de ceux qui n’ont rien sauf leur patriotisme, leurs enfants à défendre et qui est l’intérêt général.

UN PARTI QUI AFFIRME / PROTÉGEONS LA POPULATION ASSUME SON RÔLE D’AVANT-GARDE. IL N’ATTEND PAS, IL AGIT, ALERTE, PROPOSE ET C’EST BIEN

Mais il y a plus bien des gens n’ont pas attendu les communistes pour tenter des pratiques nouvelles, inventer des solidarités, les mettre en œuvre. Trop souvent ces initiatives se heurtent au fait que le capital les limite, les empêche de prendre toute leur ampleur, si nous ne montrons pas que pour combattre le capitalisme il faut le socialisme, nous ne donnerons pas à cette créativité sociale la possibilité de se réaliser. Une avant-garde, et je j’ai jamais abandonné l’idée de cette nécessité ce n’est pas un éteignoir qui cherche à tout contrôler, à empêcher d’exister ce qui n’est pas elle, mais tout le contraire, c’est une force attentive à ce qui se crée dans et hors d’elle, ce qui jaillit du sol, de la rue, de l’entreprise pour le porter à un niveau politique le plus haut, celui de l’intérêt général. C’est vrai dans les sciences, dans les arts, ça l’est plus encore en matière politique.

Il est faux de croire qu’il n’y a qu’une seule voie à emprunter quand nous parlons de socialisme, qu’il faille la suivre à l’exclusion de tout autre, mais toujours nous retrouverons la question posée aux bolcheviques, celle de l’action du pouvoir politique sans se mettre en tutelle sous ce qu’à l’époque on appelait les “prêteurs”, aujourd’hui cette chose monstrueuse intitulé le capital financier. A ce titre le texte esquisse des solutions mais reste en deçà en matière de nationalisation et de planification. Il apporte par rapport aux défauts potentiels de ceux-ci mais pour le moment ce que nous avons à affronter est d’une tout autre nature. Il faut conserver ces garde-fou mais ne pas ignorer ce qui est basique.

Voilà, sachez que je n’ai aucun intérêt à dire ce que je vous dis, je n’ai jamais eu le moindre intérêt personnel, alors au moins si vous ne voulez pas suivre ce que je dis, une fois entendez et discutons-en.

Je sais par expérience que ce que je dis à titre individuel, avec ma sensibilité propre d’autres le pensent et mieux le mettent en œuvre y compris à la direction du parti, le 38 ème Congrès n’a pas été un coup d’épée dans l’eau et des choses ont commencé à avancer, ce texte en témoigne aussi et il faut le prendre au sérieux, populariser les mesures mais il faut aussi considérer que nombreuses doivent être les prises de position individuelles ou collectives pour dire aussi sincèrement et d’une manière constructive, intervenir dans ce parti qui est à eux: “que les bouches s’ouvrent, pas de mannequins dans le parti”, mais aussi comme nous y invite ce texte, il faut faire.

Je me permets de rappeler aux lecteurs de ce blog, le 25 février alors que je mettais en garde contre la pandémie, j’invitais le PCF à retrouver le simple bon sens devant la réalité et sa vocation à définir un changement de société le socialisme. Ce texte ne manque pas de bon sens, il reste le socialisme…
Danielle Bleitrach

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3 Commentaires

  • pedrito

    Merci, chère Danielle, tu entretiens la flamme, NOTRE flamme communiste, comme peu, sans aucun intérêt politicien, si d’autres pouvaient s’enorgueillir de la même ténacité militante…..Merci encore pour mettre sans cesse tes capacités au seul service de notre si belle et noble cause

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  • Franck MARSAL
    Franck MARSAL

    Je suis 100 % d’accord. En particulier, sur la question (je le dis avec mes mots) de penser et d’agir pour un internationalisme qui dépasse le cadre de l’Europe, cette Europe qui n’est plus qu’une partie d’Europe, coupée de la Russie, de la Turquie et désormais de la Grande Bretagne, qui a laissé la Méditerranée se transformer en un fossé de sang et n’a aucune perspective d’action réelle, n’ayant jamais dépassé les égoïsmes qui la compose.
    Je souscris également sur les questions économiques. La crise capitaliste qui murit depuis plusieurs décennies, est à un stade avancé. Le degré de socialisation de l’économie nécessaire pour dépasser ce stade sera largement plus élevé que ce que nos héros de 45 avaient pu mettre en place. Il devra aller bien au delà des services publics essentiels et des entreprises stratégiques. Les possibilités énormes offertes par les nouvelles technologies appellent des structures sociales beaucoup plus avancées.
    Nous avons du pain sur la planche.

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    • Daniel Arias
      Daniel Arias

      Il faut quand même noter que là où le socialisme c’est réalisé de lui même Russie, Chine, Cuba, Vietnam, RPDC, la structure économique était surtout agraire et loin des pays les plus avancés dans la technologie de production comme en Grande Bretagne à cette époque. Par contre ces pays se trouvaient aux frontière des conflits impérialistes, 1ère GM, occupation japonaise, longues guerres d’indépendances en Amérique latine, occupation française, agression USA.
      La vassalisation des pays de l’UE à l’Allemagne en interne et aux USA dans l’ensemble va poser problème pour la relocalisation des productions des grands groupes capitalistes pris dans la thrombose de l’épidémie.
      Soit le capitalisme poursuis sans changer au risque de nouvelle paralysie, soit il relocalise et pour garder son profit il sera obligé de réduire les salaires dans toute l’Europe. Ce qui entraînera fatalement une limitation de la circulation simple des marchandises et par conséquent du capital. Le capital n’a pas de solution les milliards injectés n’ont aucune valeur productive réelle. La contradiction consommateur-producteur est antagonique.
      Des crise à venir la coopération est souhaitable, mais comment va réagir la classe dominante ?
      Nous le voyons en pleine crise, nationalisme chez les apôtres du libre échange, provocations militaires et politiques. Plus que jamais le choix entre socialisme et barbarie devient urgent. Le mouvement communiste est déjà mort dans les pays de l’UE. Tous les militants du PCF devraient se ressaisir et devenir plus exigeant envers la direction et que les anti communistes quittent le Parti clairement, ils n’ont rien à y faire.

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